02/08/2023
Pascal Boulanger - En bleu adorable - Une lecture de Gwen Garnier-Duguy
Une lecture de Gwen Garnier-Duguy
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PASCAL BOULANGER
En bleu adorable
Carnets 2019-2022
[Editions tinbad, 2023]
Le poète de Martingale (Flammarion, 1995), de Tacite (Flammarion, 2001), de Mourir ne me suffit pas (Corlevour, 2016) poursuit son poème historial par d'autres moyens qui sont ici le fruit de ses lectures à travers lesquelles pense son esprit poème.
Placé sous la figure tutélaire d'Hölderlin à qui Pascal Boulanger emprunte le titre d'un poème, le poète, comme le monde entier, vit la période de la pandémie planétaire avec la conscience du creuset qu'elle incarne pour l'espèce.
Boulanger inclut dans ses carnets des fragments de ses lectures, qui incorporent le grand poème de sa pensée.
Sa poésie intérieure fait fruit de toute parole comme on fait feu de tout bois, avec ces mises en perspectives qui agissent en tant que preuves déjà énoncées, sur le chemin du marcheur qu'est le poète Boulanger vivant la vie dans l'incandescence offerte par chaque instant.
J'ai toujours eu une vie secrète qui était toujours ma vraie vie. (Imre Kertèsz)
Quand on le déroule, le livre emplit l'univers dans toutes les directions, quand on l'enroule, il se retire et s'enfouit dans son secret. (le Zhong Yong)
Le secret est un contre-poison au cœur du poison social, comme un silence au cœur du bavardage, il est l'arme absolue contre la convoitise. (Pascal Boulanger)
Nous comprenons, dès la 2e page, que ces carnets sont un poème de survie en territoire ennemi, un guide de salut pour les damnés de l'enfer moderne imposé par une élite non-émancipée de l'illusion progressiste et sociale, et de l'esclavage consenti qui est notre réalité.
Ces fragments de lectures, qui sont des preuves, nous l'avons dit, sont autant d'étapes, comme sur un chemin de labeur, permettant la vision créatrice et contemplative : Comme une prose qui s'étire, la mer s'engorge et se désengorge, tisse et détisse dans des ondulations aux beautés étendues et dispersées. La parole mariée au paysage intégré dans un mouvement d'épousailles relève de l'amour, le chant devenant le corps de la nature.
L'attitude du poète Boulanger dans tous ses livres, et dans celui-ci précisément qui prolonge toute son aventure poétique, donc de conscience humaine, est celle, exemplaire, indicative, du dépassement du négatif, le négatif étant celui de notre modernité finissante. Il prolonge sa dilatation poétique et la conscience du lecteur, par son chant, même si entendu par peu d'oreilles, est alors imprégnée de la danse énigmatique et magique du vivant.
Boulanger, ici comme dans tous ses livres, dit la fonction historiale des événements dans la pensée poétique possible pour le genre humain alors enfin arraché à la pesanteur sociale qui est l'extrême illusion tenant lieu de but ultime, de raison de vivre aux tenants du fanatisme progressiste.
La pensée de Boulanger s'appuie sur les preuves déjà énoncées par les devanciers, Rimbaud, Lautréamont, Cendrars, et sa pensée devient poésie vivante. Les preuves sont aussi énoncées par ceux qui font la guerre au peuple ou à l'autre, comme Eribon ou encore Edouard Louis, projetant sur le monde leurs ténèbres qu'ils sont incapables, fous et aveugles, d'intégrer dans leur conscience infantile n'ayant strictement rien à voir avec l'esprit d'enfance chanté par Baudelaire.
Le poète s'interroge alors : Que révèle cette crise sanitaire (qui est, en vérité, une crise métaphysique) et sa gestion programmée à l'échelle mondiale ? Tout simplement un crime contre la mort : il est devenu, en effet, interdit de mourir, sauf pour les jeunes et pour l'esprit d'enfance retrouvé à volonté. Elle révèle, par conséquent, un infanticide.
Technique, comme chanté dans Tacite, et projection, par le fantasme transhumaniste de la peur de se confronter à la finitude, à notre condition de mortels dans ce qu'elle peut nous révéler de notre nature ontologique, et nous conduire dans les bras révélés de l'amour, donc de Dieu. Projection par terreur d'affronter notre propre profondeur, toute la société spectaculaire vient de cette tétanisation régressive. Projection ce besoin d'accumuler, de stocker tout l'étant pour se prémunir contre le gouffre, ce vide ouvert par le Verbe fait chair, par le dieu qui parle.
En bleu adorable dit aussi le ressentiment. La présence de René Girard, génie contre-moderne des temps modernes, éclaire la pensée-poésie de Boulanger que son poème illumine à son tour dans son prolongement impensé mais chanté.
Chanter, en vers, en versets, chanter en prose, dire ce moment de vie que fut le souhait de son éditeur Flammarion de désavouer l'ami Marcelin Pleynet qui venait d'attaquer la récente traduction des Cantos d'Ezra Pound, chez Flammarion aussi, chanter la fidélité à l'amitié, et le prix à payer, le prix de la liberté contre les compromissions.
Tout est chant lorsque élevé au timbre approprié, ce timbre du dénuement permettant de se débarrasser des peaux anciennes qui sont aussi des peaux sociales.
Il n'est alors pas étonnant de trouver Guillevic dans ce poème, Boulanger sachant que ce n'est pas la parole qui nomme les choses, mais les choses qui nous appellent et nous nomment et de citer des vers de Guillevic : Tu sais bien / Que ta présence / Va réjouir les plantes / Sur le balcon.
Monte alors le grand chant intérieur de Pascal Boulanger : Une vie calme et voluptueuse – hors-calcul, hors comptabilité – dans ce qui vibre en résonance, comme se baigner dans la profondeur bleutée des yeux de l'aimée.
Boulanger brasse alors Hölderlin et dans un va-et-vient vertigineux avec les paroles du Christ, se pose en poète métaphysicien. Peut-être y a-t-il une manière d'identification avec Hölderlin dont chaque respiration tendait à la relation avec le divin et contre la société perfide, la société humaine qui persécute l'être tendu en Dieu ?
Vaincre le monde a pour prix la Croix et, à chacun sa Croix. La Croix de Boulanger serait de vivre banni d'avoir chanté le chemin authentique, son propre chemin de conscience. Ce bannissement relève alors de l'ordre véritable tant c'est déjà beaucoup, pour le poète, d'être la mauvaise conscience de son temps comme le disait Saint-John Perse.
Cependant Boulanger sait que la conséquence logique (à sa liberté) est la solitude mais aussi la victoire posthume, comme l'écrivait Sollers à propos de Chateaubriand.
Les marées malouines et les mascarets du Mont Saint-Michel sont ceux que respire le poète Boulanger, chargés du souffle toujours dans l'air du génie du Christianisme.
En bleu adorable l'annonce, dans l'apparition jubilatoire de son poème.
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01/05/2021
Pascal Boulanger
L’intime dense
[Extraits]
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Extraits
[Pascal Boulanger, L’intime dense
Éditions du Cygne, 2021]
Le savoir où l’on meurt
mais la ferveur qui vaut de l’or ?
& la rivière sur le chemin du soleil ?
& l’esprit d’enfance dans la chevelure forêt ?
Le promeneur qui marche sur la baie
tient la main de l’aimée
même absente.
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Proche
insaisissable
en épiphanies qui brûlent.
La présence d’un ciel
dans l’éclat de ces yeux
fera-t-elle retour ?
Dans l’attente parmi
les oiseaux bavards de l’aube
qui signe & veille
sur les montagnes du temps
chose nouvelle ; amour ?
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Comment se vivre autrement
au soleil couchant
quand l’écart assaille.
Sans sommeil
l’effrayant désir
entre l’herbe & le ciel
vers les yeux
commence à voir
& glisse
jupe cambrée
à la courbe,
une fenêtre, l’univers
dans la main.
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Franchissement plein amour
qui fait présence ne manque
aux roses qui se tiennent nues.
Au toucher doux rêche
la chair des fruits ruisselle
sur une table.
Désir présume comme
un enfant joue seul
sans souci de rien
& goûte à la volupté
nouvelle du monde.
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| BIO-BIBLIOGRAPHIE : Pascal Boulanger, né en 1957, a été bibliothécaire en banlieue parisienne. Il vit en Bretagne, près du Mont Saint Michel, depuis mars 2019. Il a publié des articles et des chroniques dans de nombreuses revues littéraires. Parmi ses derniers livres – recueils ou essais – Guerre perdue (Passage d’encre), Mourir ne me suffit pas (Corlevour), Jusqu’à présent je suis en chemin, carnets 2016-2018 (Tituli), Trame : anthologie 1991-2018 suivie de L’amour là (Tinbad).
■ © Éditions du Cygne
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04/06/2015
Pascal Boulanger, Confiteor (une lecture de Claude Minière)
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UNE LECTURE DE CLAUDE MINIÈRE
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Pascal Boulanger
Confiteor
Éditions Tituli, 2015
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Pascal Boulanger fait paraître Confiteor aux éditions tituli. Dans le VI° arrondissement de Paris, ces libraires se font éditeurs et organisent des lectures dans leur galerie (www.tituli.fr). L’écriture poétique, dit Pascal Boulanger, « va tenter de renverser la malédiction (la malédiction de toute existence) en exultation. » Pour Confiteor, il a regroupé ses notes et paragraphes selon quatre « pôles », en quatre chapitres : L’enfance des choses ; Imprimer un monde ; Liberté divine ; Poésie politique. « Mon écriture alors s’ouvre au hasard, aux circonstances, aux accidents ». Ce qui fait la logique même de Pascal Boulanger : il ne réclame pas l’adhésion. Mails il a des soutiens, des amis en écriture, en pensée, et dans la lutte. Avec Baudelaire, il revendique le droit de se contredire. Comme Claudel, pour une célébration du passage et de la haute alliance (célébration pascale) il fait feu de tous bois (« Le laurier, s’il y en a, ou la palme encore mieux s’il y en a, ou le rameau d’olivier, ou le buis tout simplement… » lançait l’auteur de Le jour des rameaux), il force une voie, passe outre, entend lui aussi, « l’accord dans le désaccord parfait ». Il n’épargne pas, ne s’épargne pas et n’épargne personne mais parle avec émotion et gratitude de ceux qu’il aime. « Vivre ses sensations, c’est trouver un hors-lieu, c’est bâtir des stèles de l’enchantement simple ».
Où se jouent les choses ? Qui est à l’abri des fantasmes qui consistent (je tiens que les fantasmes consistent) à imaginer qu’il est au bon endroit, qu’il occupe la bonne position ? Pascal Boulanger bouscule les positions, pousse sa ligne contre les vents des actualités et marées humaines, contre ou plutôt en dehors de l’utilité, des calculs, de la spéculation. Comme Saint Paul, il doit passer par un certain aveuglement pour confirmer son chemin. Il regagne le temps perdu. Sans pruderie, et sans prudence. C’est un nerf de la croyance qui a un sens politique. La croyance longe la foi. C’est pas fini. L’auteur de Confiteor rappelle son avant-propos de Fusées et paperoles (2008, Comp’Pact) : « Aujourd’hui, j’entends toujours les cris effacés du silence, je vois toujours le ciel surgir des draps cachés de la terre… »
Page 57 : « J’ai été confronté, en commençant d’écrire, au psychologisme lourd de mes contemporains, au sociologisme pesant,… » On peut comprendre qu’étant donnée la belle mansuétude qui caractérise l’espèce humaine et les propriétaires d’un supposé pouvoir culturel, le « psychologisme » est une arme (misérable) de découragement. Mais Pascal Boulanger a du courage, du « courage poétique » (selon le mot d’Hölderlin).
Ce n’est pas sans raison que le premier chapitre de Confiteor est pour l’enfance. L’enfance, retrouvée à volonté, et l’archive conduisent à confronter la question « poésie et politique ».
Claude Minière | © Les Carnets d'Eucharis, N°45 - Printemps 2015
À CONSULTER
Le site de l’éditeur | © http://www.tituli.fr/
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06/03/2014
Marcelin Pleynet, "L'étendue musicale" (une lecture de Pascal Boulanger)
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UNE LECTURE DE PASCAL BOULANGER
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L’étendue musicale
MARCELIN PLEYNET
Editions Gallimard, coll. L’Infini, 2014
Site officiel | © http://www.gallimard.fr/Catalogue/GALLIMARD/L-Infini/L-etendue-musicale
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■■■ D’un livre à l’autre et quelque soit les registres d’écriture, Marcelin Pleynet nous donne à lire une odyssée du nom propre. A l’affirmation du non (sous couvert du oui) son oeuvre ne cesse d’opposer l’affirmation du Nom dans l’éclat du oui. N’est-il pas fidèle au foyer fixe de ses désirs : les livres, la peinture, la musique – la poésie en somme – celle qui mêle le combat musical à la maîtrise du temps, définit l’assomption dans l’être sous le mode de la kénose. Car il s’agit bien de se vider de l’asservissement au contrat social et de choisir une traversée solitaire et sensible se chargeant, par l’oreille et par la voix, de faire résonner l’infini. Pour être l’hôte de l’étendue musicale qui fait vivre et vivre en dehors du désenchantement général, Pleynet invente l’art du déplacement, à partir duquel la circonférence est partout et le centre nulle part. Les premières messes à San Francesco della Vigna, les Vêpres de la Vierge de Monteverdi, la bibliothèque Marciana, L’Annonciation de Titien dans l’église de San Salvador, les frontons de Palladio, l’étendue des îles qui s’éclairent… Voici Venise, autrement dit, plus besoin de chercher ce que l’on croyait perdu. Le réel apparaît immédiatement possible – sans commencement et sans fin – dans la mobilité et la clandestinité et il devient facile d’être léger et délié. Pour ne pas mourir sur les saisons, il faut atteindre le point central de l’intériorité qui témoigne sur la beauté des choses. Dans la célérité des signes, la phrase de ce roman mène jusqu’à l’irisation de la pensée, jusqu’au vaste ciel de Venise à peine bleuté, lumineux, transparent. Jamais l’écriture de Pleynet n’a été autant détachée des rumeurs et des ressentiments de l’histoire. L’absence de décision ruine tout lien, la vie secrète, la vie d’esthète demeure la vraie vie.
Pascal Boulanger, mars 2014 © Les Carnets d’Eucharis
■■■MARCELIN PLEYNET
Né le 23 décembre 1933 à Lyon, poète, romancier, critique d'art et essayiste français. Il a publié un grand nombre de volumes de poésie, deux romans et six volumes de Journaux. Titulaire de la chaire d’esthétique à l’École nationale supérieure des beaux-arts de Paris de 1987 à 1998, il a été directeur gérant de la revue Tel Quel de 1962 à 1982.
SITE À CONSULTER
Sur le site : Marcelin Pleynet| © Cliquer ICI
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14/03/2013
Les Carnets d'Eucharis, par Pascal Boulanger (article mis en ligne sur le site "Recours au Poème")
Les carnets d’Eucharis
Par Pascal Boulanger
SITE : Recours au Poème
Nathalie Riera est une lectrice infatigable. Egalement Poète, elle a publié Puisque beauté il y a (Lanskine, 2010), un recueil qui, en se gardant de tout solipsisme, couronne le jour qui passe et sait jouer des saisons de l’homme sur la terre Depuis 2008, elle diversifie, dans sa revue numérique Les carnets d’Eucharis, les approches et les contenus littéraires. Sans sectarisme mais ouvert aux tendances esthétiques les plus novatrices, son site est devenu incontournable.
Voici aujourd’hui la publication d’une première version papier de ces carnets.
Ma décision d’en venir, une fois par an, à une version papier, est une manière de ne pas négliger un pan du lectorat qui s’avère peu attaché à la seule lecture numérique (…) Claude Minière m’a fait part de cette pensée : « dans le passage à l’édition papier, il y a un geste significatif. Par là, vous allez vers ce qui se donne à la main, ce qui peut se lire dans la main (dans la méditation) – et donc n’est plus sous l’impression binaire « informatique », se déroulant pour l’œil seul. (Réponse de Nathalie Riera à une question de Richard Skryzak dans l’avant-propos). LIRE LA SUITE…
20:24 Publié dans LES CARNETS D'EUCHARIS (pdf & calaméo), Nathalie Riera, Pascal Boulanger | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer | | Facebook
19/05/2012
Revue Nunc n°25
REVUE NUNC
revue anthropologique, éditions de Corlevour 20 €
n°25 – Octobre 2011
Dossier Marcel Jousse
Une introduction signé Franck Damour, des poèmes de Claude Tuduri et de Matthieu Baumier, un cahier critique conséquent (signalons notamment une chronique de Serge Rivron consacrée à Pasolini et une d’Antoine de Meaux sur Cioran), puis sous la rubrique Axis Mundi, Marcel Jousse fait l’objet d’un dossier substantiel (avec des contributions, parmi d’autres, de Michel de Certeau, Joseph Morlaas et Bernard Vergely). Penseur majeur qui a défriché les voies d’une anthropologie dynamique, Jousse fédère des domaines multiples : théologie, science du langage, poésie… à l’image de la revue NUNC que dirige Réginald Gaillard et qui propose des numéros toujours inclassables et riches d’enjeux.
Rappelons que NUNC fête ses dix ans d’existence.
© Pascal Boulanger
© Nathalie Riera, mai 2012
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30/04/2012
Pascal Boulanger (Revue FAIRE-PART 30/31)
Pleynet en son temps
Pascal Boulanger
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■■■ C’est la résistance au dressage social (et aux poètes du social) et la radicalité du retrait qui ont toujours fait pour moi actualité dans les œuvres lues. En puisant dans la bibliothèque et en découvrant, à l’âge de 18 ans, les écritures de Rimbaud et de Pleynet, j’ai compris que la société n’était qu’un crime organisé sous le masque progressiste de la solidarité et des droits de l’homme.
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Pleynet a été confronté, comme les écrivains de sa génération, au psychologisme lourd, au sociologisme pesant, à l’existentialisme engagé, au surréalisme tenace, au réalisme socialiste et bientôt à l’avant-garde exténuée sombrant dans l’académisme… Il fallait donc aller voir ailleurs, chez les poètes et les peintres américains, chez Lautréamont, Rimbaud et Artaud, chez Georges Bataille afin de détruire la parole éculée, le vieux bassin à sublime (Sollers).
Le combat du texte est combat musical et maîtrise du temps, contre l’asservissement au spectacle, contre le pathos materno-social au service de l’homo technicus, programmé dans un tube de verre et éduqué dans les collèges de l’ignorance et de la violence.
Le passé, le présent confondu au foyer fixe du désir (…) Etre aujourd’hui comme hier, présent, caché, fuyant, entouré, isolé et seul dans la jouissance de ce vide papier (Marcelin Pleynet, Prise d’otage, Denoël, coll. L’Infini).
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Les animateurs culturels que je croise pour des raisons alimentaires s’intéressent au bien public. Ils croient à la société, à sa réalité et à son utilité. Ils sont dans l’agitation, l’adhésion, à l’image d’un Sartre pour qui Baudelaire fait scandale : Il a souhaité se dresser à l’écart de la grande fête sociale, à la manière d’une statue, définitif, opaque, inassimilable. Le transparent et assimilable Sartre, comme les bateleurs de foire d’aujourd’hui, n’aiment guère que l’on quitte la fête sociale, surtout sans autorisation. Les écrivains de la misère sociale préfèrent se perdre dans la foule, dans la bafouille de l’engagement. Quel intérêt peut bien susciter la poésie de Baudelaire et de Pleynet pour les professeurs d’instruction civique et de participation citoyenne ?
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Dans la voix, dans les gestes, j’ai parfois senti une fureur digne d’un saint Paul chez Pleynet. N’est-il pas, comme le fut Pasolini, radicalement étranger à la culture de son époque ? La vision, qui n’est jamais celle d’un siècle mais d’un individu, témoigne d’une traversée directe et existentielle d’où peut surgir une extrême liberté de parole face à tous les discours des pharisiens et des prêtres de la fraternité universelle.
L’œuvre de Pleynet révèle une métaphysique de l’exil, celle d’un sans-patrie du temps (Franz Rosenzweig). L’oreille et la voix se chargent alors de l’infini : Il ne faut pas lire négligemment avec les yeux, mais avec les oreilles, comme si le papier était en train de déclamer (Hopkins à son ami Robert Bridges).
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En 1999, je publie aux éditions Tarabuste un recueil : Le bel aujourd’hui, dédicacé à Marcelin Pleynet.
Le premier poème signe une dette explicite.
Les monstres intimes
en attendant
lecture
des livres qu’on ne lit plus
1962 : Provisoires amants des nègres
1963 : Paysages en deux suivi de Les lignes de la prose
1965 : Comme
1973 : Stanze (Chants I à IV)
1981 : Rime
1984 : Fragments du chœur (vers et proses)
1987 : Plaisir à la tempête
1995 : Le propre du temps
1998 : Notes sur le motif suivi de La Dogana
Les livres sont sur le bureau
au pied du lit
sur l’herbe mauve
les guirlandes
Le poème Extase publié dans le recueil Le lierre la foudre (Editions de Corlevour, 2011) sera lui aussi dédié à Marcelin Pleynet.
Autrement dit, c’est toujours pour moi, à chaque reprise d’un livre de Pleynet et à chaque rencontre avec lui, un état neuf du langage qui se dessine, un espace stimulant qui se crée. J’écoute et je sais, je traverse ce que je sais, dans une accélération d’images ou dans la lenteur, dans une foule énorme de moments, dans un temps sans durée.
...
Vies misérables/Poésies misérables… La poésie, hors-jeu et dans le secret du jeu, Pleynet la conçoit comme passage d’un monde muet et idolâtre à un monde sensible saisissant l’oreille et le regard.
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A la fin des années 70, inscrit à l’Université de Paris VIII Vincennes, j’assiste au cours des sinistres hégéliens/marxistes Jacques Julliard, Jean Elleinstein, Madeleine Réberioux et Henri Weber qui, avant de se découvrir social-démocrate et de siéger au Sénat, dirige avec Krivine la LCR. Il me dédicace un de ses livres Changer le PC : A Pascal Boulanger, eurocommuniste de choc, en souvenir de nos débats, et dans l’espoir que du dedans et du dehors on finira tout de même par changer le PC. Amicalement.
Changer le parti communiste, changer la vie ? Tout ce qui ressemble à de l’espoir ne constitue-t-il pas le signe que le présent et l’exercice de la vie ne vont pas de soi ? Je ne resterai pas longtemps ami des ligues, quelles qu’elles soient. Laissant au devenir son innocence et au hasard sa chance. Le monde est une histoire racontée par un idiot, pleine de bruit et de fureur, et qui ne signifie rien.
...
Depuis la parution de Provisoires amants des nègres, les livres de Pleynet signent une odyssée du nom propre sous l’éclairage de la pensée. Ils tiennent la poésie en éveil, même quand ils prennent la forme d’un essai et du journal. Ils envisagent la poésie comme un savoir du monde, dans un carrousel de traits décalés sur la page, agissant par secousses, condensations, illuminations. Pour que le monde retrouve la vieille incohérence qui le fonde, il faut que l’écriture fasse retour à l’origine en brisant le lien social. Ce qui devient alors déterminant, c’est la liberté de son propre être essentiel.
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J’au eu la chance d’être abordé par des visages et des livres. Pour brûler sans agir, pour tuer le monde et ses convulsions folles et fermées. Même si je sais que, demain, je risque de retomber en servitude, sollicité par quelque famille d’opinions encline à l’hostilité rageuse ou douceâtre des prédicateurs de l’action.
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La poésie doit dévoiler l’histoire et l’histoire qui se dévoile poétiquement n’est évidemment pas l’histoire des historiens. Elle est l’expérience singulière du temps, c'est-à-dire la façon dont le temps est vécu dans le vécu du temps. Elle est aussi, et je pense au livre central de Pleynet : Stanze, épopée musicale jouant sur les harmonies et les dysharmonies prosodiques.
Heidegger : La poésie n’est pas simple ornement qu’accompagnerait la réalité humaine, ni simple enthousiasme passager, elle n’est pas du tout une simple exaltation ou un passe-temps ; la poésie est le fondement qui supporte l’histoire.
La poésie fonde l’histoire et tenter une fondation poétique de l’histoire, c’est ouvrir un monde, un présent du monde à chaque fois singulier, que les événements intimes et collectifs, dans une succession muette, recouvrent. Mais n’est-ce-pas aussi s’opposer à une communauté de destin basée sur le sacrifice et la guerre ? N’est-ce-pas se démarquer du site d’un monde historique commun dans lequel, justement, s’est égaré et compromis bassement Heidegger qui, en refoulant le judéo-christianisme, a souhaité unifier une communauté de langue recevant sa loi du poète et de l’homme d’Etat ?
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(…) Comment lire Rimbaud ? Artaud ? Comment traiter la folie qui pourvoit d’otages ces misérables ? Comment quitter ce continent ? (Pleynet).
En effet, comment quitter ce continent et le dix-neuvième siècle comme technique de l’ennui, sinon en proposant une écriture qui pense sa dépense ? Et comment ne pas être chassé de sa propre parole, comment rester vivant à force de paradoxes ? Pleynet ne s’est jamais identifié au milieu d’où il était censé venir ni à la misère qu’il traversa en faisant ses premiers pas à Paris. Pleynet ne sera pas assimilable. il n’y a pas de mère-patrie dans ses livres, mais le rejet radical de la société française, celle qui s’impose après la seconde guerre mondiale et pendant la guerre d’Algérie, un rejet des compromis et des marchandages, un refus de se laisser enfermer, fût-ce à l’intérieur de Tel Quel et de L’Infini. Il s’agit pour lui de se dégager des affaires de famille – du fascisme, du stalinisme – de se dégager d’un monde rongé par le négatif. Pour lui, toute création poétique nait de la ferveur pensante du souvenir et il s’agit de penser, à l’intérieur du déjà-pensé, le non-pensé qui s’y cache encore.
Les trois livres (Seuil), Fragments du chœur (Denoël), Plaisir à la tempête (Carte blanche), Le Propre du temps (Gallimard), Notes sur le motif (Dumerchez), Le Pontos (Gallimard) et tout autant les livres consacrés à la peinture et à la littérature participent à cette révolution poétique, inaugurée par Lautréamont et par Rimbaud, qui doit être comprise au sens étymologique des mots « qui fait retour ». Ce qui oublié, et oublié dans les œuvres lues, fait retour dans le temps. Il ne s’agit plus, à partir de là, de savoir si la poésie est admissible ou inadmissible, si elle participe ou non de l’impossible, elle est – écrit Pleynet – qu’on le veuille ou non, une fois pour toutes et par essence, de tous les possibles dévoilés.
L’écriture de Pleynet n’a rien à voir avec l’affairement autour de la question poétique, qui révèle trop souvent le nihilisme acharné de ceux qui jouissent de leur manque et de leur misère. La niaiserie poétique (qui peut très bien s’inclure dans un jeu formaliste) accepte un monde sans questions ni tentatives de réponses. C’est d’une autre partition dont il s’agit ici, où la pensée s’insère dans l’exercice de l’existence et de la liberté, et de l’aventure poétique qui en découle.
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Prendre congé du siècle. En lisant donc tous les livres de Pleynet, conçus comme une éthologie, une composition de vitesse et de lenteur où les lignes de force qui se déploient sont des sillages de lumière et de couleur. Le champ qui s’ouvre est centrifuge, étendu, complexe. Et l’émotion méditée, l’éclat et le roulement des mots, le feu jusqu’au blanc des cendres sont des défis au nihilisme et à la logique interne de notre histoire dans laquelle tout le monde se ressemble et agit de même.
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L’homme Pleynet en trois mots ? Fidélité, écoute, générosité.
Allez y voir vous-même, si vous ne voulez pas me croire.
© Pascal Boulanger, Revue FAIRE PART n° 30 / 31 - Printemps 2012
ITINÉRAIRES DE MARCELIN PLEYNET
(avec l’aimable autorisation de son auteur)
Pascal Boulanger est écrivain. Il a publié des chroniques et des entretiens dans de nombreuses revues et notamment sur Marcelin Pleynet. Son intervention à la Sorbonne en 2004 sur Rimbaud et Pleynet a été publiée dans le recueil critique : Suspendu au récit, la question du nihilisme (Comp’Act, 2006).
Il est l’auteur de plusieurs livres parmi lesquels : Martingale (Flammarion), Une action poétique de 1950 à aujourd’hui (Flammarion), Tacite (Flammarion), Le Bel aujourd’hui (Tarabuste), Jongleur (Comp’Act), Jamais ne dors (Corridor bleu), Un ciel ouvert en toute saison (Corridor bleu) et Le lierre la foudre (Editions de Corlevour).
Prochaine publication : un livre d’entretiens avec Jacques Henric.
revue faire part - 8 chemin des Teinturiers 07160 Le Cheylard
TD 04 75 29 41 36 - TM 06 86 41 97 77
21:38 Publié dans Marcelin Pleynet, NOTES DE LECTURES/RECENSIONS, Pascal Boulanger | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer | | Facebook
01/03/2012
Charles Péguy, Jean Paulhan (lectures de Pascal Boulanger)
Celui qui reçoit est reçu.
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■■■ On mesure les enjeux existentiels d’une phrase comme celle-ci : Celui qui reçoit est reçu. L’hospitalité pour Charles Péguy est avant tout une décision. Elle engage une vie qui, en se voulant chrétienne, contemple et imite la Passion du Christ, autrement dit intègre et traverse ce signe de contradiction qui, en dévoilant et en renversant la nuit du monde, fait perpétuellement scandale et folie aux yeux des modernes. Il s’agit de convertir le négatif en positif, la Croix en rédemption. Avec sa verticale épiphanique contredisant son horizontale d’endurance et de limitation, la Croix est à l’image de notre condition. Et seule la parole vivante nous précède et nous connait d’avance.
Jésus-Christ n’est pas venu nous dire des fariboles (…) ne nous a point donné des paroles mortes / que nous ayons à conserver dans de l’huile rance / comme les momies d’Egypte / Il nous a donné des paroles vivantes / à nourrir.
L’hospitalité de la parole est tout d’abord l’acte par lequel celui qui reçoit la parole divine est entendu. Et, en étant entendu, libre lui-même d’engager, en écho, sa propre parole. Elle est ce que Péguy nomme un trésor de grâce. Une grâce qui coule éternellement en étant éternellement pleine. Et qui rayonne, en nous même et au-delà de nous même, nous reçoit et nous accueille – sans la communication réduite au calcul et au rendement – pour mieux résonner en toute langue. Dès le premier chapitre de son essai : L’hospitalité de la parole, Péguy entre littérature et philosophie, Charles Coutel souligne que, en se tenant aux frontières des genres, Péguy demeure irréductible aux disciplines instituées. La pensée renvoie à une épreuve vécue et à une filiation assumée, elle hérite sans s’habituer et dépasse la clôture individuelle et celle d’une modernité soumise aux tentations réductrices. Péguy est un des premiers à comprendre que la parole divine, comme la parole poétique, n’a plus de place dans le monde démagogique du positivisme. Les nouvelles instances qui s’imposent : l’argent, la technique, l’idéologie, oblitèrent une vie consciente et active. On ne comprend la parole qu’en parlant, on ne comprend l’amour qu’en aimant et on doit ne jamais rien écrire que ce que nous avons éprouvé nous-mêmes. L’inadmissible pour Péguy, lecteur attentif de Bergson, se situe dans cette dichotomie devenue insurmontable : Le spirituel est constamment couché dans le lit de camp du temporel.
Ce rapport charnel à la parole qui parle dans l’histoire de chacun et dans celle de la France trace une mystique qui s’oppose à la politique (à la matérialité de ce qui est médiocre et corruptible) et qui doit donner naissance à une inquiétude, un ébranlement, une émeute du cœur.
Qu’est-ce qu’une pensée qui n’aurait pas de cœur ? Et qu’est-ce qu’un cœur qui ne serait pas éclairé au soleil de la pensée ?
Et bien, cette pensée sans cœur, c’est notre actuel monde muet, niant toute dette à l’égard du passé et dans lequel la foule fondue dans le tout social commerce avec la finitude. Ce sont les fausses urgences de l’actualité, la toupie folle des rivalités, la montée aux extrêmes, l’affreuse pénurie du sacré, l’homme moderne ne se prosternant que devant lui-même. C’est la décomposition du parlementarisme et du socialisme officiel (la polémique avec Jaurès), l’idéologie de la caisse d’épargne et de la recette buraliste, le prêtre d’argent à la place du prêtre.
La grandeur de Péguy se situe dans la trahison, dans le refus de partager le repas sanglant. La poésie et la pensée dessinent alors des lignes de fuite souveraines.
Je trahis en beauté tous ceux qui font partie d’un monde qui se trahit.
***
■■■ L’hospitalité est une grâce que Patrick Kéchichian honore dans son art du portrait. Il est un des rares et précieux critiques littéraires qui sait lire d’homme à homme, dans une approche qui procède par des avancées inattendues et délicates, par des regards vers un visage dont l’effacement dissimule le secret. Il s’agit alors de regarder la vérité d’un être et d’une personne sans les emprisonner dans le corps imaginaire d’une fiction dont quelque biographe s’instituerait le maître (à propos d’Ernest Hello dans son essai : Les usages de l’éternité).
Le portrait qu’il consacre à Jean Paulhan ne prend pas la pose. Il suggère, dans le repentir de l’écriture, des déplacements continus, des angles de vue inexplorés, à l’image du bric-à-brac des virtualités existentielles qui ne se réduit pas au métier, au social et à sa représentation, avec son lot de compromis inévitables et parfois de bassesse. Kéchichian ne tient pas le discours d’un expert fixé à des certitudes ou à des partis pris esthétiques ou idéologiques. Bien sûr, les querelles, les conflits, les polémiques, les alliances avec le milieu littéraire et artistique et aussi les choix politiques, les amitiés, les amours, tout ce qui traverse une vie concrète et engagée est précisé. La matière de cette vie prend appui sur des témoignages variés (ceux de Georges Perros, Pierre Oster, Dominique Aury, Henri Michaux notamment) mais l’essentiel, d’après moi, se situe dans ce qui fait passage.
Car le portrait est toujours inachevé, gommé, transformé, suspendu à des incertitudes, des paradoxes, des questions… travaillé par la notion même du repentir, celle de Montaigne :
Je ne puis assurer mon objet. Il va trouble et chancelant, d’une ivresse naturelle (…) Je ne peins pas l’être, je peins le passage.
Patrick Kéchichian fait, à sa manière, l’éloge de l’inconsommable (titre d’un très beau livre de Jean-Clet Martin aux éditions de l’éclat). Il sait que l’existence la plus achevée reste une œuvre ouverte, se composant d’instants dont aucune biographie ne possède la vérité ultime. Sa lecture sait ouvrir les perspectives d’une vie infinie.
© Pascal Boulanger, Les carnets d’eucharis, mars 2012
_________________________________________________________________
Charles Coutel : Hospitalité de Péguy (Desclée de Brouwer).
Patrick Kéchichian : Paulhan et son contraire (Gallimard, coll. L’un et l’autre).
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28/02/2012
Philippe Delaveau, Ce que disent les vents (une lecture de Pascal Boulanger)
■ Philippe Delaveau, Librairie Gallimard, 2008
PHILIPPE DELAVEAU
poèmes
Ce que disent les vents
Editions Gallimard
2011
■ Extraits des poèmes
Le Nil
La forêt
Marcher
La pluie (II)
■ La voix du vent là-bas,
dans ses lointains pays
LE NIL
Après avoir déployé ses anneaux dans les sables,
connu le secret des Grands Lacs – l’Afrique y pousse
vers l’autre vie la barque de ses morts –, le fleuve
atteint l’encrier du delta, peuplé de roseaux frêles,
face à l’indigo de la mer. Je suis le fleuve,
non le désordre. La progression du temps et la placidité,
non pas rien. Non pas chose inutile et vaine. Comment traduire
l’appel qui me traverse ? L’eau toujours me revient,
les larges palmes des colonnes, ciel sombre,
ciel de bleu sombre aussi ne sont pas rien. Je suis le fleuve.
Quelque chose promise, étoile de coton, fécondité,
paix magnanime sur les sables stériles, chemin stable,
signe précis, signe éternel. Je suis le fleuve.
Le secret d’où je viens, l’énigme qui me pousse, la vie
autour de moi qui fut, règne et sera, selon l’hégémonie du verbe,
le jeu libéré de mes formes, la voie qui me délivre
ne récusent le temps, l’espace ni le jour. Le soleil m’accompagne.
La mer où je vais boire achève la fusion entre les signes et les
choses.
Ma dynastie s’ébranle, j’habite l’origine, un poète
mesure l’opulence et la parcimonie de mon chant. Pose la lune
de son poème sur mon étrange solitude et le désert. J’épouse
l’aube
chaque matin. Je suis le fleuve, l’ordre, et j’ai su la beauté.
(p.29/30)
■ Ici :
la voix du vent retour d’exil
LA FORÊT
[…]
A ce concert irréfutable, j’offre le métal frêle du pupitre
et les rails d’une partition vers le haut. Forêt obscure,
hantée de voix, beau refuge. Empêtrée dans l’attente.
Flotte secrète à l’ancre des saisons.
Anéantie parfois, éveillée par la sève, revigorée par l’équipage
du printemps. La lumière se fraie
un blond passage dans la matière, les arbres grincent,
rejoignent l’altitude en gravissant l’arpège, font le gros dos
comme les chats sur le rebord du ciel
où le soleil décline après avoir vécu.
Se dressent comme nous, déchiffrent comme nous l’inaltérable
bleu. Et de leurs mains, profondément, fouillent la terre,
comme un malade en contournant des doigts le bord du matelas
cherche dans le froid du dessous, près du sommier,
un leurre à son délire.
(p.67)
MARCHER
Marcher parfois longtemps dans la prairie du vent.
Ses bottes malmènent les fleurs,
l’herbe aux rêves de voyage.
Puis le petit village près d’un bois.
L’harmonica d’une eau rapide qui se cache
pour voir le ciel et l’ombre, et les cailloux
entraînés de ferveur, sur leurs genoux qui brûlent.
Entendre alors la persuasion très tendre
et douce d’un oiseau qui solfie les mesures
d’une clairière. Deux fois peut-être. Puis se tait. Se dissout
dans la perfection pure et simple du silence.
(p.90)
LA PLUIE (II)
Maintenant dans les flaques se dilue
le dur monde ancien comme aux poils des pinceaux
la peinture collée qui se détache sous l’essence.
Debout, enfin lavé de mes refus, je m’apprête à la tâche.
Debout sur la terre lavée, Seigneur, je veux chanter
Ta gloire dans la force du vent, composer
nos hymnes parmi les pluies et la mesure, maître enfin
de mon chant dans l’assemblée des arbres et des hommes,
la fraicheur nouvelle et l’odeur neuve du jardin,
sous l’arc dans le ciel neuf comme un luth de couleurs.
(p.113)
Une lecture de
Pascal Boulanger
PHILIPPE DELAVEAU
Ce que disent les vents
Editions Gallimard, 2011
La publication, en 1989, du premier recueil poétique de Philippe Delaveau : Eucharis, avait suscité de vifs débats entre les partisans du formalisme et les défenseurs du lyrisme. Mais face à ce clivage trop scolaire pour être pertinent, ce poète singulier ne s’interdit rien, ni visions, ni célébrations. Il rêvait de devenir compositeur de musique, il est un des poètes les plus singuliers de notre époque. En refusant le tarissement du chant, sa poésie fonctionne par vibration et rayonnement. Elle travaille la nappe lumineuse du temps sensible et c’est dans l’accueil qu’elle prend sa source.
Une main qui soulève un rideau - un jour de pluie - l’automne qui bouscule les arbres d’une ville, du linge aux fenêtres de Naples, le vent qui joue du couteau et blesse un passant, le tramway de Lisbonne planant au-dessus de la mer… Tout règne comme au premier matin. Chacun des poèmes de ce recueil est marqué par de grands voyages et par l’appel du réel. Tous, en surmontant les intrigues d’un monde désacralisé, renvoient aussi bien aux leçons d’agonie qu’à la gloire vibrante et fragile du jour. Une poétique de la relation prend toujours un risque, celui de s’ouvrir au plus haut afin que nos sensations de lecture résonnent dans la durée. Même s’il sait que la mort se glisse dans nos voix, Delaveau est à l’écoute des moindres détails qui vibre dans le dedans et le dehors de l’existence.
« le corps pesant nous ramène à la terre. A la poussière. / Au chant terrible du silence et des cyprès. Quenouilles / sans objet, doigt d’ange, aiguille tutoyant l’invisible ». La célébration fait du moindre fragment de l’univers un éveil au sens. A travers un vers ample et un souffle attentif aux moindres variations des paysages et des visages, cette poésie fonde un acquiescement dans l’énumération et dans l’exaltation qui sont un hommage à la beauté des choses.
© Pascal Boulanger, Les carnets d’eucharis, N°32 (Hiver 2012)
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04/07/2011
Pascal Boulanger, le lierre la foudre (une lecture de Brigitte Donat)
Comment la poésie rencontre-t-elle l’histoire et permet-elle à la littérature de dévoiler l’envers d’un monde que ronge le nihilisme ? Pascal Boulanger poursuivait déjà cette question dans un précédent recueil poétique, Tacite (Flammarion, 2001) : il révélait l’histoire comme une reconduction de l’enfer. Cette vision s’approfondit avec le Lierre la foudre ; elle met à nu le fondement anthropologique de toute société selon lequel chaque communauté se fonde sur un crime commis en commun, dresse la généalogie d’un effondrement qu’inaugure le siècle des Lumières, met en abîme le déclin du père symbolique que creuse une insondable absence. Le dévoilement est accablant, notre modernité n’en finit pas de s’enliser au sein d’un mécénat maternel qu’accompagne un retour au paganisme et à sa violence généralisée.
« Mollesse / débordement / Quand le monde offert à la prise / à la consommation / efface les limites / qui paie sa dette / qui paie le prix d’être soumis au langage ? »
S’il est impossible d’échapper à la comédie sociale, l’aliénation cesse pourtant dès qu’un être s’éveille au jeu désintéressé de l’amour quand il est sans négoce et sans ressentiment. La vie de chaque homme peut alors s’opposer à la totalité hégélienne et, dans ce retrait, annoncer : je suis l’esprit qui toujours affirme. Son langage alors souverain, dans l’écart et la solitude, s’arrache à la fatalité du malheur et renverse la malédiction en exultation. Quand le poème se pense et s’écrit, l’existence d’un être n’est plus saturée ni close, puisque le langage excède le monde. Le vers apparaît comme un trait, chaque parole se détache, fait saillie dans l’art de la notation sèche. Composé comme une fresque, ce recueil n’en n’est pas moins diffracté afin que chaque poème, avec son titre et souvent sa dédicace, s’impose comme un îlot. Pascal Boulanger, de cette manière, rend hommage, de personne à personne, de livre en livre, dans et par le langage, à de nombreux noms – Marcelin Pleynet, Pierre Legendre, Jacques Henric, Claude Minière, Philippe Muray – qui, dans leurs singularités, sont autant d’expériences incomparables et de vérités pratiques qui permettent d’accéder à la connaissance du pire sans exclure le chant de l’affirmation. C’est dans ce continuum du poétique comme du politique que le poème déploie un dispositif chant/critique. À l’horizontalité de la série et du nombre se dresse la verticalité de l’oeuvre, qui s’ouvre au deuil fécond de l’héritage. En effet, la bibliothèque s’oppose au dressage social et permet au poète d’être écrit par ce qu’il lit. Les visions de l’écriture appellent une exigence éthique où la poésie est envisagée comme l’essence même d’un langage qui prophétise, rayonne et résonne.
Dans un contexte de relectures théologiques et en prenant appui sur les pensées de Chestov et de Kierkegaard, Pascal Boulanger rétablit la suprématie d’une pérennité christique à contre-courant du contexte poétique, qui, l’ayant refoulé, s’est attaché essentiellement au monde grec et à la pensée heideggérienne. Ce n’est donc pas anodin si les éditions Corlevour, dont les travaux tournent autour du christianisme, publient ce livre. À notre temps qui, sous prétexte de « lumière », s’est engagé dans l’ignorance, Dieu apparaît comme l’unique signifiant capable d’opposer sa transcendance à l’immanence de la barbarie communautaire.
« Le Nom au centre de tout / qui assume tout / porte tout / souffre tout… croit encore à l’échec des échecs. »
L’expérience du défaut de Dieu n’est pas celle de sa radicale absence. Soutenir son deuil, au contraire, renforce son attrait, et du Dieu sans visage, de son regard invisible, s’impose un éloignement qui trace un chemin. Le retrait de Dieu ne signifie pas que l’amour passe hors-jeu, mais indique le visage actuel de son insistance, de sa fidélité à travers son refoulement même. L’histoire, parce qu’elle est endurée, sera ainsi traversée, soutenue par l’espérance qui croit dans la promesse de l’impossible.
« Qui frappe là où il n’y a pas de porte… pour nous faire entendre / que l’impossible devient possible / quand Isaac est rendu à Abraham… »
Puisque la foi ne repose sur rien, sur l’insensé, elle est le levier qui suspend un instant les fracas de l’histoire, la violence de son mouvement. À l’interruption momentanée de l’histoire, à l’histoire devenue un instant l’impossibilité de l’histoire, se produit le vide où la catastrophe hésite à se renverser en salut, où, dans la chute, s’opère la remontée et le retour.
« Quand tout est impossible, alors la parole prophétique affirmant l’avenir impossible, dit aussi le “pourtant” qui brise l’impossible et restaure le temps » (Maurice Blanchot).
Le Lierre la foudre recompose un monde dans son ultime poème qui a pour titre emblématique Prophétie. « Des chants monteront des voûtes / des rebelles vivront cachés et goûteront l’esprit d’un monde jamais perdu / des bibles vivront dans des échoppes / des soleils éblouis d’herbes et de fleurs renverseront le paysage. » Brigitte Donat
Cette recension vient de paraître dans la revue art press n°380
le lierre la foudre - éditions Corlevour, 2011
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10/04/2011
Pascal Boulanger, le lierre la foudre
L E POÈME de Pascal Boulanger est sur la page, avec son titre, souvent sa dédicace, comme un tableau de chevalet qui, à travers les noirs et les trouées lumineuses, souhaite créer un effet abîme.
Et il nous pose ces questions : comment poursuivre son existence en refusant les rythmes violents de l’Histoire ? Comment se libérer de la temporalité et de la mondanité tout en étant soucieux d’un monde pris dans sa part d’abjection et de gloire ?
À travers cette suite de poèmes, Pascal Boulanger poursuit son questionnement sur notre temps, celui du Dieu en retrait et celui de la détresse. Mais l’expérience du défaut de Dieu n’est pas celle de sa radicale absence. Marqué par les travaux de Léon Chestov, de Nicolas Berdiaev ou encore de René Girard, Pascal Boulanger affirme que le présent du poème doit soutenir ce deuil et tendre, dans la tension de la pensée, vers une possible espérance.
Dans un monde qui semble espérer contre la beauté des choses, c’est une métaphysique de l’exil et du refus qui se dessine ici. Mais la mise en scène du négatif n’est pas elle-même le négatif puisqu’elle tente de le traverser et de le dépasser en faisant du moindre fragment de l’univers un éveil au sens et aux sensations.
La figure du Christ, souvent présente, renvoie aussi bien aux leçons d’agonie qu’à la gloire vibrante du jour car rien n’est plus beau – comme le dit la phrase de Kierkegaard placée en épigraphe – que la promesse de l’impossible.
Si le poème est l’invention d’une autre scène que celle des convulsions sans fin du monde, la fresque proposée dans ce livre dévoile les paradoxes et fait entendre les déchirures et les impasses de notre époque. Cette scène n’en montre pas moins la merveille du simple, le surgissement de l’inattendu et la grâce d’un présent qui s’offre dans sa présence.
Pascal BOULANGER est bibliothécaire en région parisienne. Il a publié articles et poèmes dans des revues telles que Action poétique, Artpress, Europe, La Polygraphe... Parmi ses derniers livres – recueils ou essais : Un ciel ouverten toute saison (Le corridor bleu, 2011), Jamais ne dors (Le corridor bleu, 2008), Fusées et paperoles (L’ Act Mem, 2008), Suspendu au récit... la question du nihilisme (Comp’Act, 2006), Jongleur (Comp’Act, 2005).
EXTRAIT
SARAH
Dans la ville
rien ne change
le boniment mondial de la publicité
le gauchisme comme réponse mimétique au fascisme
la magie quotidienne du mal
Pourtant
dieu ne prend pas plaisir au sang
le détachement se gagne par le haut
le sublime est musical
comme ici
quand le chant qui s’élève du parvis
prend la fuite
dans l’église décorée en salle des fêtes
quand la chute
abrupte
soudaine
inattendue
ressuscite Sarah
dans la lumière de Chagall.
Parution en mai 2011
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06/01/2011
Eté II, Bernard Chambaz (une lecture de Pascal Boulanger)
NOTE DE LECTURE
(Pascal Boulanger)
Bernard Chambaz : Eté II
Ed. Flammarion, 2010
Ce volume annonce une reprise au chant VI d’une investigation minutieuse qui a pour point de départ tragique la mort d’un fils adolescent. Ce fils – Martin – devient en poème le m-pêcheur, le poisson volant.
Le poisson volant vient de Platon / il brille mais il n’a pas beaucoup de temps pour briller.
Il faut entendre ce titre comme un retour, jamais oublié, à l’été accidentel mais aussi à ce qui a été, une fois pour toutes, lancé dans la vie, dans la litanie des jours et des nuits.
Soutenir cette douleur, dans le déploiement et le froissement du temps, ne lève aucune fixation, n’entraîne aucune consolation. C’est la mort / qui l’aura emporté / sur les mots.
Elle dévoile, par contre, l’excès en chacun de nous, cet abime d’existence infinie, cet amour long, cet amour à vif quand le courage consiste moins à combattre qu’à endurer. La répétition du deuil, dans le temps soudain suspendu, impose soit le silence absolu, soit le discours extensif proche des choses et des êtres et qui, sans masquer la détresse, la marque au contraire doublement.
Les poèmes de Bernard Chambaz, en prose ou versifiés, amples ou resserrés sont des décantations de ce qui agite et obsède. Ils passent de la perfection du monde à son imperfection, ils croisent une foule d’écrivains et de penseurs : Pétrarque, Descartes, Hegel, le tombeau d’Anatole de Mallarmé, Pound… Ils traversent des villes et des ciels, relancent des tensions, des hantises, creusent l’absence tout en évoquant la volupté de l’instant et tiennent tête à l’esprit et au cœur à jamais endeuillés. Ils rendent aussi hommage à la femme aimée, à celle qui n’écrit qu’en pensée, qu’en secret à son fils perdu. Et nous, lecteurs plus ou moins malheureux, prenons appui sur ces dix profonds chants au savoir fondamental pour saluer – malgré tout – le simple fait d’exister.
© Pascal Boulanger, Carnets d’eucharis, janvier 2011
15:48 Publié dans NOTES DE LECTURES/RECENSIONS, Pascal Boulanger | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer | | Facebook
20/11/2010
Pascal Boulanger
Moi, si je retiens les sensations traversées c’est pour qu’elles ne basculent pas dans l’oubli.
Et sous le ciel de vos yeux, parfois bleus, parfois gris, le poème n’est que le couronnement du jour qui passe.
Pascal Boulanger © Carpe Diem vent de terre, 2010
……………………………………………………………………………….
Cette plaquette a été publiée par Nicole et Georges Drano,
dans le cadre des lectures à Frontignan et à Lodève.
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08/10/2010
Pascal Boulanger, Un ciel ouvert en toute saison
le corridor bleu vous propose en souscription
Pascal Boulanger
Un ciel ouvert en toute saison
Ceux qui ont aimé les précédents livres de Pascal Boulanger seront surpris par le changement de ton et le régime très différent de l’écriture de Un ciel ouvert en toute saison. En effet, ce texte s’adresse à ses deux filles adolescentes, et le ton est celui d’un legs difficile à transmettre, celui d’un ciel désencombré des sirènes fallacieuses qui les menacent. La prose se fait ici prudente, se sachant épiée par des êtres encore fragiles face à l’inconnu et à l’incertitude quant à l’avenir. La beauté de ce texte vient de la fragilité de sa communication avec cette jeunesse plongée dans un monde où tout va à vau-l’eau et où tout sentiment est suspecté d’irrationalité :
L’amour que j’ai pour vous, je voudrais qu’il ne soit pas simplement un sentiment, mais aussi une puissance capable de triompher de la peur.
Admirable et émouvante prière d’un père et d’un poète qui se fait proche de sa propre jeunesse héritière du pire, mais aussi de Rimbaud qui lui apprit à saluer la beauté, en dépit de ce qui enlaidit, massacre et humilie l’élan de nos facultés. Quelle belle injonction au dégagement rêvé prôné par le poète de Charleville dans Génie, que cet incipit de Un ciel ouvert en toute saison :
Quand vous serez tout simplement là, lancées dans notre monde, dressées sur notre planète rocheuse ; prenez soin de vos âmes, suivez le meilleur du présent, oubliez le temps sur le fil au-dessus du néant.
À la lecture de ce livre, le lecteur ne pourra que souhaiter que ce vœu soit entendu et exaucé : puisque vous êtes merveilles – éternellement – dans la prolifération inattendue du simple.
Un texte simple en profondeur, comme un bel horizon.
Gilbert Bourson
Date de parution : Décembre 2010. ï 56 p. ï 10 € ï Port offert.
Règlement par chèque à l’ordre du corridor bleu 185, rue Gaulthier de Rumilly 80000 Amiens.
nom prénom adresse
nombre d’exemplaires signature |
L’auteur Pascal Boulanger, né en 1957, vit et travaille à Montreuil. Parallèlement à son travail d’écriture, il cherche depuis une vingtaine d’années, à interroger autrement et à resituer historiquement le champ poétique contemporain qui, pour lui, passe par la prose. Marqué par la poésie rimbaldienne et le verset claudélien, il a donné de nombreuses rubriques à des revues telles que Action poétique, Artpress, Le cahier critique de poésie, Europe, Formes poétiques contemporaines et La Polygraphe. Il a été responsable de la collection Le corps certain aux éditions Comp’Act. Il participe à des lectures, des débats et des conférences en France et à l’étranger et il a mené des ateliers d’écriture dans un lycée de Créteil en 2003 et 2004. Il a publié des poèmes dans les revues : Action poétique, Le Nouveau Recueil, Petite, Po&sie, Rehauts… Parmi les études qui lui ont été consacrées, signalons celles de Gérard Noiret dans des numéros de La Quinzaine Littéraire, de Claude Adelen dans Action poétique, d’Emmanuel Laugier dans Le Matricule des anges, de Bruno Cany dans La Polygraphe, de Serge Martin dans Europe et une analyse formelle de Jean-François Puff (sur le recueil : Tacite) dans Formes poétiques contemporaines. Bibliographie de Pascal Boulanger
Poésie Septembre déjà, Europe-poésie, 1991. Martingale, Flammarion, 1995. Le bel aujourd’hui, Tarabuste, 1999. Tacite, Flammarion, 2001. L’Émotion L’Émeute, Tarabuste, 2002. Jongleur, Comp’Act, 2005. Jamais ne dors, Le corridor bleu, 2009. Cherchant ce que je sais déjà, L’Amandier, 2009. L’échappée belle, Wigwam, 2009. Prose Une “ Action Poétique ” de 1950 à aujourd’hui, Flammarion, 1998. Le corps certain, Comp’Act, 2001. Les horribles travailleurs, in Suspendu au récit…, Comp’Act, 2006. Fusées & Paperoles, L’Act Mem, 2008.
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27/09/2010
Temps mort, Paul de Brancion
NOTE DE LECTURE
(Pascal Boulanger)
TEMPS MORT
Paul de Brancion
Editions Lanskine, 2010
Temps mort doit se lire comme une approche de notre actualité la plus symptomatique, comme une traversée du nihilisme. Plié de ressentiment sous un monde en lambeaux, le dernier homme se précipite dans la dévastation sans l’attente d’autre chose, surtout pas d’un salut et dans l’hallucination froide et méthodique.
Paul de Brancion, depuis Tu-rare, trace la figure moderne de la mort et de l’apocalypse, en traits noirs et sans complaisance. Le mal exerce sa magie quotidienne, l’impatience de la technique et la corruption en marche oblitèrent le sensible. Pour Claudel, le pire n’est jamais sûr… Le pire est déjà arrivé pour Brancion.
Il a les pieds sur la table, un slip noir.
Il porte le deuil de ce jour.
La lune n’est pas encore levée,
Aucune lumière ne semble devoir surgir d’un tel entrelacs
De situations, de peines, de fautes, de cocasseries.
Temps mort / temps vivant : deux photos de Joseph Barrak représentant un bédouin portant un enfant mort tracent un écart de moins en moins perceptible entre ce qui se déploie et ce qui s’obscurcit.
© Pascal Boulanger, septembre 2010 (Les Carnets d’eucharis)
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17/09/2010
A la santé des poètes, avec Pascal Boulanger et Jean Pérol
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08/03/2010
Pascal Boulanger
POESIE
Pascal Boulanger : de la lecture&de la critique
Contribution de Nathalie Riera
Durant la décennie qui vient de s’écouler, trois des livres de Pascal Boulanger me semblent emblématiques de ce qu’un art poétique peut contenir comme art critique. Sur ce sujet, Baudelaire ne manquerait pas de nous rappeler que « tous les grands poètes deviennent naturellement, fatalement, critiques. Je plains les poètes que guide le seul instinct : je les crois incomplets. »
Pascal Boulanger est un écrivain engagé mais sans engagement partisan. Autant dans ses trois livres : Une Action poétique de 1950 à aujourd’hui et Suspendu au récit – la question du nihilisme (livre collectif conduit sous sa direction), que dans toutes ses chroniques et ses entretiens avec des auteurs différents (notamment Marcelin Pleynet, Clément Rosset, Henri Deluy et Yves di Manno) rassemblés sous le titre Fusées et Paperoles, sans oublier l’ensemble de ses articles consacrés à la littérature contemporaine et publiés dans des revues comme Art Press, Europe, Action Poétique… tout le travail d’analyse de Pascal Boulanger s’établit sur le terrain non pas des clivages scolaires sur la poésie, mais sur celui de la demeure du poète dans sa relation à l’Histoire. D’un livre à un autre, ce qui s’affirme sans relâche (et sans n’être jamais de l’ordre d’une vulgaire redite) est la question du nihilisme et des diverses intimidations de notre époque, question « indéfiniment ouverte et sans cesse à reprendre », dixit son contemporain Philippe Forest.
Un demi-siècle plus tôt, l’une des questions de Hannah Arendt dans La crise de la culture était déjà de questionner l’état de nos consciences, à savoir de quelle histoire ont hérité les esprits modernes ? Question qui en ce début du XXIème siècle ne concerne toujours pas le plus grand nombre ; ou dès lors qu’elle se pose à la conscience contemporaine comme un problème, fait se réduire la réponse à un ensemble de succédanés, qui ne fait que renforcer le vide. Les similis de la pensée ont toujours la part belle.
Etre au fond du malheur aujourd’hui, ce n’est plus à l’instar d’Ingeborg Bachmann : s’éveiller tranquillement, et sentir que désormais « ma science est profonde, et je suis non perdue ». Quelque chose semble avoir perdu son pouvoir sur l’esprit des hommes. Dans l’usage du faux qui caractérise désormais notre actualité, nous dit Pascal Boulanger, comment en effet surmonter l’effondrement, dont les effets à long terme ne peuvent que nuire à la dimension de la profondeur humaine. Comment traverser le pire sans s’identifier au négatif ? Comment « habiter en poète » (Hölderlin) ?
A la question ouverte du nihilisme qui, faut-il le rappeler, est inhérent à toute société, et non à la pensée savante ou la pensée rebelle, Pascal Boulanger constate : « La poésie française, qui demeure très au-dessous des enjeux contemporains, sort de ces dernières années en ne sachant plus ce qu’est l’histoire. ». Avec lui, le chant ne peut se déployer qu’à la condition d’y inclure la critique pour saisir « le lieu et la formule ». L’antiquité classique grecque avait déjà sa propre réponse, tandis que l’homme de la modernité est considéré « en danger d’oubli », l’oubli de l’essentiel, pourrait-on préciser. Homme privé de la dimension de la mémoire, dévoyé dans une culture ruinée au profit du loisir : l’homme en tant qu’humain et nature vivante n’est pas l’affaire de la multitude ; il semble d’ailleurs peu enclin, à la manière d’un Kafka, à se savoir « une mémoire devenue vivante, d’où l’insomnie ».
Une manière de lire ? Une manière de critiquer ? Une manière de dire ? Il y a chez Pascal Boulanger ce que Jacques Henric a très justement formulé : « … un écrivain ayant lui-même la pratique de la poésie (au sens que je tente de donner à ce mot), un homme libre d’attaches idéologiques et institutionnelles, ouvert à des expériences d’écriture parfois à l’opposé des siennes, peu respectueux des frontières entre les genres littéraires, en prise avec le réel de son époque, doué d’une mémoire historique… ».
De son activité littéraire tournée vers les livres et les recueils, les textes et les poèmes, Pascal Boulanger met en place un dispositif critique/chant. Ce dispositif prend appui sur une traversée qui, en s’opposant à la pensée spéculative, prend en compte l’existence dans ses tensions. L’éternel reportage doit alors trouver sa rigueur formelle. Pour lui, pas de classifications arbitraires, pas de mémoires restrictives. Les enfermements ne disent rien sur la complexité des êtres et des situations.
Se tenir loin de toutes les captations, où la lecture devient un espace du renouveau, et le champ de la pensée s’ouvrir sur le livre qui ne forme pas communauté, mais éclair dans la traversée, épiphanie du hors-temps dans le temps des horloges : c’est une manière de lire et de dire Pascal Boulanger.
Nathalie Riera, janvier 2010
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NOTICE
Bio/Biblio
Pascal Boulanger, né en 1957, vit et travaille, comme bibliothécaire, à Montreuil. Parallèlement à son travail d’écriture, il cherche depuis une trentaine d’années, à interroger autrement et à resituer historiquement le champ poétique contemporain qui, pour lui, passe aussi par la prose. Marqué par la poésie rimbaldienne et le verset claudélien, il a donné de nombreuses rubriques à des revues telles que Action poétique, Artpress, Le cahier critique de poésie, Europe, Formes poétiques contemporaines et La Polygraphe. Il a été responsable de la collection Le corps certain aux éditions Comp’Act. Il participe à des lectures, des débats et des conférences en France et à l’étranger sur la littérature et il a mené des ateliers d’écriture dans un lycée de Créteil en 2003 et 2004.
Il a publié des textes poétiques dans les revues : Action poétique, Le Nouveau Recueil, Petite, Po&sie, Rehauts…
Parmi les études qui lui ont été consacrées, signalons celles de Gérard Noiret dans des numéros de La Quinzaine Littéraire, de Claude Adelen dans Action poétique, d’Emmanuel Laugier dans Le Matricule des anges, de Bruno Cany dans La Polygraphe, de Serge Martin dans Europe, de Nathalie Riera sur le site Les carnets d’Eucharis ainsi qu’une analyse formelle de Jean-François Puff (sur le recueil : Tacite) dans Formes poétiques contemporaines.
Certains de ses textes ont été traduits en allemand et en croate.
Livres :
Septembre, déjà (Messidor, 1991)
Martingale (Flammarion, 1995)
Une action poétique de 1950 à aujourd’hui (Flammarion, 1998)
Le Bel aujourd’hui (Tarabuste, 1999)
Tacite (Flammarion, 2001)
Le Corps certain (Comp’Act, 2001)
L’émotion l’émeute (Tarabuste, 2003)
Jongleur (Comp’Act, 2005)
Les horribles travailleurs, in Suspendu au récit, la question du nihilisme (Comp’Act, 2006)
Fusées et paperoles (L’Act Mem, 2008)
Jamais ne dors (Corridor bleu, 2008)
Cherchant ce que je sais déjà (Editions de l’Amandier, 2009)
L’échappée belle (Wigwam, 2009)
Anthologies :
Histoires, in Le poète d’aujourd’hui par Dominique Grandmont, Maison de la Poésie Rhône-Alpes, 1994.
L’âge d’or, in Poèmes dans le métro, Le temps des cerises, 1995.
Grève argentée, in Une anthologie immédiate par Henri Deluy, Fourbis, 1996.
En point du cœur, in Cent ans passent comme un jour par Marie Etienne, Dumerchez, 1997.
Ça, in 101 poèmes contre le racisme, Le temps des cerises, 1998.
Le bel aujourd’hui (extrait), in L’anniversaire, in’hui/le cri et Jacques Darras, 1998.
L’intime formule, in Mars poetica, Editions Skud (Croatie) et Le temps des cerises, 2003.
Dans l’oubli chanté, in « Les sembles » par Gilles Jallet, La Polygraphe n°33/35, 2004.
Jongleur (extrait), in 49 poètes un collectif par Yves di Manno, Flammarion, 2004.
Parmi ses études et ses entretiens :
Henri Deluy, Un voyage considérable, in Java n°11, 1994.
Gérard Noiret, Une fresque, in La sape n°36, 1994.
Marcelin Pleynet, L’expérience de la liberté, in La Polygraphe n°9/10, 1999.
Philippe Beck, Une fulguration s’est produite, in La Polygraphe n°13/14, 2000.
Jacques Henric, L’habitation des images, in Passages à l’acte n°1/2, 2007.
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11/12/2009
Un auteur Une bibliothèque
Pascal BOULANGER
Ecrivain Poète contemporain
(Né en 1957)
U N A U T E U R
U N E B I B L I O T H E Q U E
© Pascal Boulanger
Sur le site Les Carnets d'eucharis
La revue numérique de Nathalie Riera
&
« Sur et autour de Sollers »
espace dédié à Philippe Sollers & animé par Viktor Kirtov
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Dans « La Quinzaine Littéraire » de janvier 1996, Gérard Noiret présente Pascal Boulanger comme « lecteur de Nietzsche (…) de Joyce, de Clément Rosset, mais aussi des poètes comme Pleynet ». Par ailleurs, de Serge Martin on peut lire : « bibliothécaire, poète, lisant, faisant tel jour ceci ou cela… », et aussi, lors d’un entretien en 2005 : « solitaire intempestif en bute à bien des incompréhensions mais une force incommensurable semble tenir son aventure d’écrivain dans une tension vive entre une joie inextinguible et un prophétisme nourri de fusées ». Fameuses fusées qui pourraient aussitôt nous interroger sur l’auteur dans sa manière de nous ouvrir sa bibliothèque en homme d’esprit, autant qu’un certain Baudelaire n’a-t-il pas écrit une partie de ses « journaux intimes » dans le recul nécessaire pour un ton le plus détaché. Car, ici, aucune place à la polémique mais plutôt à une critique qui se veut sans concessions.
Patiente traversée de la « masse des pratiques poétiques contemporaines en France », souligne Claude Minière, pour l’auteur des Fusées et Paperoles ce n’est pas tant de savoir si une œuvre est poésie ou prose. Dans un entretien avec Philippe Forest, pour la revue Art Press en avril 2008, Pascal Boulanger précise :
« Dans mon livre, j’appelle poésie les textes qui fondent l’Histoire. Tenter une fondation poétique de l’Histoire avec ses débâcles et ses joies intimes, c’est ouvrir un monde – un présent du monde – qui marque un acte de rupture radicale avec la logique meurtrière des communautés ». Fusées ξt Paperoles – Editions L’Act Mem, 2008
Extrait chronique de Nathalie Riera in La Pensée de Midi, n°27, mars 2009
⊡A l’avant-première de Vita Nova
Mardi 21 octobre, rue des Ecoles à Paris, dans un cinéma j’assiste à l’avant-première de Vita nova, film de et sur Marcelin Pleynet. Grand film d’un grand poète, sans aucun doute le plus grand depuis la parution, dans les années 60, de Provisoires amants des nègres. Film qui figure l’instant du monde, ici même, à Paris, Venise, Rome.
Les espaces ? des livres. Les livres ? des espaces où enfin l’on respire. Dans la salle, Philippe Sollers. L’essentiel ce soir là de ce que fut, est et sera Tel Quel : l’infini de la littérature ici et maintenant.
Pascal Boulanger
⊡Pascal Boulanger en entretien avec Alain Veinstein
Dans l’émission Du jour au lendemain (41’17) du vendredi 20 juin 2008
Pascal Boulanger / Fusées et paperoles
Les Carnets d'eucharis, décembre 2009
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12/11/2009
Vient de paraître
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19/09/2009
Patrick Kéchichian
NOTE DE LECTURE
Pascal Boulanger
Patrick Kéchichian : Petit éloge du catholicisme
Dans une écriture superbe, Patrick Kéchichian dévoile sa propre traversée en mêlant à la foi la démesure et la raison qu’elle suppose.
Au centre de son propos, il y a ce basculement que la première épître de Saint Jean proclame :
Si ton cœur te condamne, Dieu est plus grand que ton cœur.
Cette conversion du regard porté sur le monde – et sur soi-même – désencombre et déjoue le déferlement du nihilisme au profit d’un appel qui est sortie et abandon joyeux de soi.
A partir d’entrées choisies : louange, modernité, église, colère… Kéchichian montre que la foi n’efface ni crainte ni tremblement mais qu’elle fait face à l’inattendu et au retournement.
L’impossible est possible et l’impossible c’est Dieu soulignait Chestov en commentant Kierkegaard.
La clôture individuelle trace les premiers cercles de l’enfer humain et bute sur l’immonde. Donner congé à ses propres fantômes irrigue le cœur tandis que le résigné est celui qui a détourné son attention du miracle.
Le possible consiste alors à croire au surgissement inépuisable de l’amour.
Car rien ne s’achève sur soi-même. Toute poésie du drame, et le catholicisme, même sur son versant lumineux et baroque, est poésie dramatique, passe par la Croix. Cette Croix n’est pas une tolérance pour la mort et pour son spectacle, elle n’est tout simplement plus rien devant la beauté inépuisable qui co-naît (Claudel) à chaque instant et pour l’éternité.
Voici bien une économie d’abondance dont témoigne le chrétien. Il sait que si nos yeux reçoivent la lumière, ceux du Christ la donne.
© Pascal Boulanger, septembre 2009
Editions Gallimard/Folio
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