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21/02/2014

Tararira : le film perdu de Benjamin Fondane

 

 

L’ATELIER DE LA CRÉATION

 

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Tararira : le film perdu de Benjamin Fondane


d’Andrea Cohen et Gaël Gillon

Photographie de tournage de TARARIRA

© Archive d’Olivier Salazar-Ferrer

 

 

Site officiel | © France-Culture

 

 

 

 

 

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 Cet atelier évoque  l’histoire incroyable de ce film perdu, tourné à Buenos Aires en 1936 par Benjamin Fondane, (1898-1944)   poète et philosophe roumain installé à Paris. La grande dame des lettres argentine Victoria Ocampo, dans son livre « En Témoignage »,  rappelle  la venue à Buenos Aires de l’écrivain à son initiative. C’est grâce à elle et aux membres du quatuor  Aguilar que Fondane pourra  réaliser  un  film, conçu dans un esprit totalement  dadaïste. «  Si j'étais libre, vraiment libre, je tournerais un film absurde, sur une chose absurde, pour satisfaire à mon goût absurde de liberté” avait déclaré Fondane en 1933. Quand le montage a été  terminé Fondane est retourné en  France, son pays d’adoption. Pour des raisons ignorées, le film n’a pas été distribué. Toutes les tentatives de Fondane pour le récupérer  échoueront et les copies existantes     (à Paris et à Buenos Aires)   disparaîtront après la guerre. On imagine que  si Tararira avait été une réussite, Benjamin Fondane aurait pu s’installer en Argentine  et éviter sa fin  tragique, dans une chambre de gaz  Auschwitz en 1944...

Pour retracer l’histoire du   film  nous entendrons  les  témoignages des spécialistes de l’œuvre de Fondane et de son activité de cinéaste  et la lecture  des fragments des lettres que l’auteur a  envoyé    à sa sœur et sa femme pendant le tournage.

 

À propos du film Tararira (1936)

Tararira est le seul film réalisé entièrement par Fondane à Buenos Aires pendant l’été 1936. C’est un long-métrage noir et blanc tourné en 35 mm, produit par la Falma Film dirigée par Miguel Machinandiarena. Le scénario en espagnol met au premier plan les quatre musiciens entraînés dans une série d’aventures burlesques, interprétés par les musiciens d’un célèbre quatuor de luths des années 1930 (Pepe, Paco, Ezequiel et Isabel Aguilar). La musique du film, écrite par Paco Aguilar, est composée d’adaptations pour luths de Mozart, Haydn, Albéniz, Ravel, Brahms ou de mélodies yiddish.

 

Invités

Olivier Salazar-Ferrer, Ramona Fotiade, Michel Carassou (spécialistes de l’œuvre de Benjamin Fondane et responsables de l’Association Benjamin Fondane) :

http://www.benjaminfondane.org/association-benjamin-fondane.php

Antonio Navarro, luthiste, fondateur du nouveau quatuor Paco Aguilar qui a repris la formation et le répertoire du quatuor Aguilar

Silvia Baron Supervielle, poète, auteur de la préface du livre de Victoria Ocampo «  En témoignage »

 

Et les voix  de Victoria Ocampo, interviewé en France  par Viviane Forester en 1971

Et de Chola Asencio,  interviewé  à Buenos Aires  par Eve Grilliquez  en 1997 à propos du film Tararira dans lequel elle a participé en tant que comédienne.

 

Textes lus par Patrice Bornand et Clara Chabalier

 

Musiques  enregistrées par le quatour Aguilar entre 1930 et 1940 (archives d'Olivier Salazar-Ferrer)

 

Musiques du film "Tararira" enregistrées par le nouveau quatour  "Paco Aguilar" (direction Antonio Navarro)

 

Musique originale: "Palettes"  d'Andrea Cohen

Instrumentistes :

Elena Andreiev (violoncelle)

Yaïr Benaïm (violon)

Francisco Luque (guitare)

Carol Robinson (clarinette)

 

Archives sonores : INA et Olivier Salazar Ferrer.

Un grand merci à Olivier Salazar Ferrer pour son aide précieuse.

Remerciements aussi à Gonzalo Aguilar, et à Esther Casado.

 

 

07/12/2013

Norman Manea, La cinquième impossibilité

 

 

NORMAN MANEA

La cinquième impossibilité

 (Le Seuil, 2013)

 

 

 

COLLECTION « Fiction & Cie »

Essai traduit du roumain par Marily Le Nir et Odile Serre

SITE DE L’EDITEUR - http://www.seuil.com/auteur-10399.htm

 

 

 

Norman MANEA

 Site Bard College | © Cliquer ICI

 

 

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Une lecture de Nathalie Riera

« LA MAISON DE L’ESCARGOT ROUMAIN »

  

 

« L’impossible n’est pas seulement la négation simpliste, irrévocable, du possible mais plutôt sa blessure faste, enrichissante, qui valide par contraste et par complicité l’extension maladive, nocturne, de disponibilités inexplorées et secrètes »

 

Norman Manea, La Cinquième impossibilité, p.249

 

 

 

Norman Manea, né en 1936, est déporté à l’âge de 5 ans, avec toute la population juive de Bucovine. Sa seule langue d’origine, le roumain, sa « langue intérieure », sa « langue-domicile », « la maison et la patrie de l’écrivain », restera unique, malgré sa connaissance et sa pratique du yiddish, de l’ukrainien, de l’allemand, du russe et du français, et malgré ses divers domiciles linguistiques en exil, comme Berlin-Ouest, où il vit en 1987, et plus tard, New York, la  ville Dada, « ce frénétique kaléidoscope du monde » (p.244), où il fera sa première apparition publique, à l’automne 1989 ; New York où il continue d’habiter la langue roumaine « comme Paul Celan habitait la langue allemande à Paris. »

 

« J’avais tout de même emporté avec moi la langue, ma maison, comme un escargot. Elle continuerait de m’être premier et ultime refuge, domicile enfantin et immuable, lieu de survie.» (p.53)

 

Si l’être apatride ne peut être dépossédé de la langue dans laquelle il a été « formé et déformé », Norman Manea a dans la cartographie de son destin la violence de l’exil, comparable à un no mans’ land vertigineux.

 

« La cartographie de mon destin inclurait, sans doute, la Bucovine où je suis né, les camps d’extermination de mon enfance au-delà du Dniestr, le camp communiste de Periprava, qui a changé l’identité de mon père, le Bucarest de ma vie d’étudiant et d’adulte, Berlin, début de l’exil et, finalement, New York où mon exil a été naturalisé. » (p.242)

 

La Cinquième impossibilité rassemble, en douze textes, les amitiés et les affinités de l’écrivain roumain avec les écrivains Ernesto Sabato, Philip Roth, Paul Celan, Benjamin Fondane, Eugène Ionesco, Cioran, Antonio Tabucchi, Saul Bellow, Claudio Magris et Franz Kafka. Parmi eux, Magris et Tabucchi figurent parmi les amitiés les plus fécondes. Les éminents écrivains Manea et Magris (ce dernier né à Trieste, la patrie des apatrides, en avril 1939) se rencontrent vers le milieu des années 90, au Festival International des écrivains de Toronto.  

 

« J’enviai une fois de plus la grâce élégante de son style, son érudition naturelle, sa gentillesse conviviale, sa courtoisie de lettré. » (p.195)

« Un aristocrate de la culture, aussi naturel dans sa relation à la réalité de la vie que dans son rapport à la réalité du livre. » (p.196)

 

Autre rencontre-cadeau de son exil, l’écrivain italien Antonio Tabucchi, récemment décédé à Lisbonne, sa seconde patrie, et connu aussi comme traducteur et passeur de l’œuvre de Fernando Pessoa.

 

Manea reconnait en la lecture des grands écrivains son caractère formateur, et pour celui qui a vécu l’expérience de la déportation, « exposer ses vieilles cicatrices à la cosmogonie du nouveau rivage relevait d’une pédagogie bénéfique. » (p.11) La souffrance sauvée par la création « se révèle ainsi d’une paradoxale utilité thérapeutique. » (p.35) Manea se consacre alors, sans répit, à la maladie et à la thérapie de la littérature.

 

La Cinquième impossibilité renvoie aux 3 « impossibilités » de Kafka. C’est dans une lettre à Max Brod, sur la situation des écrivains juifs de langue allemande, que kafka aborde les impossibilités de langage : « l’impossibilité de ne pas écrire, l’impossibilité d’écrire en allemand, l’impossibilité d’écrire dans une autre langue, à quoi l’on pourrait presque ajouter une quatrième impossibilité : l’impossibilité d’écrire. »

Le possible a ses carences, « l’hospitalité trompeuse et corruptrice du possible », quand l’impossible devient comme un moyen de dédommagement, une réparation, pour Manéa « une sorte de revanche », et que vivre dans l’impossibilité c’est vivre « en tant qu’une des formes paradoxalement vivantes de l’existence. »

Norman Manea propose une cinquième impossibilité omise par Kafka : « On pourrait l’appeler « transfert » ou « radicalisation » ou « carnavalisation de l’impossibilité ». L’exil. L’exil d’avant et  d’après l’exil, la perte du chez-soi et ce qui s’ensuit une fois l’allogène expulsé avec tout, y compris sa langue volée, dans un milieu véritablement étranger des points de vue linguistique, géographique, historique et social. » (p.265)

 

 

Nathalie Riera, décembre 2013

Les carnets d'eucharis

 

 

 

Les livres constituent un « jeu second » essentiel de la biographie, et la bibliographie une généalogie livresque plus importante, souvent, que celle qui est inscrite dans les archives de l’hérédité.

Les êtres-personnages des rayons de bibliothèque composent une seconde population du monde, qui nous parle de l’esprit et du cœur des recensés de la planète, avec une influence plus durable que le tintamarre quotidien. Ils sont nos indéfectibles « compagnons de route », de désespoir et d’espoir.

 

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Le « trauma privilégié » de l’exil a suscité chez moi d’importantes analyses du monde extérieur et de mon monde intérieur. Je prends acte, aujourd’hui, avec une conscience accrue de l’universalité, de la cacophonie de l’actualité, du vertigineux mercantilisme de la culture et des consciences dans notre époque de transactions et d’ersatz, d’incessante perversion du Logos.

 

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