24/08/2011
René Peccolo
René Peccolo Un réaliste désirant
Préface et poèmes de Daniel Hachard
Lelivredart, 2011
23:48 Publié dans CLINS D'OEILS (arts plastiques) | Lien permanent | Commentaires (1) | Imprimer | | Facebook
Charles Racine, Ciel étonné
Source : sur le site du compositeur Gérard Zinsstag
Charles Racine
Poète suisse francophone
(1927-1995)
Ciel étonné
Fourbis éditions
(1998)
Les poèmes de Charles Racine déroutent, et attirent. Lus ici, aujourd’hui, ils paraissent comme griffés dans le rugueux d’un mur maçonné à la diable, avec giclées de plâtre et coulures de chaux. Une friche entrouverte par la parole et le couteau, une parole merveilleusement ébréchée, un couteau tourné contre soi. Ils éveillent, ils débusquent le sens et le non-sens, et de leur altercation fusent les séquences d’un phrasé énigmatique qui ricochent dans l’air acide, qui relancent le déconcert…
« Cette longue légende qui m’entraîne
et qui m’apparut peut-être
sur le chemin englouti d’avance »
Extrait de la préface de Jacques Dupin
Le poète Charles Racine, disparu à 62 ans, laisse une œuvre fulgurante. « Ciel étonné » rassemble la plupart de ses poèmes : une découverte.
Charles Racine, né en 1927 à Zurich, savait les mots traîtres, puisqu'il sut aller avec eux jusqu'au bout de sa vérité. Traîtres ainsi le furent-ils en ne sauvant pas l'homme de la folie de sa parole, l'amenant au fil de sa vie à s'enfermer de plus en plus dans la solitude, vivant reclus et de rien dans cette Suisse alémanique. Charles Racine s'égarait dans les mots, allait là où on ignore ce qu'ils produisent : "si je m'égare,/ c'est pour prendre une rupture dans mes bras." Aussi, il choisit la langue et le nom de sa mère (couturière suisse romande) contre l'allemand paternel.LIRE LA SUITE
Extraits
« Le sujet est la clairière de son corps »
la femme débarquait d’un chalutier la peau
sous le goémon les yeux cornouaille le suroît
jusqu’au front les doigts gros la femme débarquait
d’un chalutier elle a bu avec moi j’ai passé
la main sur sa chair fuyante celle de pêcheur
sa bouche de pêcheur celle de goémon le bon
dieu aux abois le nez fourré dans l’algue
saumâtre le bon dieu aux abois respira et baisa la bouche
du grand poisson ses yeux restèrent cornouaille
le bon dieu cherchant sa certitude passait la main
sur la chair de pêcheur Redressant ses flancs
aplatis de chalutier elle vida mon verre ne donna rien
elle passa le port disant un baiser au goémon
1955
ce geste in extremis
qu’absorba pourtant l’abîme
ce geste in extremis abonde
qu’absorbe pourtant l’abîme
envahisse se répande
détériore ce papier rejoigne et colore
mon sang noces amères encre
se répandent animent un breuvage
Eloigne-toi, en dormant, de ma bouche,
dans la verdure qui ne s’éveille verte
sur le sable
des poèmes s’intercèdent sur les pans
meurtris de la lèvre pendus à la chaîne
de cette grille t’entrechoquant dans les murs
dont la croche saigne sur la saison définitive
1963
Les signes à pleines mains dressent
leurs barrières dans la houle
Un divin naufrage est souhaité
mais le poème est face à ces lames
qu’abandonne la mer qui se retire
Economie du trait évoquant le relief
Des mains adressent leur paume
au pont qui chante et s’illumine
dans la voirie
1964
cette couture faite dans le drap propre
déchire la mère du geste qui reprend sous
la flamme où veuve éteinte que garde à vue
son œuvre à la tombée de l’heure piège l’âme
qui lors ne se déshabille qu’elle ne retouche
et ne serge sur ses mains d’un brin d’herbe
le tissu qui l’excède l’économie céleste
qu’elle incline sur les fronts baptismaux
1967
Où le charbon ne le dispute plus à la flamme
qu’il éteint l’y repose le langage est
prévenu de la réapparaissante disparition du
règne poétique la meule du pas ralenti la
marche chevillante qu’affrète le pigment verbal
pour le dégrader le gant dont il enveloppe
le chemin me murmurent les œuvres vives
discrètement tapageuses herbes et moissons
que tu enfourches dans l’infini sans arrêt tu
prends le raccourci désigné au plus obscur
de la géologie tu hantes des mains somptuaires
qui s’offrent et… les jours et les nuits
dissipés dans le temps que tu as versés à
pleins bras sur la ville
1963/1967
■ Autres extraits
Légende forestière
Souviens-toi que tu es forestier
que tu existes
que ta naissance eut lieu
à l’orée de l’une des saisons de mon amour
de l’une de mes saisons à l’orée de mon amour
à l’orée de ma domaniale étreinte,
de mon domanial excès, de l’étreinte
de mon domanial excès
(p.68)
&
L’exil ne figure dans le texte
Poésie tu donnes lieu à la rescision
Tu l’accomplis cet acte
Que ne me reste-t-il quelque mie sur la page
Poésie tu es pulpe jusqu’à même les contours de ton corps
Présence tranchante d’avoisinage
du corps médiatif qu’elle assume d’ailleurs incorpore
Que ne me reste-t-il quelque mie sur la page
sinon que rapatriant qui ne vient dans mes poches
le crayon se déploie dans l’hypnose sèche
moi au bas de ses moyens du bas de ses moyens
regardant vers le stylite
Je ne suis que cette girouette
qui parfois déploie un bras qui l’attrape
à la nuque qui ne laisse rien
1964
■ SITES A CONSULTER :
■Hommage à Charles Racine par Gérard Zinsstag, octobre 1997
Gérard Zinsstag, compositeur
■ III- CHARLES RACINE Tresse et détresse : le texte cousu par Frédéric Marteau
■ Po&sie n°121
LE NOUVEAU COMMERCE Cahier N° 15/16 Printemps-Eté 1970
■ Editions Grège Légende Posthume
22:01 Publié dans Charles Racine | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer | | Facebook
Isabelle Seilern
Galerie Roy Sfeir
6 rue de Seine - 75006 Paris
Tel : +33 (0)1 43 26 08 96
art@galerie-du-fleuve.com/www.galerieroysfeir.com
Isabelle Seilern
Tirage lambda plexi - 2/7
52 x 70 cm
Galerie Samagra
52 rue Jacob - 75006 Paris
Tel : +33 (0)1 42 86 86 19
gallery.samagra@wanadoo.fr / www.gallery-samagra.com
21:00 Publié dans CLINS D'OEILS (arts plastiques) | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer | | Facebook
Nathalie Riera, là où fleurs où flèches
Là où fleurs éclatent du linge des chairs en silence la passion sa radiance où flèches ne volent plus Depuis le jardin aux chants nombreux de chair & d’argile aux courbes pétrifiées devant le miroir vous que je ne vois pas vos regards comme autant de sagaies guêpes à l’antre des pudeurs
Leste le cheval dans la bataille
Le livre n’est pas qu’une affaire de mots
Vivre n’est pas qu’une affaire de survivre
--------------------------------------------------------
Recommence le rouge ou le noir des mûriers – il faut passer un accord avec les accrocs, les manquements – les racines, les épines – parce qu’il y a encore le soleil, et sur la page le phosphène des typographies, des chemins sans images
&t les travaux du cœur, ce qu’il peut tisser
&t l’aura des verdures, tout près du malheur de la parole
Nathalie Riera là où fleurs où flèches
©
Revue GPU, N°6, 2011
Chère Nathalie,
J'ai lu "Là où fleurs où flèches"
L'absence d'une musique classique que vous avez voulue m'a obligée à rentrer d'une manière frontale dans vos mots. Certes, ce fut une difficulté pour moi en première lecture. Cependant le "déséquilibre syntaxique" maîtrisé et délicat m'a permis une autre ouverture avec votre poésie. L'intérêt d'un texte poétique et donc du vôtre est que nous pouvons le lire et le relire car une belle écriture poétique est le dévoilement à chaque nouvelle lecture d'une sensation différente. C'est le miracle de la poésie qui n'a pas de prise avec le temps.
Certains passages m'ont particulièrement touchée notamment : "Recommence le rouge ou le noir des mûriers - il faut passer un accord avec les accrocs
...
& les travaux du cœur, ce qu'il peut tisser"
Rendre la nature en mots et la basculer dans la chair crée une intensification du vivre. Frédérique Ventos, mai 2011
Editions Frédérique Ventos
***
Là où fleurs où flèches…
ces quelques pages, Nathalie Riera,
lues en essayant d’adopter leur rythme
donc assez vite précipitamment
puis à perte de souffle
en effet pas qu’une affaire de mots
affaire de sauts affaire de sens
liés à la sonorité
aux muscles de la langue
voyelles couleurs
les yeux dans la gorge
et l’étourdissement final
le regret de perdre tout à coup
les pétales de la langue
MERCI
Bernard Noël, 23 avril 2011
20:30 Publié dans Nathalie Riera | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer | | Facebook
Mireille Calle-Gruber, Claude Simon. Une vie à écrire
Mireille Calle-Gruber Claude Simon. Une vie à écrire
Éditions du Seuil, coll. "Biographie", 2011
Présentation de l'éditeur:
Cette toute première biographie consacrée à l'un des derniers prix Nobel de littérature française retrace l'itinéraire d'un écrivain qui en dépit des innombrables thèses qui lui ont été dédiées reste tout à la fois universellement admiré et curieusement méconnu. La haute exigence formelle de cette œuvre trop souvent jugée ardue a longtemps occulté une évidence qui jalonne toute la production écrite de Claude Simon : son ancrage dans un vécu complexe qui la traverse de part en part et dont elle revisite et décompose livre après livre les ressorts les plus intimes. Issu d'un milieu bourgeois et conservateur, très vite orphelin de père puis de mère, Claude Simon s'est construit dans une relation conflictuelle à ses origines. Il y a l'enfance, bien sûr, récurrente dans son œuvre, mais également d'autres moments marquants, comme son expérience de la captivité pendant la Seconde Guerre mondiale, dont il rendra compte dans La Route des Flandres. Le refus du roman traditionnel qui l'a trop vite classé dans la mouvance du « nouveau roman » apparaît en ce sens tout à la fois comme une ascèse et comme une tentative sans cesse renouvelée d'explorer les non-dits et les secrets les plus enfouis d'un passé douloureux. Tout le propos de cette biographie richement documentée, et écrite d'une plume alerte et sensible, est de nous démontrer combien la vie de Claude Simon est d'abord et avant tout l'histoire d'une émancipation, et son œuvre un exorcisme permanent des fantômes de la mémoire.
Mireille Calle-Gruber est professeur des universités à la Sorbonne-Nouvelle-Paris 3. Elle a publié une vingtaine de livres sur la littérature française contemporaine. Elle est l'auteur également de cinq romans. Elle travaille depuis de nombreuses années sur l'œuvre de Claude Simon, dont elle a notamment établi l'édition de La Pléiade chez Gallimard.
20:21 Publié dans Claude Simon | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer | | Facebook
20/08/2011
MEDIAPART : Dans ce Jardin d'Eucharis (par Patrice Beray)
Dans ce jardin d'Eucharis
19 Août 2011 Par Patrice Beray
Edition : Revues & Cie
Revue numérique, chaque rendez-vous des Carnets d'Eucharis exalte à satiété l'œil des artistes comme autant d'espaces du dedans qui se découvrent poème, photographie, pensée, histoire, parce qu'il y a un mot, une matière, l'autre ou le monde pour les faire advenir.
Les deux récentes mises en ligne des Carnets d'Eucharis sont exemplaires de cette approche, qui est une ouverture, au ressort d'une sensibilité, celle de son unique revuiste, Nathalie Riera. Car solitaire, l'œil creuse d'abord de son empreinte toute présence, à la seule force de sa perception.
Ainsi de ces personnages figurés par l'objectif de la photographie (ou du cinéma... muet) qui n'attendent que d'être vus, et qui s'insinuent dans les pages d'un même numéro, telle l'actrice (et styliste plurielle) Natacha Rambova, compagne de Rudoph Valentino (en couverture du numéro de mai/juin).
17:37 Publié dans LES CARNETS D'EUCHARIS (pdf & calaméo), Nathalie Riera, Patrice Beray | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : mediapart, le jardin d'eucharis, patrice beray | Imprimer | | Facebook
13/08/2011
Henri Cole, Nécessaire et impossible
Henri Cole
Poète américain
(né en 1956)
[…]
I can feel my heart beating inside my heart
[…]
NECESSARY AND IMPOSSIBLE
It is a nation born in the quiet part of the mind,
that has no fantasy of omnipotence,
no God but nature, no net of one vow,
no dark corner of the poor, no fugue-work of hate,
no hierarchies of strength, knowledge or love,
no impure water spasming from rock, no swarm of polluted flies,
no ash-heap of concrete, gypsum and glass,
no false mercy or truths buried in excrement;
and in this nation of men and women,
no face in the mirror reflecting more darkness
that light, more strife than love, no more strife
than in my hands now, as I sit on a rock,
tearing up bread for red and white carp
pushing out of their element into mine.
NECESSAIRE ET IMPOSSIBLE
C’est une nation née dans la partie sereine de l’esprit,
sans fantasme de toute puissance,
sans Dieu sauf la nature, ni piège d’un serment unique,
sans coin obscur de pauvres, ni fugue de haine,
sans hiérarchies de force, de connaissance ou d’amour,
sans eau impure pulsée d’un roc, essaim de mouches polluées,
amas de cendres de béton, gypse et verre,
sans fausse pitié ou vérités enfouies dans des excréments ;
et dans cette nation d’hommes et de femmes,
sans visage dans le miroir reflétant plus de ténèbres
que de lumière, plus de conflit que d’amour, pas plus
que dans mes mains à présent, tandis qu’assis sur un rocher
je déchire du pain pour les carpes rouges et blanches
qui de leur élément s’élancent dans le mien.
Middle earth/Terre médiane Editions le Bruit du temps, 2011Édition bilingue
Traduction de l'anglais (États-Unis) et présenté par Claire Malroux
22:18 Publié dans ETATS-UNIS, Henri Cole, Le Bruit du Temps | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer | | Facebook
Marianne Breslauer
Marianne Breslauer
Photographe allemande
(1909-2001)
22:09 Publié dans CLINS D'OEILS (arts plastiques) | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer | | Facebook
Revue Diptyque 2 - Lumières intérieures
REVUE
Diptyque #2 - Lumières intérieures
Florence Noël
11 rue Bois des Fosses
1350 Enines
Belgique
■ LIEN : Cliquer ICI
Nathalie Riera dans « Anthologie Poétique », p.38/39
Sommaire DiptYque 2 : lumières intérieures
Edito :
Florence Noël
Œuvres des artistes :
Pierre Gaudu, Solange Knopf, Annick Reymond, Grégoire Philipidhis, Marie Hercberg, Raphaële Colombi, Anastassia Elias, Clarisse Rebotier,Guidu Antonietti Di Cinarca, Anne d’Huart, jean-Michel Deny, Brahim Metiba, Jacques vandenberg, Danièle Colin,
Voix à la Une : De Toscane en Provence, Lumières d’un Jumelage au Scriptorium avec :
Paolo Fabrizio Jaccuzi, Maura Del Serra, André Ughetto, Angèle Paoli, Martino Baldi, Laurence Verrey, Olivier Bastide et Dominique Sorrente.
Nouvelles et récits de :
Claudine Tondreau, Camille Philibert Rossignol, Dolores Polo, Angèle Paoli, Mariane Brunschwig, Stéphane Méliade, Isabelle Guilloteau, Raymond Alcovère, Jean Buron, Mathieu Rivat
Anthologie poétique avec :
Nathalie Riera, Loyan, Lionel Edouard-Martin, Ile Eniger, Louis Raoul, Eric Dubois, Brigitte Célerier, Thomas Vinau, Zur, François Teyssandier, Michel Brosseau, Michèle Dujardin, Véronique Daine, Patrick Packwood, Kouki Rossi, Jean-Marc La Frenière, Sabine Huyn, Pascal Boulanger, France Burghelle-Rey, Roland Dauxois, Nicolas Vasse, Cathy Garcia, Sébastien Ecorce, Mathieu Brosseau, Juliette Zara, Arnaud Delcorte, Philippe Leuckx, Catherine Ysmal, Thélyson Orelien, Xavier Lainé, Jack Kéguenne, Denis Heudré, Alain Hélissen, Michel Gerbal
Chroniques des lumières intérieures et articles critiques de :
Sylvie Durbec, Philippe Leuckx, Angèle Paoli, Sylvie Salicetti, Florence Noël
Mais aussi :
Les Tentatives de critique de l’édition numérique de Brigitte Célerier
Un écho littéraire à Lynch par Loïc Marchand
Un écho poétique de Florence Noël
Une humeur de Xavier Lainé
-----------------
Florence Noël
resp. editoriale Revue Diptyque
11 rue Bois des Fosses
1350 Enines
Belgique
0032(0)19655167
0032(0)472493268
http://diptyque.wordpress.com
21:59 Publié dans Diptyque, Nathalie Riera, REVUES | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer | | Facebook
11/08/2011
The Black Herald – # 2
The Black Herald – # 2
Revue de littérature– Literary magazine
Issue #2 – September 2011 – Septembre 2011
162 pages – 13.90 € – ISBN 978-2-919582-03-7
Poetry, short fiction, prose, essays, translations.
Poésie, fiction courte, prose, essais, traductions.
http ://blackheraldpress.wordpress.com/buy-our-titles/
Co-edited by Blandine Longre and Paul Stubbs, the magazine’s only aim is to publish original world writers, not necessarily linked in any way by ‘theme’ or ‘style’. Writing that we deem can withstand the test of time and might resist popularization – the dangers of instant literature for instant consumption. Writing that seems capable of escaping the vacuum of the epoch. Where the rupture of alternative mindscapes and nationalities exists, so too will The Black Herald.
L’objectif premier de la revue, coéditée par Blandine Longre et Paul Stubbs, est de publier des textes originaux d’auteurs du monde entier, sans qu’un « thème » ou un « style » les unissent nécessairement. Des textes et des écritures capables, selon nous, de résister à l’épreuve du temps, à la vulgarisation et aux dangers d’une littérature écrite et lue comme un produit de consommation immédiate. Des textes et des écritures refusant de composer avec la vacuité de l’époque, quelle qu’elle soit. Éclatement des codes, des frontières nationales et textuelles, exploration de paysages mentaux en rupture avec le temps : c’est sur ces failles que l’on trouvera le Black Herald.
With / avec W.S Graham, Danielle Winterton, Dumitru Tsepeneag, Clayton Eshleman, Pierre Cendors, Onno Kosters, Alistair Noon, Anne-Sylvie Salzman, Róbert Gál, Andrew Fentham, Hart Crane, Delphine Grass, Jacques Sicard, Iain Britton, Jos Roy, Michael Lee Rattigan, Georges Perros, Laurence Werner David, John Taylor, Sudeep Sen, César Vallejo, Cécile Lombard, Michaela Freeman, Gary J. Shipley, Lisa Thatcher, Dimíter Ánguelov, Robert McGowan, Jean-Baptiste Monat, Khun San, André Rougier, Rosemary Lloyd, Hugh Rayment-Pickard, Sherry Macdonald, Will Stone, Patrick Camiller, Paul Stubbs, Blandine Longre.
And essays about / et des essais sur Arthur Rimbaud, Tristan Corbière, Jacques Derrida.
Images : Romain Verger, Jean-François Mariotti. Design : Sandrine Duvillier.
The Black Herald is edited by Paul Stubbs and Blandine Longre
Comité de Rédaction : Paul Stubbs et Blandine Longre
The Black Herald – #1
22:07 Publié dans REVUES, The Black Herald | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer | | Facebook
10/08/2011
ANNEMARIE SCHWARZENBACH – LA QUÊTE DU REEL (une lecture de Nathalie Riera)
Une lecture de Nathalie Riera
ANNEMARIE SCHWARZENBACH – LA QUÊTE DU REEL
(La Quinzaine Littéraire/Louis Vuitton, 2011)
Textes choisis, présentés et traduits par
Dominique Laure Miermont et Nicole Le Bris
Photographies d’Annemarie Schwarzenbach
Annemarie Schwarzenbach à Lenzerheide, en 1940,
photographiée par Marianne Breslauer © 2008 by the Estate of Marianne Breslauer, Zurich
« Son visage était un Donatello, ses cheveux souples et blonds étaient coupés comme ceux d'un garçon; son regard bleu foncé vous examinait avec lenteur; sa bouche était enfantine et douce. » Carson McCullers
« Elle me fit le même effet qu’à tout le monde : cet étrange mélange d’homme et de femme. Pour moi, elle correspondait à l’image que je me fais de l’ange Gabriel au paradis. (…) Pas du tout comme un être vivant, mais comme une œuvre d’art. »
Marianne Breslauer (Interview, 1998)
« Les montagnes qu’elle regardait étaient la promesse d’autres montagnes. Les fleuves, promesse de la mer. Et la mer, promesse de côtes inconnues. »
Ruth Landshoff-Yorck, 1963
« Je vous supplie de ne pas lire émotionnellement les horreurs sur la Pologne, la Finlande, la Tchécoslovaquie, ou tout au moins d’en lire le moins possible. (…) Si nous pensions aux tonnes de souffrances et de gémissements poussés dernièrement en Espagne, en Chine, en Russie, nous ne pourrions même plus manger quoi que ce soit. Or tant que nous sommes encore destinés à vivre, à nous de vivre d’une manière qui soit possible et qui ne nous rende pas fous de notre impuissance ».[1]
De formation universitaire d’historienne, écrivain et journaliste, Annemarie Schwarzenbach (1908-1942) a publié plus de 300 articles dans la presse alémanique, dont le grand quotidien zurichois Neue Zürcher Zeitung, le quotidien bâlois National-Zeitung, ainsi que des reportages photographiques pour la Zürcher Illustrierte, et quelques autres publications dans des revues comme Mass und wert, fondée par Thomas Mann.
Dans « Annemarie Schwarzenbach – La quête du réel », ouvrage anthologique co-édité par « La Quinzaine Littéraire/Louis Vuitton », Dominique Laure Miermont et Nicole Le Bris ont réuni une cinquantaine de reportages inédits, 33 photographies réalisées par Annemarie Schwarzenbach, des extraits de ses romans et des lettres à ses amis Klaus Mann, Ella Maillart, Carson McCullers, le tout relayé par de précieux commentaires, à dessein de nous éclairer sur l’œuvre d’une jeune femme qui défend, qui dénonce, qui éclaire, là où il y a confusion, tromperie, indifférence, fatalisme…, et qui libre de ses décisions écrira : « (…) je crois qu’une décision n’est pas en soi bonne ou mauvaise. Simplement elle est irrévocable ».[2]
« (…) je suis décidée de suivre cette carrière de voyage, recherche, journalisme, et d’écrivain. En ce moment, il me faut de la nourriture de dehors, il faut que je me détache de moi-même, que je me laisse absorber par notre monde, voir, apprendre, comprendre » (Lettre écrite, en français, à Sils-Baselgia, dimanche de Pâques 1939).[3]
Sa vie, aussi courte soit-elle, sera marquée par l’impatience, l’inconstance, et « par le devoir et le besoin d’aller vers des destinations innommées »,[4] et peut-on s’assurer que chacun de ses voyages trouvera sa raison d’être, non pas dans l’agrément, mais dans l’aventure, ce qui chez A.S. signifie : découvrir « les expressions de la vie de l’humanité », aller vers « de nouvelles terres, de nouvelles langues, d’autres peuples, qui n’habitent pas dans des maisons solides, (qui) dorment à côté de leurs chevaux, sous le ciel libre » … « atteindre le cœur du monde ».[5] En Orient, ce sera alors sa rencontre avec les Bédouins Anezi et l’émir Fawas Chaalan, puis avec les pèlerins persans qu’elle décrit comme « un peuple inquiétant » :
« Blêmes, sinistres avec leur barbe noire, ils offrent le spectacle d’hommes cherchant à tout prix à nier la réalité et à la fuir. Ils vivent comme enveloppés dans une brume de langueur et d’opium. Ce côté inéluctable de leur destinée et l’absence de joie prônée par leur religion en font nécessairement des hypocrites. Ce que l’on n’a pas perçu à Kadhimiyya, on le capte à Kerbela : la puissance négative de l’esprit qui se ferme.
Cet esprit existe aussi en Europe, mais là-bas, il ne peut que dégénérer constamment et prendre des formes terrifiantes. Ici, en Orient, où il ne représente qu’une possibilité parmi beaucoup d’autres, il donne naissance à un îlot, une ville sainte, et ne franchit pas la ceinture de ses palmeraies ».[6]
Par ailleurs, et parmi ses destinations innommées, c’est en terre d’orient que A.S. goûtera à l’incontournable expérience de la « terre nouvelle », expérience sans nom, tout aussi proche de l’expérience de l’amour en tant que source de force et d’action :
« Comment mes yeux pourraient-ils ne pas s’emplir de larmes devant l’innocence de la terre nouvelle ? – Ceci n’a pas de nom –. Bonheur ? Plénitude ? Vision de la vérité ? Musique des sphères ? Amour au ciel et sur la terre ? Epousailles, jubilation, martyre ? Oh, peur martyrisante ! Mon cœur s’est déchiré, et je ne trouve aucun mot rédempteur. Je ne maîtrise plus la langue. Pitié !
(…) Je commence à comprendre –, oui, l’espace d’un instant, je comprends que ma langue ne doit pas être comprise ! – Je ne veux aucune audience, mes chants doivent se perdre, aucun oracle ne doit me répondre, aucun mystère d’Eleusis ne doit m’être révélé, la fumée de mes sacrifices ne doit pas s’élever. Plus de sacrifices, plus d’autels, plus d’hymnes –, je m’approche du silence de la créature… ».[7]
Reconnaissance à la terre, sur laquelle il nous est donné de faire plus « ample usage de la liberté ». « La terre, cette merveilleuse scène animée par un amour unique, indivisible, je la reconnaissais ».[8]
Cette terre à laquelle il nous faut reconnaître qu’aimer, « ce n’est pas un esclavage, c’est la noblesse même, l’expression délicieuse de notre désir de toucher le monde, de communiquer, - finalement to melt into another being, into the world’s patnership, to understand, to overcome the limitation of the individual, which again, of course, is the source of strength and of action we need, - et le désir, finalement, de trouver la mort : non pas d’une manière hostile, mais comme la solution très douce, la compréhension universelle, la fin de notre pénible limitation ».[9]
***
Du temps d’A.S. l’Europe et l’Amérique vont mal (le gros « nuage noir » du nazisme). Ainsi suivre une carrière de voyage, c’est autrement répondre à l’urgence de partir pour « désapprendre la peur » :
« (…) c’était seulement chercher un répit dans des pays où les lois de notre civilisation n’avaient pas encore cours, et où nous espérions faire l’expérience inouïe que ces lois n’étaient pas tragiques, pas indispensables, irrévocables, inévitables ».[10]
Désillusion et dégoût, car la guerre en Europe ne sera pas « le point culminant, l’épreuve (…), après quoi la guérison allait commencer et nous aurions à faire face aux grands défis de l’avenir ».[11] Ce ne fut rien de tout cela, mais plutôt : « (…) à cause de la guerre, la planète n’est plus pour nous qu’une carte de géographie stratégique ».[12] Et dès lors que des hommes meurent par milliers, comment prétendre découvrir ailleurs le Paradis ? A.S. se sent, en effet, pour devoir fondamental « de partager de près le destin imposé par la guerre ».
Un séjour de six mois en Afghanistan, A.S. découvre alors un pays « de pauvres paysans et de nomades errants », et « comme partout dans le monde, le pauvre privé de tout droit et exploité par le riche ».[13] Et cette réalité révoltante, que « (…) sur les routes que l’on ouvre au progrès rouleront un jour les chars d’assaut ».[14]
Dans ses voyages en Afrique, A.S. poursuit sa quête de ce que la terre peut encore nous insuffler. Car malgré les destructions, les massacres, les calamités en tous genres, rien ne peut « interrompre l’incessante poussée des forces de la vie ».
« Quand nous nous trouvons détachés du train-train de la vie quotidienne, nous aimons croire que nous sommes en relation avec les esprits d’un autre monde. Nous avons comme le sentiment de ne plus nous appartenir, le sentiment d’une métamorphose ».[15]
Ce livre ne peut se refermer sans le sentiment que nous appartenons bel et bien à cette grande toile du monde où se font entendre, toujours plus retentissants, la tyrannie des pouvoirs, les idéologies poussées à leur comble, le nouvel esclavagisme, la modernité toujours plus asservissante, l’inhumanité radicale. Sentiment d’une métamorphose chez Annemarie Schwarzenbach, inéluctablement lorsqu’écrire est de réagir contre la nuit, et contre cette musique du monde devenue un « désert d’ineptes slogans habilement tournés », monde du concept qui n’est plus en rapport avec la réalité, mais se présente comme le grand dissipateur des choses fondamentales, et nous conduit vers toujours plus d’exil.
Nathalie Riera, août 2011
Les carnets d'eucharis
Annemarie Schwarzenbach avec sa Mercedes Mannheim, dans les Pyrénées espagnoles, mai 1933
Photographie: Marianne Breslauer, collection Alexis Schwarzenbach, Zurich<br />© 2008 by the Estate of Marianne Breslauer, Zurich
Le 6 septembre 1942, A.S. fait une chute de vélo, et meurt le 15 novembre 1942 des suites de cet accident, dans sa maison de Sils.
Le Miracle de l’arbre, le dernier roman d’A.S. (1942), vient de paraître en version originale aux éditions Chronos de Zurich.
Dominique Laure Miermont, germaniste de formation, a enseigné l'allemand pendant trente ans tout en exerçant une activité de traductrice littéraire.
Depuis une vingtaine d’années, son travail se concentre sur l’œuvre de Klaus Mann (essais et nouvelles) et sur celle d’Annemarie Schwarzenbach.
Elle a également écrit une biographie parue en 2004 aux éditions Payot sous le titre « Annemarie Schwarzenbach ou le mal d’Europe ».
En février 2007, elle a fondé à Genève l'association : Les Amis d'Annemarie Schwarzenbach.
Nicole Le Bris, traductrice, travaille depuis plusieurs années, en collaboration avec Dominique Laure Miermont, à mieux faire connaître l’œuvre dAnnemarie Schwarzenbach.
■ SITES A CONSULTER :
Site "Les Amis d'Annemarie Schwarzenbach"
Interview de Sandrine Mariette
Le blog de La Quinzaine Littéraire
Conférence
L’idée de liberté chez Annemarie Schwarzenbach par Nicole Le Bris
Télécharger l'articleformat PDF
14:52 Publié dans Annemarie Schwarzenbach | Lien permanent | Commentaires (1) | Imprimer | | Facebook