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24/07/2008

Le phénomène érotique - Jean-Pierre Marion

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Gustave Courbet

"Les Amants dans la campagne", 1844

Le silence de l’amour

La philosophie ne dit aujourd’hui plus rien de l’amour, ou si peu. Mieux vaut d’ailleurs ce silence, tant, quand elle se risque à en parler, elle le maltraite ou le trahit. On douterait presque que les philosophes l’éprouvent, si l’on ne devinait plutôt qu’ils craignent d’en rien dire. Avec raison, car ils savent, mieux que quiconque, que nous n’avons plus les mots pour le dire, ni les concepts pour le penser, ni les forces pour le célébrer.
Les philosophes l’ont de fait laissé à l’abandon, destitué du concept et finalement rejeté dans ses marges obscures et inquiètes de leur raison suffisante — avec le refoulé, le non‑dit et l’inavouable. Sans doute d’autres discours prétendent relever cette déshérence et, à leur manière, y parviennent parfois. La poésie peut me dire ce que j’expérimente sans savoir l’articuler et me libère ainsi de mon aphasie érotique — elle ne me fera pourtant jamais comprendre l’amour en son concept. Le roman parvient à rompre l’autisme de mes crises amoureuses, parce qu’il les réinscrit dans une narrativité sociable, plurielle, publique — mais il ne m’explique pas ce qui m’arrive, réellement, à moi. La théologie, elle, sait ce dont il s’agit; mais elle le sait trop bien pour toujours éviter de m’imposer une interprétation si directe par la Passion, qu’elle annule mes passions — sans prendre le temps de rendre justice à leur phénoménalité, ni donner un sens à leur immanence. La psychanalyse peut résister à ces hâtes et sait demeurer parmi mes vécus de conscience et surtout d’inconscience — mais précisément pour mieux constater que je souffre d’un défaut des mots pour les dire, voire qu’elle‑même manque des concepts pour les penser. De ces efforts défaits, il résulte que le tout‑venant, autrement dit tous ceux qui aiment sans bien savoir ce que l’amour veut dire, ni ce qu’il leur veut, ni surtout comment lui survivre — vous et moi le premier — se croit condamné aux pires trompe‑la-faim : le sentimentalisme en fait désespéré de la prose populaire, la pornographie frustrée de l’industrie des idoles ou l’idéologie informe de l’épanouissement individuel, cette asphyxie vantarde. Ainsi la philosophie se tait et, dans ce silence, l’amour s’efface.
Une telle désertion de la question de l’amour par le concept devrait scandaliser, d’autant plus que la philosophie tient son origine de l’amour même et de lui seul, «ce grand dieu». Rien que son nom l’atteste — «amour de la sagesse» (ce qui reste une traduction juste de filosofi¢a, mal gré qu’on en ait parfois). Comment doit‑on l’entendre? L’acception la plus reçue — il faut rechercher la sagesse qu’on ne possède pas encore, précisément parce qu’elle échappe — n’aboutit qu’à une banalité, un truisme. Mais elle en masque de fait une autre, plus radicale : la philosophie se définit comme l’«amour de la sagesse», parce qu’elle doit en effet commencer par aimer avant de prétendre savoir. Pour parvenir à comprendre, il faut d’abord le désirer; autrement dit, s’étonner de ne pas comprendre (et cet étonnement aussi offre un commencement à la sagesse); ou encore souffrir de ne pas comprendre, voire craindre de ne pas comprendre (et cette crainte encore ouvre à la sagesse). La philosophie ne comprend qu’à la mesure où elle aime — j’aime comprendre, donc j’aime pour comprendre. Et non pas, comme on préférerait le croire, je finis par comprendre assez pour me dispenser à jamais d’aimer. Il ne va pas du tout de soi, aussi paradoxal que cela nous paraisse aujourd’hui, que la philosophie ait d’abord et surtout affaire avec la science, comme si le projet de savoir s’imposait de lui‑même, sans autre médiation ni présupposé. Il se pourrait, au contraire, que pour atteindre la vérité, il faille, dans tous les cas, d’abord la désirer, donc l’aimer. Et l’expérience contemporaine de l’idéologie, ce savoir qui sacrifie tout au pouvoir, nous a démontré dans les faits que l’homme n’aime pas spontanément la vérité et qu’il la sacrifie souvent au mensonge, pourvu que ce mensonge lui assure la puissance. A mesure que la philosophie cesse de se comprendre d’abord comme un amour et à partir de lui, à mesure qu’elle revendique immédiatement un savoir et qu’elle le thésaurise, non seulement elle contredit sa détermination originelle, mais elle fuit la vérité, qu’elle échange contre la science des objets — ce plat de lentilles. On sait que peu à peu, dans une évolution obstinée, puis accélérée et irrépressible, la philosophie a fini par renoncer à son premier nom, «amour de la sagesse», pour celui de métaphysique, aussi tard venu (au milieu du Moyen Age) que d’emblée problématique (à l’âge classique). Cette mutation radicale a non seulement consacré définitivement le primat de l’étant comme l’objet universel du savoir, donc ouvert la carrière au projet de la science et, indissolublement, à l’emprise de la technique sur le monde, mais elle a surtout censuré l’origine érotique de la «philo-sophie». Il se pourrait ainsi que l’oubli de l’être masque un oubli plus radical et en résulte — l’oubli de l’érotique de la sagesse. A l’achèvement de cette histoire, aujourd’hui donc, après avoir ravalé l’étant au rang sans honneur d’objet et oublié l’être en pleine retraite, la philosophie, désormais presque silencieuse, a même perdu ce à quoi elle a sacrifié l’érotique : son rang de science, éventuellement sa dignité de savoir. Quant à l’amour, dont l’oubli a sans doute tout décidé, elle en a oublié jusqu’au reniement; elle en a perdu même le désir; et — parfois on le croirait presque — elle le hait. La philosophie n’aime pas l’amour, qui lui rappelle son origine et sa dignité, son impuissance et leur divorce. Elle le passe donc sous silence, quand elle ne le hait pas franchement.
Nous poserons une hypothèse : cette haine reste encore une haine amoureuse. Dans ce désastre amoureux de la philosophie, nous voulons croire — et montrer — que l’on peut reconstruire une interrogation sur l’amour. L’histoire du divorce de la philosophie avec l’amour en elle ne mériterait‑elle pas au moins autant d’attention et d’efforts que l’histoire de l’être et de son retrait? Elle reste évidemment presque tout à écrire — ce que nous ne saurions même esquisser ici. Dans l’urgence, on s’en tiendra donc au premier inventaire des lieux : non seulement nous n’avons plus de concept de l’amour, mais nous n’avons même plus de mot pour le dire. «Amour»? Cela sonne comme le mot le plus prostitué — à strictement parler le mot de la prostitution; d’ailleurs, nous en reprenons spontanément le lexique : on le «fait» comme on fait la guerre ou des affaires, et il ne s’agit plus que de déterminer avec quels «partenaires», à quel prix, pour quel profit, à quel rythme et combien de temps on le «fait». Quant à le dire, le penser ou le célébrer — silence dans les rangs. Un silence saturé d’une douleur, qui perce sous le bavardage politique, économique et médical qui l’étouffe en voulant nous rassurer. Dans ce grand cimetière érotique, l’air manque, dont les vibrations laisseraient résonner une seule parole. Déclarer «je t’aime» sonne, dans le meilleur des cas, comme une obscénité ou une dérision, au point que, dans la bonne société, celle des instruits, plus personne n’ose sérieusement proférer un tel non‑sens. Et qu’on n’espère aucun substitut à cette banqueroute, pas le moindre assignat. Ainsi le mot de «charité» lui‑même se retrouve, s’il est possible, encore plus à l’abandon : on «fait» d’ailleurs aussi la charité — ou plutôt, pour lui éviter de faire l’aumône et de se réduire à la mendicité, on lui arrache même son nom magnifique et la recouvre de haillons supposés plus acceptables, «fraternité», «solidarité», «action humanitaire»; à moins qu’on ne s’amuse à la regarder jouer les élans surannés de la «grâce», pour jouir avec nostalgie de l’«âme» qu’on n’a plus. De l’amour (ou de la charité), nous n’avons rien à dire — et nous n’attendrons pas le moindre secours de la philosophie telle qu’elle va.

(…)

Extrait pp. 9-13 (livre de poche)


"Le phénomène érotique" Six méditations - Jean-Luc Marion

2003, Editions Grasset - Collection dirigée par Jean-Paul Enthoven

14/07/2008

Agnès Gueuret

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"Ne me faut-il pas aller jusqu'à comprendre que le seul point de la terre et des cieux où je puisse appréhender le divin est en moi à l'intime, là où justement s'éprouve la durée ? L'impossible connaissance que j'ai de Dieu, que j'ai de moi, se résoudrait alors dans l'acte en lequel je me remets à l'inconnu qui me traverse et se signale en mon désir, telle une force qui me saisit, semblable à celle du bourgeon en train d'éclore et allant me pacifiant lorsque j'y consens".

(p.64)

Agnès Gueuret 

Agnès Gueuret, née en 1936, est diplômée de l'Ecole Pratique des Hautes Etudes. Elle y a mené une étude sémiotique des deux premiers chapitres de Luc, suivie par une thèse sur l'énonciation dans l'Evangile selon Luc. Outre son intérêt permanent pour les textes bibliques, elle continue à mener l'expérience communautaire qu'elle a commencée en 1957.

Sur les sentiers de Qohéleth

Article de Jean Alexandre dans le revue LIBRESENS n°172.

Article d'Huguette Charrier dans la revue trimestrielle PARVIS n° 36 de décembre 2007.

L'émission "Un livre, un lecteur" réalisée par Guylène Dubois sur FREQUENCE PROTESTANTE a reçu Agnès Gueuret, le 22 décembre 2007 à 14h (durée 30 min.).

Article d'Antoine Lion sur le site du couvent Saint-Jacques :

http://www.dominicains.fr/fre/menu/nav_magazine/communaut...

Article de Pascal Boulanger la revue EUROPE de mars 2008.

09/07/2008

La Non-Maison, rue Pavillon - Michèle Cohen

MICHÈLE COHEN est un médium de l’art

 

Ses yeux savent des choses qu’elle ne sait pas, qu’elle ne peut pas savoir

 

Son étrangeté, qui la rend unique, c’est qu’elle se laisse faire par ses yeux, elle n’intervient pas sur les saisissements que provoquent en elle certaines œuvres

 

Elle est voyante, elle vit sous l’emprise de ses yeux, ne pouvant expliquer pourquoi ils ont vu cette œuvre plutôt que cette autre

 

Ce n’est que longtemps après que les visions forment un récit

 

Ses yeux sont très en avance sur elle, ils voient bien avant elle, sans qu’elle puisse savoir pourquoi elle a vu

 

L’histoire de la Galerie qu’elle crée, ce sera l’histoire de son regard

 

C’est un lieu organique, consacré aux images, frottement entre musée et maison

 

Michèle Cohen est une écorchée vive : les images lui arrivent directement dans les nerfs, sans filtre : elle est atteinte

Extrait de "Intime - Intimité" de François Cervantès

 

 

Contact et site web

22, rue Pavillon

13100 Aix-en-Provence 

06 24 03 39 31

m.cohen@lanonmaison.com

http://lanonmaison.com/

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Exposition en cours

Feux, corbeaux

Vladimir Velickovic

du 14 juin au 14 août 2008
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Intime - Intimité

 

 

de François Cervantès

 

 

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05/07/2008

Jean Fautrier - Galerie Remarque

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VERNISSAGE le vendredi 4 juillet

 A chacun sa réalité (lecture par Jean-Pierre Sintive)

EXPOSITION du 4 juillet au 28 août 2008

 Galerie Remarque

http://www.artpointfrance.org/

2, Place de l'Hôtel de Ville - 83720 Trans-en-Provence

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estampes 1925 - 1964

03/07/2008

La forêt sans feuilles

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Abbas Kiarostami, La Forêt sans feuilles Installation, 2005 Courtesy of the Victoria and Albert Museum and Colin Morris Associated, London
 

K8 : La forêt sans feuilles (2005) - Le visiteur pénètre dans un espace planté d’arbres. L’installation est spectaculaire et ludique. Ce sont des photographies d’écorce de troncs d’arbre qui entourent des cylindres d’aluminium.

Exposition Erice/Kiarostami

 

Centre Pompidou

présentation par Alain Bergala

http://www.cineclubdecaen.com/peinture/expositions/

02/07/2008

Le songe de la lumière

A l'automne 1990, le peintre Antonio Lopez Garcia vit dans une maison madrilène. Dans son jardin se trouve un cognassier qu'il a lui-même planté. L'artiste décide de peindre cet arbre. C'est la première fois qu'Antonio Lopez Garcia se décide à peindre un arbre où les rayons du soleil vont jouer avec la couleur des feuilles.

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LE SONGE DE LA LUMIÈRE
El sol del membrillo

(littéralement : « Le soleil du coing »)
de Víctor Erice
Espagne/1992 / 135' / coul. / vostf
avec Antonio López / María Moreno / Enrique Gran / José Carretero

Prix du jury à Cannes et Prix de la critique internationale en 1992.

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A L'ETAGE DE LA BIBLIOTHEQUE DU PHARE

http://www.mayak.be/Salle_de_Lecture_Larbre.htm

 

"Le génie des peuples de l'Omo" - Hans Silvester

Exposition
EXPRESSIONS D'AFRIQUE - PEINTRES DU CORPS EN ETHIOPIE 
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Photos Hans Silvester

Aux confins de l’Ethiopie, à trois jours de piste d’Addid-Abeba, à plus de mille kilomètres de Khartoum et à des siècles de la modernité, Hans Silvester a photographié pendant six ans des tribus où hommes,femmes,enfants, vieillards, sont des génies de l’art contemporain. Leur corps est leur toile et leurs doigts des pinceaux. Voyage chez les peuples de l’Omo. Stupéfiant !

"La peinture sur soi"

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 Lire l’article de jean-Paul Mari sur Hans Silvester

http://www.grands-reporters.com/La-peinture-sur-soi.html

Hôtel des Arts

4 juillet > 7septembre 2008

CONSEIL GENERAL DU VAR

Toulon – www.var.fr

John William Waterhouse

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Destiny
NOUVEAUTÉ
L’Album d’Eucharis  

01/07/2008

Aller à toi

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Lou-Andreas Salomé
 
 
 
Tes cordes sont généreuses : et si loin que j’aille – tu te retrouves sans cesse devant moi. Mes combats te sont devenus depuis longtemps des victoires, c’est pourquoi il m’arrive d’être si petit devant toi ; mais mes nouvelles victoires t’appartiennent, et j’ai le droit de t’en faire cadeau. Au bout d’une longue route passant par l’Italie, j’ai atteint le sommet que représente ce livre. Tu l’as atteint d’un coup d’aile, en quelques heures, tu t’es tenue sur la cime la plus limpide avant même que je n’aie terminé l’ascension. J’étais haut, mais encore dans les nuages ; tu attendais au-dessus d’eux dans la lumière éternelle. Accueille-moi, aimée.
Reste à jamais ainsi en avant de moi, ô chère, unique et sainte. Laisse-nous monter ensemble – comme vers le grand astre, nous appuyant l’un sur l’autre, nous délassant l’un et l’autre. Et s’il me faut un jour, pour un temps, détacher mon bras de ton épaule, je ne craindrai rien : tu seras au sommet suivant pour accueillir en souriant le fatigué. Tu n’es pas un but pour moi, mais mille buts. Tu es tout, et je te sais en tout ; et je suis tout, et je t’apporte tout en venant au-devant de toi.
"Journal Florentin" - Journaux de jeunesse
Rainer Maria Rilke
(traduit de Philippe Jaccottet)
Editions du seuil (p.95)

29/06/2008

Jacqueline Risset

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RIEN –

le silence

la source ouverte

- mais ces images sont petites

pas besoin de parler de source

pas besoin de parler d’ouvert

pas d’eau sans doute

et s’il faut une image

c’est la plus transparente

légère

quasi absente

- de toute fleur

 

Petits Eléments de physique amoureuse, « l’Infini », collection dirigée par Philippe Sollers (Gallimard, 1991)

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Le Toucher

Tu ne m’as pas touchée encore

l’amour passe par les yeux
et descend dans le coeur
l’amour de loin nous exerce
et nous perfectionne

mais qui

pourrait me toucher à présent
sinon toi ?

je circule dans l’air
dans ce bois sacré
couloir de givre
dans cette auréole

L’Amour de loin, Flammarion, 1988

Voyageur universel - Jérôme Rothenberg

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Chants maoris ou altaïques, cérémonies indiennes, épopées et louanges d’Afrique, hymnes d’Egypte ou du Pérou, cosmogonies d’Asie centrale, du pays Dogon, d’Australie, légendes d’Irlande et de Chine, inscriptions sumériennes, rites de possession, définitions aztèques, “poèmes en prose” esquimaux...

Les Techniciens du sacré présentent tout d’abord un panorama divers et cohérent, un corpus exemplaire de textes “traditionnels”, de toutes provenances géographiques et temporelles.

Mais loin de s’en tenir à une approche strictement documentaire, Jerome Rothenberg a composé son ouvrage comme une anthologie “active”, inscrite dans le présent, développant au fil de nombreux Commentaires, un singulier parallèle entre ces textes immémoriaux et la poésie du XXe siècle.
Selon lui, les diverses révolutions modernes ont en effet replacé les créateurs (et singulièrement les poètes) dans une posture qui n’est pas sans équivalent - au moins à titre analogique - avec celle des chanteurs, chamans ou devins des sociétés dites “sans écriture”, en leur confiant le soin d’arpenter les domaines que recouvre la part obscure du langage : le rêve, les visions, la parole des morts...

Composé au beau milieu de la grande tornade utopique et rebelle des années 1960, ce livre a eu outre-Atlantique une influence notable sur la poésie de son temps. La version qu’en propose Yves di Manno rouvre aujourd’hui ce débat, dans le contexte français.

Les techniciens du sacré : anthologie
Rothenberg, Jerome
Editions Corti

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Pour moi, le sacré ne relève pas du transcendantal ou du métaphysique… Il s’agit plutôt d’une attitude de questionnement, d’interrogation par rapport à la vie, la vie dans son expression la plus matérielle, concrète. (…) La question centrale, par rapport au sacré, est bien celle du langage et de la réalité : comment le langage représente- t-il la réalité ? Quel rapport entretient-il avec elle ? Il est important de comprendre à quel point le langage faisait partie de la démarche des peuples traditionnels (…)   A lire « Propos recueillis » par Marta Krol pour le magazine LE MATRICULE DES ANGES – N°93 Mai 2008 - (pp.44-45)

Bernard Plossu

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Michele, en allant à la cinémathèque de Chaillot, 1963
(Bernard Plossu est né en 1945 à Dalat, sud du Viêt Nam)
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Françoise

Frémis, très chère!...

pasternak.jpgBoris Pasternak

« Frémis, très chère ! – un poète amoureux, C’est un dieu, un forcené qui aime.» (…) « Tu t’assieds, ramenant tes genoux Près de toi sur la molle ottomane. Nuit et jour et toujours et partout, Tes raisons sont toujours enfantines. » (…) « Il faut ouvrir la route à l’avenir. Il ne naîtra pas une vie nouvelle Dans les décombres, les révolutions, Mais dans les inventions et les appels D’une âme dévorée par la passion. MA SŒUR LA VIE et autres poèmes, Editions Poésie/Gallimard»

Bernard Pagès - Le Clair Obscur III

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Le clair-obscur III 1999
Bois de chêne calciné, Plexiglas scié, 251 x 120 x 45 cm
Vue de l'exposition Le noir est une couleur, Fondation Maeght, Saint-Paul
Collection privée
Photographies Claude Germain

http://documentsdartistes.org/artistes/pages/page1.html

Elle l'appelait Jim

images.jpgStratis le marin décrit un homme

(Extrait)

HOMME

(…)

On nous disait, vous vaincrez quand vous vous soumettrez.

 

Nous nous sommes soumis et nous avons trouvé la cendre.

 

On nous disait, vous vaincrez quand vous aurez aimé.

 

Nous avons aimé et nous avons trouvé la cendre.

 

On nous disait, vous vaincrez quand vous aurez abandonné votre vie.

 

Nous avons abandonné notre vie et nous avons trouvé la cendre.

 

Nous avons trouvé la cendre. Il ne nous reste plus qu’à retrouver notre vie maintenant que nous n’avons plus rien.

 

J’imagine que celui qui retrouvera la vie, malgré tant de papiers, de luttes, de sentiments, d’enseignements, sera quelqu’un comme vous et moi, avec une mémoire juste un peu plus tenace. Pour nous, c’est difficile, nous nous souvenons encore de ce que nous avons donné. Lui, ne se rappellera que ce qu’il aura gagné par chacun de ses dons. Que peut se rappeler une flamme ? Si elle se rappelle un peu moins qu’il ne faut, elle s’éteint. Si elle pouvait nous enseigner, tant qu’elle brûle, à nous souvenir avec justesse !

(…)

Une fois – je travaillais encore sur les bateaux – je me suis trouvé un midi de juillet tout seul sur une île, infirme sous le soleil. La brise légère de la mer faisait naître en moi de tendres pensées quand vinrent s’asseoir un peu plus loin, une jeune femme à la robe transparente qui laissait deviner son corps de biche, mince et ferme, et un homme silencieux qui la regardait dans les yeux, à quelque distance. Ils parlaient une langue que je ne comprenais pas. Elle l’appelait Jim. Mais leurs paroles étaient sans poids et leurs regards, immobiles et confondus, laissaient leurs yeux aveugles. Je pense toujours à eux : ils sont les seuls êtres rencontrés dans ma vie à n’avoir pas cette expression rapace ou traquée qu’ont tous les autres. Cette expression qui les range dans la foule des loups ou dans celle des agneaux. Je les revis le même jour dans une de ces petites chapelles des îles qu’on découvre toujours au hasard pour les perdre dès qu’on en sort. Ils se tenaient à la même distance puis ils se rapprochèrent et s’embrassèrent. La femme devint une image incertaine et s’effaça tant elle était petite… Savaient-ils qu’ils étaient délivrés des filets du monde ?

 

Il est temps que je parte. Je connais un pin qui se penche sur la mer. A midi, il offre au corps fatigué une ombre mesurée comme notre vie, et le soir, à travers ses aiguilles, le vent entonne un chant étrange comme des âmes qui auraient aboli la mort à l’instant de redevenir peau et lèvres. Une fois, j’ai veillé toute la nuit sous cet arbre. A l’aube, j’étais neuf comme si je venais d’être taillé dans la carrière.

 

Si seulement l’on pouvait vivre ainsi ! Peu importe.

Londres, 5 juin 1932.

Georges Séféris

26/06/2008

Jean Amado à la Galerie-Librairie Alain Paire

 
Exposition Jean Amado
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Du 5 juin au 2 août 2008

GALERIE – LIBRAIRIE Alain Paire

http://www.galerie-alain-paire.com/

Télécharger le Catalogue JEAN AMADO/Parcours d'art catalogue5.pdf

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Sculpture de Jean Amado
"Le doute et la pierre"
200 x 335 x 122 cm

20/06/2008

Exposition de l'atelier d'écriture - Nathalie Riera - Association Roquebrune-Culture

  A fleur d’encre
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Vendredi 20 juin 2008 : cela méritait bien une photo après 9 mois d'une sympathique animation auprès d'un groupe très très sympathique que je remercie.
La photo est signée Françoise-Bottu Grosso.
17h : la mine un peu... non ?
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Françoise B-G.
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... et puis, Eliane G.
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La structure en roseaux qui a permis de recevoir et de présenter les textes produits par l'atelier
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Les recueils confectionnés à l'occasion de cette expo qui s'est terminée aujourd'hui-même
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Des Haïkus, des tablotins, un ensemble de supports, d'écrits et de présentations, qui font d'un atelier un lieu de partage et de découverte, et font de l'écriture un exercice de plaisir
***
 Ce que  je raconte aux arbres

Où la lumière descend se pose sur les paroles en désaccord l’aphasie des herbes trop sèches le manque d’eau et cette attente d’un ruissellement de l’aube sur ce que les arbres ont de plus clair et qu’ils détiennent comme un secret l’incertain en somme Où la lumière se fend fendille les brindilles les branches de trop de harcèlement ou d’abandon le long des ombres longues et tenaces leurs éclisses sous les coups de la hache pénibles poèmes que toutes leurs fables infâmes à vos feuilles qui me racontent l’histoire du silence à mon tour de vous raconter l’endroit où la lumière descend se pose sur un brin de mon genou égratigné

N.R.

Inscription

Pour la saison 2008/2009

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La dédicace ardente - Antonio Ramos Rosa

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Ambiguë et nulle avec une graphie fugace,
La figure fragile se consume dans l’instantané
Et signe une dédicace ardente Sous les pieds d’une licorne blanche.
C’est un acte parfait comme un fagot de bois
Ou le plexus solaire.
Les volutes grises,
La multitude des images, les essences
Retournent à leur origine, à leur oubli.
Le texte coule comme un métal d’eau
Parmi les rues vides d’un autre temps.
Ce que nous sommes maintenant est l’ombre de ce
Que nous sommes
Dans les paroles nocturnes d’un idiome blanc.
 
 
A. Ramos Rosa 
Extrait de Accords (p.136)

Walt Whitman

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Le chant de tous et de moi-même 


Lire « Leaves of grass »(1), c’est lire un homme entièrement incorporé, de corps et d’esprit, dans le monde. Dès le premier poème, Walt Whitman pourrait nous apparaître comme un heureux terrien, en pleine possession de lui-même, souverain de son corps et de son âme, sans que nul désenchantement ne puisse l’affaiblir ou le ternir, résolument amoureux de tout ce qui croît à l’air libre, résolument fort en gueule, charnel, sensuel, mangeur, buveur, baiseur dans sa grande aventure ici-bas et auprès de ses semblables. Qu’ils soient de l’île de Manhattan ou d’ailleurs, peuple des cités ou hommes de la nature : la contralto, le charpentier, le chasseur, les diacres, la fileuse au rouet, le fermier quaker, le fou à l’asile, l’imprimeur de journal, le mécanicien, le jeune cocher, les groupes d’immigrants, la vendeuse squaw, l’amateur d’art, les hommes de pont, l’épouse, la jeune ouvrière yankee, le paveur, le journaliste, le peintre d’enseignes, l’employé du canal, le comptable, le cordonnier, le chef d’orchestre, l’enfant baptisé, la future mariée, le mangeur d’opium, la prostituée, l’équipage du chalut, l’homme du Missouri, le billeteur du train, les carreleurs, les zingueurs, les maçons, le pêcheur de brochet, le squatter… 

« (…) tous viennent vers moi et moi je vais vers eux, 

Et, dans la mesure où cela se peut, je suis plus ou moins chacun d’eux, 

Et avec eux tous sans exception je tisse le chant de moi-même »        

Whitman s’abandonne à eux, comme il s’abandonne à la terre et à la mer, et à tous les plaisirs que ceux-ci lui peuvent procurer. Il les appelle de son indicible amour passionné. Mais autant que les douceurs du ciel, il ignore rien non plus des plaisirs de l’enfer qui l’accompagnent ; et de même peut-il se proclamer poète de la femme autant que de l’homme, homme et femme se tiennent à hauteur égale, sans distinction de petitesse ou de grandeur. Même l’herbe peut pousser sans limite à divers endroits de la terre, aussi bien chez les Noirs que chez les Blancs, car voici que le plus simple des végétaux, qui sait, est peut-être aussi une enfant, la toute dernière-née de la végétation. Aussi proche il est de ces hommes et de ces femmes dans leur quotidien de joie et de tristesse, et de même qu’il peut se retrouver dans le tumulte des rues, avec tous et parmi tous, Whitman peut tout aussi bien se retrouver en solitaire au fond de la forêt.         

De tout ce qui l’entoure, de tous les évènements qui se tissent, se trament et se passent, de ses relations avec les uns et les autres, de ce que la vie peut lui réserver de plaisirs et de déplaisirs, le poète s’interroge de tout cela, comme tant d’autres assaillis d’interminables questions, mais cependant, cela ce n’est pas moi, le Moi réel. Celui que je suis est toujours à l’écart de la mêlée (…) Je suis un témoin impassible. Le poète croit en son âme, mais son autre Moi ne doit pas s’humilier devant elle, pas plus que son âme ne doit s’abaisser devant cet autre Je du poète, ce dernier qui, d’ailleurs, ne sait non plus ce que peut signifier se mettre en prière. Pour quelle vénération ? Car ce qu’il voit chez les uns et chez les autres, c’est lui-même qu’il voit, et tout ce qu’il pourrait juger des uns et des autres, il porterait le même jugement sur lui-même. Whitman se tient bien debout, et ça il ne le sait que trop ; de la même manière qu’il se sait immortel, se moquant bien de notre conviction que la mort serait belle et bien réelle : 

« Mortaises et tenons, mon pied fait socle dans le granit, Je me moque de ce que vous nommez dissolution 

Car je connais l’amplitude du temps ».         

Sans souci, et dans toute la force de son corps et de son âme, peut-il alors poursuivre son voyage en promeneur amoureux ahuri de ma propre légèreté, de ma liesse.

Et maintenant, que sont la vertu et le vice, et tout ce qui peut s’en dire. Ni plus bon que mauvais, quelle différence alors entre ce qui est pris d’un côté comme bien et d’un autre côté comme mal. Ce qu’ont été et ce que sont désormais nos actions, l’essentiel se tient à ce qui nous témoigne jour après jour de sa valeur, et ce qui ici vaut davantage que tout le reste : c’est maintenant. 

« Pensées ou actes du présent sont notre éveil, notre départ précoce ».

Mais il y a aussi un Whitman imprégné de matérialisme, et n’est-ce pas aussi pour cette raison qu’il dit accepter la Réalité, sans douter d’elle le moins du monde. Il prend autant soin qu’il est à la fois subjugué par les miracles des sens, par la moindre des particules qui animent ce monde. Intestins, tête ou cœur, odeur des aisselles : tous ont leur propre subtilité. La plus grande vénération du poète sera autant ce que lui-même touche que ce qui le touche et l’émeut. Son corps, son âme : un Kosmos ! Tout ce qui vient vers lui le remplit, l’inonde, et ce que l’on nomme désir, ou encore cause et effet des évènements qui surviennent, de quelques sortes que ce soit, il ne sait réellement d’où cela peut venir, et comment de telles choses du monde peuvent se faire ou ne pas se faire : de la plus petite lumière à la plus juteuse clarté ; d’une amitié que l’on appelle à celle que l’on reçoit. Ainsi est que : 

« L’illumination matinale à ma fenêtre me plait mieux que la métaphysique dans les livres ». 

Le soleil de l’aube pourrait cependant l’affaiblir ou le terrasser, mais rien de tout cela, et pas même un effort pour surmonter pareil défi, car le poète a lui aussi son propre soleil ! et ses rayons suffisent à contrer ce qui pourrait apparaître au poète comme éblouissant ou tragique. Nous tous sommes à la mesure du soleil, comme l’herbe de la terre est à la mesure du travail des étoiles. Nous tous avons cette capacité à étonner. Cependant, le poète s’abstiendra du pouvoir du langage. La preuve de sa science et de sa joie n’est pas dans l’écriture ou la parole. 

« …Du silence de mes lèvres j’humilie le sceptique à plate couture ». 

Son chant de lui-même, et par conséquent des autres, se fructifie. Chant de lui-même, chant de dehors et de dedans, fait de sons composites, fusionnant, successifs, fait de tous les bruits universels, même de ceux qui proviennent d’on ne sait où, bruits d’ailleurs, bruits qui sommeillent en tout être et qui parfois se trahissent, telles les mains nerveuses sur son pupitre, ou tel encore le ton affaibli des malades. Autant de complaintes, de mélodies qui agressent, ébranlent ou arrachent de toute part le poète, puis le ravissent et le comblent d’une plénitude toute mouvementée, plus loin que l’orbite d’Uranus.

 « (…) Jusqu’à ce que libre enfin j’éprouve la merveille des merveilles, 

Cela qu’on appelle Etre ».         

La source de bonheur de Whitman ? Simplement mouvoir, presser, toucher avec les doigts. Mais bonheur aussi parce que tout est chef d’œuvre aussi. Toute espèce vivante, de la fourmi à la rainette, à la ronce des mûres, à la vache, à la souris… Ainsi, les animaux ne vont-ils pas eux aussi lui montrer leur parenté avec lui et l’obliger à un moment de répit : qu’il puisse rester des heures à regarder ces quadripèdes sans religion, sans vénération pour leurs ancêtres, et qui jamais ne se prétendent respectables ni malheureux sur terre. Mais le poète, toujours plus en course vers le futur, infiniment désireux de tout, réceptif à toutes choses, peut-il accepter de ne plus bouger, et s’asseoir, il dira cependant aller plus vite que le galop d’un étalon. Le poète sait s’accorder des répits, s’attarder mieux que jamais, mais il semblerait qu’il a toujours besoin de voir, de mieux voir, en même temps qu’il se dit avoir vu juste, et cela qu’il soit couché sur son herbe, comme il dit, ou couché, seul, dans son lit.

Quand les pensées le quittent, et qu’il demeure seul avec lui-même et son silence, le poète continue de marcher ; tant d’autres routes à cheminer, tant d’espaces à traverser, jusqu’au verger des astres qu’il visite pour contempler ses fruits. Tant de vols que le poète accomplit d’une âme avide et fluide. Whitman ne se limite pas à prendre seulement le bien dans l’immatériel ou dans l’air pur. Le bien est partout, dans tout ce qu’il touche et qui le touche, la matière est aussi jouissance. La vie ne lui offre que des paysages à perte de vue, la vie est splendeur visible. Grand observateur de la vie qui bat dans les grandes cités encore debout, comme dans celles tombées en ruine et où peut encore demeurer le courage humain fortement campé sur ses  deux jambes. Le poète voit tout et boit tout : son breuvage merveilleux ! dit-il. Whitman est aussi cet homme là, qui a vu des petits enfants aux yeux vieillis. Lui aussi a souffert parce qu’il était là ; lui aussi est l’esclave ; pour lui aussi l’infernal désespoir ; lui aussi a les mains qui agrippent le grillage de la clôture. Il ne faut pas lui demander ce que peut être la douleur du blessé, lui-même devient le blessé. Lui aussi allongé sur le sol avec sa chemise rouge. Lui aussi sait ce qu’est s’asseoir, mendier et avoir honte. 

Ce n’est là qu’une infime partie de la poésie whitmanienne, les trente premiers poèmes de son Song of Myself. Mais après les avoir parcouru, senti et bu, tel que Whitman l’aurait probablement désiré de ses lecteurs, lui qui disait savoir la parfaite équanimité de la vie, et que jamais nous ne chantons ni ne célébrons, que par seulement de calculables vanités, d’intraitables désespoirs,  que cherchons-nous si obscurément ? nous leurrant nous-même à nous sentir aussi libre que le carré de blé où siffle la caille, comme à nous faire indifférent à la délicate fleur bleue du lin, comme à nous rendre plus aimant ou plus méprisant selon la variation de nos humeurs, et comme à nous effrayer de la vie et de la mort. Chercheurs de savoirs avec nos visions embrumées et nos haleines desséchées, tout n’est-il pourtant pas plus simple, malgré les riches et parfois ennuyeuses complexités, et malgré aussi nos dégoûts et nos frissons de plaisirs certains.

Les choses invisibles et visibles, l’air des villes et des montagnes, les astres et les arbres des vergers, tout ce qui vibre au-dessus de nos têtes et devant nos yeux ; ce Tout qui est là depuis toujours, puisqu’il est déjà et depuis toujours en poésie ; de même qu’il n’est pas matière à savoir, puisqu’il est déjà Savoir ; n’est-ce pas encore la nuit ? et ne sommes-nous pas encore à la lisière du bois ? Pas d’autres pays de soi-même à visiter, n’allant jamais là où le grizzly quête du miel ou des racinesJ’ignore si Walt Whitman, hier comme aujourd’hui, aurait gagné la juste reconnaissance de ses concitoyens d’Amérique, de la même manière que Rimbaud à son heure posthume. Mais Whitman avait-il raison ou non de préférer le silence, il savait néanmoins que bien des silences sont aussi faits de bruits, d’or, et de météores. Mais probablement ignorait-il ce qui pouvait alors se produire en force et en grâce. Probablement que ce qu’il ne savait pas ne se tenait seulement que sur les feuilles d’herbe, vivantes et débordantes, de son écriture et sa fulgurante énergie d’une joie communicante. Transmission du bonheur d’être, qui n’a d’égal que dans le vaste monde de la Vie. 

« C’est moi que je célèbre, moi que je chante, Mais la somme que j’embrasse, tu l’embrasseras aussi 

Tant le moindre de mes atomes t’appartient intimement  (…) 

Ma langue, la totalité des atomes de mon sang façonnés 

Par le sol d’ici-même, l’air d’ici-même,   (…) J’accueille, est-ce un bien, est-ce un mal, 

Je laisse s’exprimer sans frein 


La Nature hasardeuse dans sa vierge énergie » 

(1) Feuilles d’herbes 

Nathalie Riera – Mars 2007 

Dorothea Tanning

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Dorothea TANNING - "Behond the Esplanade" - (1940)
- oil on canvas - 29 x 14.25 in. 74 x 36 cm.
Dorothea TANNING American artist - Image
copyright ©2007 Dorothea TANNING (USA)
- Artists Rights Society (ARS), New York / ADAGP, Paris

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Dorothea TANNING - "The Birthday" - (1942)
- oil on canvas, 102cm x 65cm -
Dorothea TANNING American artist - Image
copyright ©2007 Dorothea TANNING (USA)
- Artists Rights Society (ARS), New York / ADAGP, Paris

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Photograph of Dorothea Tanning, 1948, by Robert Bruce Inverarity. 14 x 11 inches (36 x 28 cm). Robert Bruce Inverarity papers, 1926-1998. Archives of American Art, Washington, DC, USA. www.aaa.si.edu