20/06/2008
Walt Whitman
Le chant de tous et de moi-même
Lire « Leaves of grass »(1), c’est lire un homme entièrement incorporé, de corps et d’esprit, dans le monde. Dès le premier poème, Walt Whitman pourrait nous apparaître comme un heureux terrien, en pleine possession de lui-même, souverain de son corps et de son âme, sans que nul désenchantement ne puisse l’affaiblir ou le ternir, résolument amoureux de tout ce qui croît à l’air libre, résolument fort en gueule, charnel, sensuel, mangeur, buveur, baiseur dans sa grande aventure ici-bas et auprès de ses semblables. Qu’ils soient de l’île de Manhattan ou d’ailleurs, peuple des cités ou hommes de la nature : la contralto, le charpentier, le chasseur, les diacres, la fileuse au rouet, le fermier quaker, le fou à l’asile, l’imprimeur de journal, le mécanicien, le jeune cocher, les groupes d’immigrants, la vendeuse squaw, l’amateur d’art, les hommes de pont, l’épouse, la jeune ouvrière yankee, le paveur, le journaliste, le peintre d’enseignes, l’employé du canal, le comptable, le cordonnier, le chef d’orchestre, l’enfant baptisé, la future mariée, le mangeur d’opium, la prostituée, l’équipage du chalut, l’homme du Missouri, le billeteur du train, les carreleurs, les zingueurs, les maçons, le pêcheur de brochet, le squatter…
« (…) tous viennent vers moi et moi je vais vers eux,
Et, dans la mesure où cela se peut, je suis plus ou moins chacun d’eux,
Et avec eux tous sans exception je tisse le chant de moi-même ».
Whitman s’abandonne à eux, comme il s’abandonne à la terre et à la mer, et à tous les plaisirs que ceux-ci lui peuvent procurer. Il les appelle de son indicible amour passionné. Mais autant que les douceurs du ciel, il ignore rien non plus des plaisirs de l’enfer qui l’accompagnent ; et de même peut-il se proclamer poète de la femme autant que de l’homme, homme et femme se tiennent à hauteur égale, sans distinction de petitesse ou de grandeur. Même l’herbe peut pousser sans limite à divers endroits de la terre, aussi bien chez les Noirs que chez les Blancs, car voici que le plus simple des végétaux, qui sait, est peut-être aussi une enfant, la toute dernière-née de la végétation. Aussi proche il est de ces hommes et de ces femmes dans leur quotidien de joie et de tristesse, et de même qu’il peut se retrouver dans le tumulte des rues, avec tous et parmi tous, Whitman peut tout aussi bien se retrouver en solitaire au fond de la forêt.
De tout ce qui l’entoure, de tous les évènements qui se tissent, se trament et se passent, de ses relations avec les uns et les autres, de ce que la vie peut lui réserver de plaisirs et de déplaisirs, le poète s’interroge de tout cela, comme tant d’autres assaillis d’interminables questions, mais cependant, cela ce n’est pas moi, le Moi réel. Celui que je suis est toujours à l’écart de la mêlée (…) Je suis un témoin impassible. Le poète croit en son âme, mais son autre Moi ne doit pas s’humilier devant elle, pas plus que son âme ne doit s’abaisser devant cet autre Je du poète, ce dernier qui, d’ailleurs, ne sait non plus ce que peut signifier se mettre en prière. Pour quelle vénération ? Car ce qu’il voit chez les uns et chez les autres, c’est lui-même qu’il voit, et tout ce qu’il pourrait juger des uns et des autres, il porterait le même jugement sur lui-même. Whitman se tient bien debout, et ça il ne le sait que trop ; de la même manière qu’il se sait immortel, se moquant bien de notre conviction que la mort serait belle et bien réelle :
« Mortaises et tenons, mon pied fait socle dans le granit, Je me moque de ce que vous nommez dissolution
Car je connais l’amplitude du temps ».
Sans souci, et dans toute la force de son corps et de son âme, peut-il alors poursuivre son voyage en promeneur amoureux ahuri de ma propre légèreté, de ma liesse.
Et maintenant, que sont la vertu et le vice, et tout ce qui peut s’en dire. Ni plus bon que mauvais, quelle différence alors entre ce qui est pris d’un côté comme bien et d’un autre côté comme mal. Ce qu’ont été et ce que sont désormais nos actions, l’essentiel se tient à ce qui nous témoigne jour après jour de sa valeur, et ce qui ici vaut davantage que tout le reste : c’est maintenant.
« Pensées ou actes du présent sont notre éveil, notre départ précoce ».
Mais il y a aussi un Whitman imprégné de matérialisme, et n’est-ce pas aussi pour cette raison qu’il dit accepter la Réalité, sans douter d’elle le moins du monde. Il prend autant soin qu’il est à la fois subjugué par les miracles des sens, par la moindre des particules qui animent ce monde. Intestins, tête ou cœur, odeur des aisselles : tous ont leur propre subtilité. La plus grande vénération du poète sera autant ce que lui-même touche que ce qui le touche et l’émeut. Son corps, son âme : un Kosmos ! Tout ce qui vient vers lui le remplit, l’inonde, et ce que l’on nomme désir, ou encore cause et effet des évènements qui surviennent, de quelques sortes que ce soit, il ne sait réellement d’où cela peut venir, et comment de telles choses du monde peuvent se faire ou ne pas se faire : de la plus petite lumière à la plus juteuse clarté ; d’une amitié que l’on appelle à celle que l’on reçoit. Ainsi est que :
« L’illumination matinale à ma fenêtre me plait mieux que la métaphysique dans les livres ».
Le soleil de l’aube pourrait cependant l’affaiblir ou le terrasser, mais rien de tout cela, et pas même un effort pour surmonter pareil défi, car le poète a lui aussi son propre soleil ! et ses rayons suffisent à contrer ce qui pourrait apparaître au poète comme éblouissant ou tragique. Nous tous sommes à la mesure du soleil, comme l’herbe de la terre est à la mesure du travail des étoiles. Nous tous avons cette capacité à étonner. Cependant, le poète s’abstiendra du pouvoir du langage. La preuve de sa science et de sa joie n’est pas dans l’écriture ou la parole.
« …Du silence de mes lèvres j’humilie le sceptique à plate couture ».
Son chant de lui-même, et par conséquent des autres, se fructifie. Chant de lui-même, chant de dehors et de dedans, fait de sons composites, fusionnant, successifs, fait de tous les bruits universels, même de ceux qui proviennent d’on ne sait où, bruits d’ailleurs, bruits qui sommeillent en tout être et qui parfois se trahissent, telles les mains nerveuses sur son pupitre, ou tel encore le ton affaibli des malades. Autant de complaintes, de mélodies qui agressent, ébranlent ou arrachent de toute part le poète, puis le ravissent et le comblent d’une plénitude toute mouvementée, plus loin que l’orbite d’Uranus.
« (…) Jusqu’à ce que libre enfin j’éprouve la merveille des merveilles,
Cela qu’on appelle Etre ».
La source de bonheur de Whitman ? Simplement mouvoir, presser, toucher avec les doigts. Mais bonheur aussi parce que tout est chef d’œuvre aussi. Toute espèce vivante, de la fourmi à la rainette, à la ronce des mûres, à la vache, à la souris… Ainsi, les animaux ne vont-ils pas eux aussi lui montrer leur parenté avec lui et l’obliger à un moment de répit : qu’il puisse rester des heures à regarder ces quadripèdes sans religion, sans vénération pour leurs ancêtres, et qui jamais ne se prétendent respectables ni malheureux sur terre. Mais le poète, toujours plus en course vers le futur, infiniment désireux de tout, réceptif à toutes choses, peut-il accepter de ne plus bouger, et s’asseoir, il dira cependant aller plus vite que le galop d’un étalon. Le poète sait s’accorder des répits, s’attarder mieux que jamais, mais il semblerait qu’il a toujours besoin de voir, de mieux voir, en même temps qu’il se dit avoir vu juste, et cela qu’il soit couché sur son herbe, comme il dit, ou couché, seul, dans son lit.
Quand les pensées le quittent, et qu’il demeure seul avec lui-même et son silence, le poète continue de marcher ; tant d’autres routes à cheminer, tant d’espaces à traverser, jusqu’au verger des astres qu’il visite pour contempler ses fruits. Tant de vols que le poète accomplit d’une âme avide et fluide. Whitman ne se limite pas à prendre seulement le bien dans l’immatériel ou dans l’air pur. Le bien est partout, dans tout ce qu’il touche et qui le touche, la matière est aussi jouissance. La vie ne lui offre que des paysages à perte de vue, la vie est splendeur visible. Grand observateur de la vie qui bat dans les grandes cités encore debout, comme dans celles tombées en ruine et où peut encore demeurer le courage humain fortement campé sur ses deux jambes. Le poète voit tout et boit tout : son breuvage merveilleux ! dit-il. Whitman est aussi cet homme là, qui a vu des petits enfants aux yeux vieillis. Lui aussi a souffert parce qu’il était là ; lui aussi est l’esclave ; pour lui aussi l’infernal désespoir ; lui aussi a les mains qui agrippent le grillage de la clôture. Il ne faut pas lui demander ce que peut être la douleur du blessé, lui-même devient le blessé. Lui aussi allongé sur le sol avec sa chemise rouge. Lui aussi sait ce qu’est s’asseoir, mendier et avoir honte.
Ce n’est là qu’une infime partie de la poésie whitmanienne, les trente premiers poèmes de son Song of Myself. Mais après les avoir parcouru, senti et bu, tel que Whitman l’aurait probablement désiré de ses lecteurs, lui qui disait savoir la parfaite équanimité de la vie, et que jamais nous ne chantons ni ne célébrons, que par seulement de calculables vanités, d’intraitables désespoirs, que cherchons-nous si obscurément ? nous leurrant nous-même à nous sentir aussi libre que le carré de blé où siffle la caille, comme à nous faire indifférent à la délicate fleur bleue du lin, comme à nous rendre plus aimant ou plus méprisant selon la variation de nos humeurs, et comme à nous effrayer de la vie et de la mort. Chercheurs de savoirs avec nos visions embrumées et nos haleines desséchées, tout n’est-il pourtant pas plus simple, malgré les riches et parfois ennuyeuses complexités, et malgré aussi nos dégoûts et nos frissons de plaisirs certains.
Les choses invisibles et visibles, l’air des villes et des montagnes, les astres et les arbres des vergers, tout ce qui vibre au-dessus de nos têtes et devant nos yeux ; ce Tout qui est là depuis toujours, puisqu’il est déjà et depuis toujours en poésie ; de même qu’il n’est pas matière à savoir, puisqu’il est déjà Savoir ; n’est-ce pas encore la nuit ? et ne sommes-nous pas encore à la lisière du bois ? Pas d’autres pays de soi-même à visiter, n’allant jamais là où le grizzly quête du miel ou des racines. J’ignore si Walt Whitman, hier comme aujourd’hui, aurait gagné la juste reconnaissance de ses concitoyens d’Amérique, de la même manière que Rimbaud à son heure posthume. Mais Whitman avait-il raison ou non de préférer le silence, il savait néanmoins que bien des silences sont aussi faits de bruits, d’or, et de météores. Mais probablement ignorait-il ce qui pouvait alors se produire en force et en grâce. Probablement que ce qu’il ne savait pas ne se tenait seulement que sur les feuilles d’herbe, vivantes et débordantes, de son écriture et sa fulgurante énergie d’une joie communicante. Transmission du bonheur d’être, qui n’a d’égal que dans le vaste monde de la Vie.
« C’est moi que je célèbre, moi que je chante, Mais la somme que j’embrasse, tu l’embrasseras aussi
Tant le moindre de mes atomes t’appartient intimement (…)
Ma langue, la totalité des atomes de mon sang façonnés
Par le sol d’ici-même, l’air d’ici-même, (…) J’accueille, est-ce un bien, est-ce un mal,
Je laisse s’exprimer sans frein
La Nature hasardeuse dans sa vierge énergie »
(1) Feuilles d’herbes
Nathalie Riera – Mars 2007
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Dorothea Tanning
Dorothea TANNING - "Behond the Esplanade" - (1940)
- oil on canvas - 29 x 14.25 in. 74 x 36 cm.
Dorothea TANNING American artist - Image
copyright ©2007 Dorothea TANNING (USA)
- Artists Rights Society (ARS), New York / ADAGP, Paris
Dorothea TANNING - "The Birthday" - (1942)
- oil on canvas, 102cm x 65cm -
Dorothea TANNING American artist - Image
copyright ©2007 Dorothea TANNING (USA)
- Artists Rights Society (ARS), New York / ADAGP, Paris
Photograph of Dorothea Tanning, 1948, by Robert Bruce Inverarity. 14 x 11 inches (36 x 28 cm). Robert Bruce Inverarity papers, 1926-1998. Archives of American Art, Washington, DC, USA. www.aaa.si.edu
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PORTRAITS - Leonora Carrington&Max Ernst (sur un poème de R.M. Rilke)
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19/06/2008
Les sonnets à Orphée - XV
Attendez..., cet arôme... oh! c'est déjà parti.
...Rien qu'un peu de musique étouffée en murmure :
vous, chaleureuses, vous, silencieuses filles
dansez le goût du fruit tel que vous le savez!
Dansez l'orange. Oh! qui pourrait l'oublier, elle :
comme elle résistait, en se fondant en soi,
à sa propre douceur. Vous l'avez possédée.
Précieusement en vous elle s'est convertie.
Dansez l'orange. Et son paysage plus chaud,
rejetez-le de vous, qu'à l'air de sa patrie,
mûre, elle resplendisse. Ouvrez-là, la brûlante
arôme sur arôme! Entrez en parenté
avec l'écorce qui se refuse, la pure,
avec le suc qui la remplit, la bienheureuse!
Rainer Maria Rilke, Editions du Seuil (bilingue) - (p.125)
Tableau : Trois oranges et pots (huile sur toile au couteau) 41x33
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Sandro Botticelli - Les Trois Grâces
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Dire I (Extrait) - Danielle Collobert
Danielle Collobert
(1940-1978)
« On longe de nouveau la mer – marée basse, larges grèves mouillées, ligne si lointaine de l’eau. Deux chevaux galopent sur le sable dur. Appel soudain d’images belles, trop rapides. Retombée, chute, dedans, dans le moutonnement, pas de mer mais de boue, de lave, glissante, crevant de bulles, éclatant de partout, refermée, béante, difforme, surtout ça, sans forme. Mais lourde consistance. La lourdeur s’appuie sur tout ce qu’il y a, dehors, et à l’intérieur. Dans la boue, la somnolence, pour échapper. Alors apparaît l’autre partie du visage – son haut – la floraison. Ce sont des yeux clairs, embués, regard un peu difficile. De si près, les paupières luisent – grand espace vers le nez. Les cils partent droits, énormes poils drus, secs, adoucis au coin des yeux en courbe. Intensité, sous l’eau. Paravent-citadelle, forteresse. Une ouverture ».
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18/06/2008
La pénombre de l'or - Jean Mambrino
LA DEDICACE DE L'AUTEUR : "Seul ce qu'on appelle poésie peut tisser/ le fil qui relie le divers à l'unité". Une fois encore j'ai tenté (dans une forme nouvelle) de relier les mots et les choses, l'homme intérieur et l'homme extérieur, le monde du Multiple et le souffle de l'Un. Avec une sorte de simplicité somptueuse, car "l'offrande ruisselle en dissimulant sa gloire", et l'univers en sa complexité infinie se voile dans son éclat. Le plus profond secret aime à se dire dans le minime ou l'insignifiant, et comme à voix basse, non seulement pour qu'on l'entende mais pour qu'on l'écoute. J'ai usé ici de l'alexandrin sans qu'on puisse le reconnaître, les césures étant partout ; et de même les rimes se dérobent sans cesse, car chaque dernier mot d'un vers ne trouve son écho qu'à l'intérieur d'un autre vers, avant et après lui, parfois fort loin. Le chant ainsi s'entremêle au mouvement du poème, partout et nulle part, comme la musique des sphères qui enveloppe mystérieusement la totalité des choses, les plus humbles créatures comme la grandiose aventure de l'esprit, toutes les réalités, les pires comme les meilleures, la ténèbre et la lumière se tenant embrassées. "Il faut abriter chaque mot dans le poème,/ le rossignol, le muid, l'amarante, l'aurore,/ et encore le sang, la sanie, le blasphème". Tout est signe. Tout doit devenir parole, puisque la peine est l'ombre de l'or, selon la polysémie des mots du poème, conduisant le poète, comme son lecteur, vers la paix nombre de l'or, dont le chiffre réconcilie toutes les contradictions. (Jean Mambrino)
Editions Arfuyen, septembre 2002.
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16/06/2008
Ewa Partum
24 mai – 25 août 2008
Sunset est une installation monumentale d'Andro Wekua conçue spécifiquement pour la Rue du Magasin, qui consiste en un assemblage de 170 carreaux de céramique. Son motif est réalisé à partir d'un dessin de l'artiste, grossi 600 fois et sérigraphié sur la surface des carreaux. L'image du coucher de soleil comme tonalité parfaite s'y érige en une façade, portée et soutenue par une structure en métal. I Love the Horizon est une exposition collective, proposition d'Andro Wekua avec le concours de Daniel Baumann. Avec des œuvres de Rita Ackermann, Ketuta Alexi-Meskhishvili, Luis Buñuel, Xavier de Maria y Campos, Trisha Donnelly, Jannis Jaschke, Mikheil Kalatozishvili, Martin Kippenberger, Emil Michael Klein, Oliver Laric, Nick Mauss, Sergej Paradjanov, Ewa Partum, Steven Parrino, Seth Price, Richard Prince, Yves Saint-Laurent, Piotr Uklanski et des textes de Anna Moschovakis, Anne Sexton, Marina Tsvetaeva, Derek Walcott et Adam Zagajewski. Sunset / I Love the Horizon est un projet imprimé, livre d'artiste constitué par Andro Wekua à partir d'une masse d'images et de documents mis bout à bout tout au long de ses pages.
Site internet : www.magasin-cnac.org
courriel : info@magasin-cnac.org
Téléphone renseignement : 04 76 21 65 25
Téléphone réservation : 04 76 21 65 25
LE MAGASIN, CENTRE NATIONAL D'ART CONTEMPORAIN
155 cours Berriat Site Bouchayer-Viallet
GRENOBLE 38000
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Sylvia Plath
La cueillette des mûres
Personne sur le chemin, et rien, rien sinon des mûres,
Des mûres de chaque côté, des mûres partout,
Une allée de mûres, qui descend en crochets, et une mer
Quelque part au bout, qui se soulève. Des mûres
Aussi grosses que mon pouce, aussi muettes que des yeux
Ebène dans les haies, et pleines
De jus bleu-rouge, qu’elles abandonnent sur mes doigts.
Je n’avais pas demandé de telles sœurs de sang ; elles doivent m’aimer.
Elles sont accommodantes, elles se font toutes petites pour tenir dans ma bouteille à lait…
Sylvia Plath - Blackberrying - (p.63) in La traversée "crossing the water" - Poésie/Gallimard.
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12/06/2008
Epiphania
Géorges Séféris
Poème de Georges Seferis écrit en 1937 et publié dans le recueil collectif de son oeuvre sous le titre EPIPHANIE 1937, dans Cahier d'études.
La mer en fleurs et les montagnes au décroît de la lune ;
La grande pierre près des figuiers de Barbarie et des asphodèles;
La cruche qui ne voulait pas tarir a la fin du jour ;
Et le lit clos près des cyprès et tes cheveux
D'or : les étoiles du Cygne et cette étoile, Aldebaran.
J'ai maintenu ma vie, j'ai maintenu ma vie en voyageant
Parmi les arbres jaunes, selon les pentes de la pluie
Sur des versants silencieux, surchargés de feuilles de hêtre.
Pas un seul feu sur les sommets. Le soir tombe.
J'ai maintenu ma vie. Dans ta main gauche, une ligne ;
Une rayure sur ton genou; peut-être subsistent-elles encore
Sur le sable de l'été passé, peut-être subsistent-elles encore
Là où souffle le vent du Nord tandis qu'autour du lac gelé
J'écoute la voix étrangère.
Les visages que j'aperçois ne me questionnent pas ni la femme
Qui marche, penchée, allaitant son enfant.
Je gravis les montagnes. Vallées enténébrées. La plaine
Enneigée, jusqu'à l'horizon la plaine enneigée. Ils ne questionnent pas
Le temps prisonnier dans les chapelles silencieuses
Ni les mains qui se tendent pour réclamer, ni les chemins.
J'ai maintenu ma vie, en chuchotant dans l'infini silence.
Je ne sais plus parler ni penser. Murmures
Comme le souffle du cyprès, cette nuit-là
Comme la voix humaine de la mer, la nuit, sur les galets,
Comme le souvenir de ta voix disant : « Bonheur ».
Je ferme les yeux, cherchant le lieu secret où les eaux
Se croisent sous la glace, le sourire de la mer et les puits condamnés
A tâtons dans mes propres veines, ces veines qui m'échappent
Là où s'achèvent les nénuphars et cet homme
Qui marche en aveugle sur la neige du silence.
J'ai maintenu ma vie, avec lui, cherchant l'eau qui te frôle,
Lourdes gouttes sur les feuilles vertes, sur ton visage
Dans le jardin désert, gouttes dans le bassin
Stagnant, frappant un cygne mort à l'aile immaculée
Arbres vivants et ton regard arrêté.
Cette route ne finit pas, elle n'a pas de relais, alors que tu cherches
Le souvenir de tes années d'enfance, de ceux qui sont partis,
De ceux qui ont sombré dans le sommeil, dans les tombeaux marins,
Alors que tu veux voir les corps de ceux que tu aimas
S'incliner sous les branches sèches des platanes, là même
Où s'arrêta un rayon de soleil, à vif,
Où un chien sursauta et où ton coeur frémit,
Cette route n'a pas de relais. J'ai maintenu ma vie. La neige
Et l'eau gelée dans les empreintes des chevaux.
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08/06/2008
"Néant d'or" Anna-Eva Bergman
11:13 Publié dans CLINS D'OEILS (arts plastiques) | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer | | Facebook
06/06/2008
Marthe Souris
Marthe Souris travaille à plat, à même le sol, avec des pigments colorés sur une toile apprêtée spécialement pour permettre de conserver visible la texture du tissu, jouer des glacis et des épaisseurs de peinture et laisser apparaître des griffures faites avec le manche du pinceau. C’est ainsi qu’elle donne à sa peinture une transparence dans les couleurs et le velouté de leur matière. Ce n’est qu’une fois la toile achevée qu’elle sera tendue sur châssis. Elle réalise aussi de nombreux petits formats au pastel qui lui permettent, malgré un médium différent, de conserver une matière similaire. Les traits du pastel jouant le rôle des coups de pinceau, les couleurs se créent par la superposition d’écritures.
(D’après P.-A. S.)
Du 16 au 21 juin 2008
Vernissage lundi 16 juin à 18h30
LA GALERIE DU TABLEAU
37, rue Sylvabelle - 13006 Marseille - tél : 04 91 57 05 34
Contact et site
21:07 Publié dans CLINS D'OEILS (arts plastiques) | Lien permanent | Commentaires (1) | Imprimer | | Facebook
05/06/2008
"Légère cendre au pied du jour"
Et moi maintenant tout entier dans la cascade céleste,
enveloppé dans la chevelure de l’air,
ici, l’égal des feuilles les plus lumineuses,
suspendu à peine moins haut que la buse,
regardant,
écoutant
n et les papillons sont autant de flammes perdues,
les montagnes autant de fumées --,
un instant, d’embrasser le cercle entier du ciel
autour de moi, j’y crois la mort comprise.
Je ne vois presque plus rien que la lumière,
les cris d’oiseaux lointains en sont les nœuds,
la montagne ?
Légère cendre
au pied du jour.
Philippe Jaccottet
A la lumière d’hiver « Leçons » (p.32)
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03/06/2008
Anna-Eva Bergman
22:38 Publié dans CLINS D'OEILS (arts plastiques) | Lien permanent | Commentaires (2) | Imprimer | | Facebook
Bona Mangangu
« Caresse dansée »
Encre de chine, villa Antomine 06
Collection de l’artiste
Portrait
Bona Mangangu
peintre & auteur
Il est né le 16 février 1961 à Kinshasa en République démocratique du Congo. Son oeuvre picturale forte, lumineuse, proche des maîtres orientaux, lui a valu de nombreuses distinctions en France et à l'étranger.
Son esthétique du peu et du silence, tirée de ses lectures, de la musique et de ses nombreux voyages, transparaît dans une oeuvre volontairement dépouillée.
Une subtile lumière émane de ses peintures à l'huile, de ses encres, ses broux de noix, et ses dessins ; une rencontre inattendue de l'Orient et de l'Afrique mythique.
Promeneur infatigable (Afrique, Amériques, Europe, Asie) et amoureux des grands espaces inhabités (déserts, océans, mers...), il embrasse le monde afin de mesurer la distance entre l’homme et l’homme, par les couleurs, les mots traduits du silence. Ainsi, patiemment, il explore le sacré dans ce qu'il a de plus insaisissable. Aujourd’hui, il partage sa vie entre Sheffield, au Royaume-uni, où il enseigne les arts plastiques, et le Haut-Languedoc, en France. Auteur, il a publié de nombreux ouvrages notamment :
"Ce que disent mes mains sur la toile" Paris2002 l'Harmattan.
"Et si la beauté de ce festin..."Paris 2004, l'Harmattan.
« Carnets de Flâneur » Paris 2005, Souffle éditions, épuisé.
"Kinshasa, carnets nomades" Paris 2006, l'Harmattan.
« Carnets d’Ailleurs, Paris 2008, l’Harmattan.
En préparation : « La passerelle du silence » et « Les Larmes du Caravage »
" ...Je mûris à la rencontre d’autrui. Toutes ces rencontres, tous ces feux, Kinshasa-la-belle, émanent de ton feu primordial, tout puissant. Je tourne le dos aux vaines vanités de la comédie humaine, à certaines formes de volupté. L'ardeur des passions qui me tisonnait s'est peu à peu éteinte. Quelle énergie fait encore tressaillir mes membres dans les floraisons mortes de l'hiver, dans la lumière rousse d'automne, les ors francs dans le ciel pur de l'été ? Le panorama n'est pas aux nostalgies, aux souvenirs de l'âtre chaud des connivences. Je touche à des régions où ce que l'on éprouve n'a aucun rapport avec ce qui est éprouvé. Tous les matins, j'avance pieds nus devant le velours de la mer. Sa respiration et ses hoquets bleus sur les revers de dunes me donnent des sensations d'éternité. Le ciel de mon pays d’accueil, à cette époque de l'année, est bas. De temps à autre, j'entends des rumeurs, un bruissement sourd ; c'est le tremblement de l'infini sur les miroirs de la mer et sur la ligne de l'horizon. Le ciel redevient le pays d'à côté..."
Extrait de l'avant-propos"Carnets d'Ailleurs"
« Tais-toi, petit; abrites-toi derrière les mots des autres. Si tu parles, fais-le uniquement avec ton coeur. Très peu de paroles cependant, très peu, tu entends ? Beaucoup de musique... »
Extrait de La Passerelle du Silence
Contact ET SI LA BEAUTÉ …
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02/06/2008
Esprit et langage avec Wittgenstein, rosset et Bouveresse
Lorsque Wittgenstein aborde le mystère du langage comme étant proche du mystère du monde, de la même manière Jacques Bouveresse[1]associe « esprit et langage », car pour mieux comprendre ce qu’est l’esprit, dira t-il, il nous faut au préalable comprendre ce qu’est le langage.
(…) "Mon livre traite des problèmes philosophiques et montre, je pense, que la position de ces problèmes repose sur une méconnaissance de la logique de notre langage. On pourrait résumer tout le sens de ce livre en ces termes : ce qui peut se dire, peut se dire clairement ; et au sujet de ce dont on ne peut pas parler, on doit se taire... Je pense que la vérité des idées ici exposées est inattaquable et définitive. Je pense donc avoir, pour l'essentiel, résolu les problèmes". (L. Wittgenstein)
Au sujet de l’esprit, celui-ci est défini comme « principe de la vie psychique ». Dans « Principes de sagesse et de folie », Clément Rosset[2] parle d’un grand « dérèglement de notre esprit » pour son glissement ordinaire et quelque peu systématique dans le monde irréel, et pour sa désolidarisation avec la réalité. Rosset cite Montaigne en ce que le principe même de ce dérèglement se situe « dans le fonctionnement de l’esprit lui-même ». Ainsi, et à la différence de Platon qui accuse le corps d’égarer notre esprit, dans sa proximité avec Montaigne, Rosset épouse la thèse que l’homme « délire » en tant qu’il dispose d’un esprit, et surtout en tant qu’il se laisse abuser par lui.
" Sur l'existence (ou sur l'être, ou sur la réalité) les paroles les plus profondes et les plus définitives sont le fait d'un penseur, Parménide, qui passe paradoxalement -- et injustement peut-être, j'y reviendrai - pour avoir été le principal inspirateur de l'interminable lignée des philosophes qui, de Platon à Kant et de Kant à Heidegger, nous ont enseigné à suspecter la réalité sensible au profit d'entités plus subtiles :
Il faut dire et penser que ce qui est est, car ce qui existe existe, et ce qui n'existe pas n'existe pas : je t'invite à méditer cela.
Tu ne forceras jamais ce qui n'existe pas à exister.
Clément Rosset, Principes de sagesse et de folie, Editions de Minuit, 1991/2004
Dans sa proximité à Karl Kraus, et de par son grand souci de réalisme, Jacques Bouveresse accorde une grande attention sur ce qui concerne l’individu et son rapport au réel. Il ne se montre ainsi guère favorable à la « religion de l’information », information qu’il dira « industrielle », telle celle véhiculée quotidiennement par les médias. Il remet notamment en cause cette odieuse supercherie à continuellement nous envahir d’informations inutiles et sans intérêt, car ce que les médias nous montrent et nous disent, cela ne signifie pas pour autant une connaissance de la réalité. La représentation du réel par les médias nous fait tort, et à l'esprit lui fait perdre de vue le champ de la réalité véritable, et le maintient dans ce que Bouveresse appelle en d’autres termes un « processus de déréalisation ».
"Lorsque j'étais enfant, j'étais terriblement idéaliste, beaucoup plus que vous ne pouvez l'imaginer : je trouvais la réalité ordinaire sans intérêt, vulgaire et plutôt méprisable. J'ai véritablement eu à me réconcilier plus tard avec la réalité, en partie, mais sûrement pas uniquement, par la philosophie (cela ne passe jamais de cette façon). Cela m'a pris beaucoup de temps, mais je me suis remis, de plus en plus, à valoriser d'abord la réalité, la réalité concrète et à me méfier systématiquement de l'idéalisme. Je serais même tenté de dire que l'essentiel du combat que j'essaie de mener aujourd'hui est un combat contre l'idéalisme".
Jacques Bouveresse, Le philosophe et le réel, Ed. Hachette, 1998
Comment ne pas succomber au piège de la falsification du réel, si ce n’est enfin de se rendre compte que ce n’est pas le monde en tant que tel qui nous trompe ou nous leurre, mais que c’est la propagande et la propagation du mensonge qui nous trouble. Marc Aurèle écrivait : « (…) reviens à toi et, une fois sorti de ton sommeil, rends-toi compte que c’étaient des songes qui te troublaient ; une fois réveillé, regarde les choses comme auparavant tu les regardais ».
Nathalie Riera, 2007
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30/05/2008
Pascal Boulanger (Quatrième de couverture & Extrait)
chroniques de poésie
Pascal Boulanger
La poésie a connu au XXe siècle une mini catastrophe, mini mais aux effets dévastateurs : la puissance de sa langue et de sa pensée a émigré vers la grande prose romanesque, celle de Proust, de Joyce, de Céline… Est-ce à dire que les poètes ont tous déserté ? Mais Artaud, Pound, Ponge, quels noms leur donner ?Et s’il ne nous est plus loisible de nous déplacer dans de vastes continents poétiques, est-ce à dire que de la déflagration qui les a ravagés, et dont s’est constituée la modernité littéraire, n’ont pas subsisté, et ne subsistent pas toujours, de très étincelantes parcelles, d’autant plus lumineuses, d’autant plus douées d’une force radioactive, qu’elles sont isolées, errantes, inaptes désormais à s‘agréger entre elles, à composer une totalité. C’est à ces astéroïdes nomades, les uns doués de la vitesse des « fusées » (bonjour Baudelaire), les autres mimant les lents, discrets flottements de modestes « paperoles » (bonjour Proust), que Pascal Boulanger a consacré de déjà longues années de sa recherche. Il livre ici ses analyses et ses conclusions. Il fallait, pour mener au mieux une telle tâche, un écrivain ayant lui-même la pratique de la poésie (au sens que je tente de donner à ce mot), un homme libre d’attaches idéologiques et institutionnelles, ouvert à des expériences d’écriture parfois à l’opposé des siennes, peu respectueux des frontières entre les genres littéraires, en prise avec le réel de son époque, doué d’une mémoire historique, résistant aux oukases, aux dogmes, aux divers terrorismes et aux lancinants chants des sirènes nihilistes de son temps. Pascal Boulanger est cet écrivain et cet homme-là. Jacques Henric L’ACT MEM FUSÉES & PAPEROLES PASCAL BOULANGER
L’ACT MEM 17 € Lire aujourd’hui
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A PROPOS DE L'AUTEUR ... En forme d'avant-propos :f&p_a_propos.pdf
EXTRAIT
« La parole poétique dit et ne dit pas, saisit et se détache, fait lien et cassure, compose et décompose la vie dans la mort et la mort dans la vie et, avant tout, elle intègre un espace-temps dans lequel une voix nomme. Elle nomme en suspendant les figures idolâtriques et en se risquant dans l’acquiescentia in se ipso (Spinoza), qui évoque la présence à soi, la joie et le pouvoir d’agir.
Les possibles sont-ils perdus ? Jamais, et il n’y a pas d’autre actualité , pour un poète, que celle consistant à refuser le moteur du ressentiment vis-à-vis du temps et de son « il était ». Rimbaud est ailleurs que dans l’ailleurs où la communauté le cherche. Il n’est pas plus dans la poésie comme posture et imposture littéraires que sur les chemins besogneux de la soif de vivre. Il témoigne, par-delà son soit-disant silence, de l’union dans la désunion et sa prétendue absence est un mythe. Ses notes nerveuses relatives à son périple final en civière et toute sa correspondance sont aussi poésie, elles ne seraient éloignées que d’une pratique de la poésie dont justement Rimbaud s’est ostensiblement éloigné (Daniel Oster, L’individu littéraire, P.U.F. coll. « Ecriture »). La poésie, comme dépassement de la métaphysique, est une manière de dire et une manière d’être, elle supporte et dépasse l’inacceptable de la vie sociale en relançant l’existence simple et forte – son noyau d’enfance – que la servilité fonctionnelle n’a pas encore détruite ».
(pp.75/76)
Lire la note de "Corridor Bleu"
http://re-pon-nou.blogspot.com/2008/04/lire.html
23:33 Publié dans Pascal Boulanger | Lien permanent | Commentaires (1) | Imprimer | | Facebook
Avec ce que la vie a d'immédiat
« (…) la poésie, c’est rechercher le contact avec ce que la vie a d’immédiat, dans des rapports avec d’autres êtres qui en deviennent de l’absolu, et cette expérience ne peut se faire qu’en délivrant la parole des systèmes conceptuels (…). La poésie n’est pas l’ennemie de la pensée, bien au contraire, elle attend de l’admirable raison dont l’esprit dispose qu’elle organise ce monde qui pourrait être si beau si tant soit peu en étaient accueillies par nous les suggestions de vraie plénitude. Elle n’est pas même l’ennemie des rêveries les plus utopiques, car elle sait la valeur des rêves, quand ils ne cachent pas leur nature. Mais elle dispose d’un point de vue qui lui permet de critiquer la pensée d’une façon radicale, pour en incriminer l’esprit de système. Ma réaction, dans la situation de l’après-guerre, ce fut d’estimer que la poésie était le devoir majeur, auquel je me devais de donner priorité. Un souvenir, celui-ci encore, duquel je ne veux absolument pas m’éloigner ».
Extrait d’Un entretien avec Yves Bonnefoy par Robert Kopp – Magazine littéraire, juin 2003 (n°421)
La lumière profonde a besoin pour paraître
D’une terre rouée et craquante de nuit.
C’est d’un bois ténébreux que la flamme s’exalte.
Il faut à la parole même une matière,
Un inerte rivage au-delà de tout chant.
Il te faudra franchir la mort pour que tu vives,
La plus pure présence est un sang répandu.
(Extrait Du mouvement et de l’immobilité de Douve, p.74)
23:28 Publié dans Yves Bonnefoy | Lien permanent | Commentaires (1) | Imprimer | | Facebook
Pasolini e Ezra Pound
J'attends que parlent les plantes -- prises
par le profond sourire qui s'exhale
de la terre au soleil absorbés l'un par l'autre --
moi, qui ne sais pas parler, étouffé
à peine éveillé, par tant de clarté
et les sens mis à vif par l'or qui est vie
humaine chez les arbres. Or, fraîcheur,
qui gonflent ma chair de joie.
Et tout cela, de la sensuelle
douceur, n'est qu'une ombre.
Pier paolo Pasolini
EXTRAIT "Poèmes posthumes" VII - (1950/1951)
***
PETITS POEMES NOCTURNES
III
Quand il est plus dur de vivre
la vie est-elle plus absolue ?
Sur les rives vespérales
de mes sens muets est muette
la vieille raison
en quoi je me reconnais :
c'est un parcours intérieur
un sous-bois étouffé
où tout est nature.
Pénible travail
de subsistance obscure
toi seul es nécessaire...
Et tu m'emportes doucement
au-delà des frontières humaines.
15:12 Publié dans Pier Paolo Pasolini | Lien permanent | Commentaires (1) | Imprimer | | Facebook
29/05/2008
Hamsarayan (The chorus) - Abbas Kiarostami
« Kiarostami ou l’art de l’enfance
Il y a seulement quelques années, Abbas Kiarostami était, en Occident, un parfait inconnu. C’est en France, plus précisément à Nantes en 1988, que Où est la maison de mon amie ? fut projeté pour la première fois, hors d’Iran, au festival des Trois Continents. Aujourd’hui, il est devenu par l’intermédiaire de nombreux passeurs, une référence universelle pour quiconque pense que le cinéma joue encore un rôle de conscience du monde. »
Thierry Jousse
Extrait des Cahiers du Cinéma n°493 (juillet/août 1995)
Les autres films de Kiarostami : Au travers des oliviers, Close up...
20:52 Publié dans VIDEOS, ANIMATIONS, DOCUMENTAIRES | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer | | Facebook