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27/09/2009

Ted Hugues

 

EXTRAITS

 

 

POÈMES

1957-1994

 

Ted Hugues

 

 TedHughes_468x319- by the Dean River, Canada.jpg

The Dean River, Canada

 

[…]

                                                                                                                             Les sels marins,

Mes terres indigènes, m’ont préparé cortex et intestin

A accueillir de telles reliques.

Tel l’incinérateur, tel le soleil,

Telle l’araignée, j’ai eu un univers entier dans les mains.

Telle la fleur, je n’ai rien aimé.

[…]

 (p.53 – extrait de  1er mai dans le Holderness)

 

Ces étoiles sont les ancêtres incarnés

De mes collines noires, courbées comme dos d’ouvrier agricole,

 

Et de mon sang.

[…]

(p.68 – extrait de Avaleur de feu)

 

[…]

J’émerge. D’ailleurs, l’air a tout oublié.

Les fuseaux, les ailes en sucre glace de l’herbe

Semblent gravés sur de hauts gobelets. Un pigeon tombe en espace.

La terre monte calmement, dans l’obscurité, de lointaines profondeurs,

Affleurant à peine à la surface. Je ne suis pas connu,

Mais aucune surprise nulle part. L’asphalte de la route

Est velouté de sommeil, les collines dans le lointain sont froides.

Devant cette nouvelle terre si mal désenveloppée

De sa gaze et sa cellophane,

Ces magasins du gel aux lames toujours aiguës,

C’est mon privilège de tâter et de renifler.

Les moutons ne comptent pas plus que les primevères.

La rivière au loin s’étonne d’elle-même,

Essaie le volant de ses lumières

Et de ses poissons inhabituels, qui montent à la surface

Puis repartent au fond, par pure curiosité

Du soleil faisant fondre l’arête vertébrale de la colline et de la lumière

Baignant diffusément leurs ouïes…

[…]

(p.94 – extrait de Pêche à la truite clandestine, un matin de mai)

 

[…]

Si la bouche pouvait ouvrir sa falaise

Si l’oreille pouvait se déplier de ses strates

Si les yeux pouvaient fendre leur rocher et regarder enfin au-dehors

 

Si les mains plissements de montagne

Pouvaient se procurer un appui sûr

Si les pieds fossiles pouvaient se soulever

 

Si la tête eau de lac et climat

Si le corps horizon

Si le corps entier et la tête en balance

 

Si la peau d’herbe pouvait prendre les messages

Et faire son métier proprement

 

Si les vertèbres de fœtus terre

Pouvaient se dérouler

 

Si l’ombre homme là-bas en avant se mouvait suivant mes mouvements

 

Le discours qui agit l’air

Pourrait me parler

(p.334 – extrait de Sept chansons du cachot)

 

Le poète britannique Ted Hugues est né à Mytholmroyd, dans le Yorkshire, en 1930. Devenu célèbre dès ses premières publications, il est l’auteur de recueils de poèmes, de pièces de théâtre, d’essais et d’histoires pour enfants. Il traduit aussi Ovide, les tragiques grecs et Racine. En 1956, il épouse Sylvia Plath, l’un des plus importants poètes anglo-saxons contemporains. Lorsque celle-ci se suicide en 1963, Ted Hugues édite lui-même ses œuvres. Nommé poète lauréat en 1984, il meurt en 1998 dans le Devon.

 

Editions Gallimard

 
Traduit de l’anglais par Valérie Rouzeau et Jacques Darras
Préface de Jacques Darras
Editions Gallimard, 2009 (pour la traduction française)

 
 

16/08/2009

Ted Hugues

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Photo : Nils Jorgensen

Kafka

 

Un hibou,

C’est un hibou, le mot « Homme » tatoué à l’aisselle

Sous l’aile brisée

(Assommé par ce mur de lumière aveuglante, tombé ici)

Sous l’aile d’ombre immense qui se tord, brisée, à terre.

C’est un homme : nul espoir dans ces plumes.

 

Ted Hugues, Poèmes, 1957-1994, Gallimard Du monde entier – p.124

Traduit de l’anglais par Valérie Rouzeau et Jacques Darras

Portrait Ted Hugues par Reginald Gray