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29/09/2008

Ingeborg Bachmann

 

 

INGEBORG  Bachmann

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 I.B.1.jpg

 

Poète autrichienne (1926-1973)

 

 

REVUE EUROPE

Août/Septembre 2003

 

ICI

 

"Problèmes de la poésie contemporaine", Actes-Sud, 1986

Traduit de l'allemand par Elfie Poulain

 

 


28/09/2008

Adam Jahiel

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Potato Man - Yougoslavie

Emily Dickinson

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Le bureau d'Emily Dickinson
 

 

 

 

Fragile le trésor des oiseaux

par Nathalie Riera


         L’œuvre de Dickinson (1) ne serait bâtie sur aucun évènement réel de sa vie, aucune inspiration d’ordre biographique. Sa vie de recluse à Amherst se passera sans autre horizon que la routine d’une existence réfugiée dans la demeure familiale, dans le calme de sa chambre, sans autre recherche que le dépouillement, et malgré son hypersensibilité et sa fragilité psychique, Dickinson sera surtout poète, quand dehors tout ne sera pour elle que démence.

         Dans son introduction aux « Poems » d’Emily Dickinson, Guy Jean Forgue définit sa poésie comme une rencontre inquiète et tendue entre une fantaisie et une postulation métaphysique. Ces deux éléments joints constitueraient l’essentiel de son inspiration, tout en faisant l’originalité de sa poésie. Mais plus loin, il ajoutera : Sa poésie est le pressentiment d’une extase impossible par une identification avec le grand Tout. L’effet en est de remplacer cette utopique coïncidence par un frisson esthétique qui en serait la contrepartie. Cela expliquerait par ailleurs que pour tout artiste, la beauté de la Nature reste intraduisible, car Pour définir la beauté/Il n’est pas de définition (poème n°988). Ou dans le poème n°516 : Le Beau n’a pas de cause : il est./Qu’on le pourchasse – il s’éclipse./Mais qu’on s’abstienne : il demeure

 

Perception of an object costs                    Percevoir un objet coûte  

Precise the Object’s loss—                        la perte exacte de l’objet.

(…)                                                            (…)

The object Absolute – is nought—                      Il n’est pas d’objet absolu :

Perception sets it fair                                La perception l’embellit,

And then upbraids a Perfectness                        Puis reproche à sa perfection

That situates so far—                                De se placer trop loin.

(n°1071)

         Dans toute traduction esthétique ne peut apparaître que ce que la conscience visuelle a perçu, ainsi qu’il peut en être de l’oreille qui, à sa manière, pare ce qu’elle entend/En triste, ou clair (n°526) :

« La chanson est dans l’arbre »

Me dit le sceptique.

« Mais non ! dans toi ! ».

         Par son détachement à tout dogme religieux de son époque, Emily dira n’avoir connu ni Dieu (elle se veut « païenne ») ni la Nature (si faible est notre sagesse/Devant sa simplicité) (n°668).

         La poète ne fréquente pas les églises :

« Certains vont le dimanche à l’église

Et moi – je reste à la maison

Avec un merle pour choriste

Et pour voûte un verger ».

(n°324)

La poète aimerait pouvoir « rêvasser » comme l’herbe tout au long du jour :

Que l’herbe a peu de chose à faire !

Simple, verte, et toute ronde :

Pour seul souci les papillons

Et pour compagnie l’abeille

(n°333)

 

EmilyDickinson.jpg

Je voudrais être foin ! Mais tout comme la nature humaine passe pour un mystère, qui s’aventure à citer le plus la Nature : N’a pas fréquenté son domaine/ou mis à nu son spectre./On plaindra moins ceux qui l’ignorent/En regrettant aussi/Que l’approcher n’avance à rien/Plus on veut la connaître (n°1400).

Pour Emily, de là où nous sommes, nous ne pouvons accéder à l’absolu. Elle compare alors le drame de l’homme dans l’univers, aussi semblable que celui du pissenlit expiré sur sa tige (n°1501). Mais malgré cela, Emily écrira : Je règle ma voix sur le rouge-gorge/Car son pays – c’est mon pays (n°285), et même si la poète s’habitue à lui, ne va-t-il pas cependant la blesser ? (n°348).

Les cailloux heureux, l’oiseau chantant que le caillou de l’enfant va tuer (n°1304), le bonheur des fleurs que le gel décapite, le soleil assassin qui poursuit sa route (n°1624) ne peuvent servir au poète que d’images métaphoriques, mais non de liens qui nous rapprocheraient du Beau et du Vrai.

How happy is the little stone                    Heureux le petit caillou

That rambles in the road alone                 Vagabondant seul sur la route

(…)                                                            (…)

And independent as the sun                     Indépendant, tel le soleil,

Associates or glows alone,                        Il luit sociable ou solitaire

Fulfilling, absolute Decree                        Et remplit le décret divin

In casual simplicity.                                   En toute simplicité.

(n°1510)

         Que cherche l’artiste dans l’art ? excepté mourir pour le Beau et pour le Vrai. Dans son poème n°449 : l’un sera mort pour la Beauté, et l’autre pour le Vrai. Tous deux installés dans leur tombe, ils conversent en murmurant sur leur sort, et se retrouvent ainsi réunis comme deux frères d’être tous deux tombés pour la même chose : Et puis la mousse atteignit nos lèvres/Et recouvrit notre nom. A la fin du poème n°544 : On cherche dans l’Art l’art de la paix, et dans le poème n°135, on apprend la paix – en comptant ses batailles.

 

Dans son voyage intérieur, ou dans ce que Emily appelle les instants supérieurs de l’âme, voici les quelques réponses à ses monologues :

         L’amour d’ici-bas ? :

« C’est lui qui appelle – abat – donne,

Voltige – miroite – éprouve – dissout,

Revient – suggère – convainc – enchante

Et précipite en Paradis ».

(n°673)

La conscience ? Emily ne peut se bannir d’elle, elle n’en a pas le don. Et si elle devait s’assaillir, quelle paix aurait-elle ? Que de réduire sa conscience. (n°642). Et que retenir de l’expérience de la conscience, si ce n’est que son âge mûr ne fait qu’accentuer le mystère au lieu de l’atténuer.

         Quel est le destin de l’âme ? : Etre pour soi une aventure (n°822).

         Mais, Et puisque nous sommes deux rois ? (n°642) : Emily se montre à jamais avertie de la souffrance de l’âme par ces deux forces souveraines qui la divisent :

« L’âme est pour elle-même

Une impériale amie

Ou la plus angoissante espionne

Qu’un ennemi puisse envoyer ».

(n°683)

         Le Ciel est-il si loin de l’esprit ? :

« Vaste – comme notre capacité,

Beau – comme notre idée,

Pour qui sait bien le désirer,

Il est ici, pas plus loin ».

(n°370)

         Mais si c’est ici ? :

« Je me suis toujours sentie mal ici,

Et dans le ciel radieux

Ce sera pareil, je le sais :

Le Paradis ne me plaît pas ».

(n°413)

         Emily n’aime pas cet éternel toujours braqué sur nous. Elle aussi a prié, a frappé à toutes les portes, mais très vite elle prendra la fuite, Jetant ma prière au rebut :

« Puisque le Ciel est le bonheur

Il suffirait que ma prière

Stipule uniquement le ciel—

Le reste viendrait par surcroît.

(…)

Mais aujourd’hui plus avisée,

Je scrute avec soupçon les cieux –

Ainsi l’enfant qu’on dupe une fois

Et qui déduit que le monde est menteur ».

(n°476)

         Quel ciel nous faut-il choisir ?

« (…) Le Ciel,

Ou seulement le Ciel promis,

Et son vieux codicille de doute ? ».

(n°1012)

         La culpabilité chez Emily ?

         Elle a écrit une lettre au monde, à ce monde qui ne lui écrit jamais. Mais s’il vous plaît, par amour pour la Nature Jugez-moi – Tendrement ! Aussi tendrement et majestueusement que la poète a écrit sa missive au monde (n°441).

         Emily écrit à défaut de ne savoir prier.

         Si le bien suprême ne peut être obtenu ici-bas, si on ne peut croire de lui qu’il n’est que artefact, que l’instant présent soit alors mon seul vrai bonheur sur terre. Paradoxalement, même si Emily n’a jamais parlé avec Dieu, ni visité le Paradis : Pourtant j’en suis assurée/Comme si j’avais mon billet (n°1052).

         L’idéal d’absolu ?

         Chacun doit l’accomplir sans aide :

« L’effort est la condition unique :

Savoir s’endurer soi-même,

Endurer les forces adverses

En sauvegardant sa foi ».

(n°750)

         La Révélation ?

         Que celle-ci ne soit pas/Freinée par des hypothèses (n°1241).

         Quelle est notre revanche ?

         En finir de spéculer. Que l’esprit s’amuse de la matière.

         Et s’il n’y avait aucune revanche ?

         Ne dois-je pas souvent me tromper, pour enfin découvrir la clef divine ? (n°1099).

         La fantaisie ironique d’Emily ? : l’espace étroit d’un cercueil peut contenir un citoyen du Paradis (n°943).

 

         Ainsi se révèle à travers les poèmes d’Emily Dickinson cette constante nécessité à toujours prier l’extérieur comme une chose secourable, comme si nous devions toujours prendre revanche sur nos propres illusions qui nous font rougir, et nous font nous demander si d’aller à l’aventure nous en avons le réel courage, tant monde et êtres sont vulnérables, tant frêle est la beauté, et toujours plus vigoureuse la nuit de la déshérence.

         Pour E.D., et en conclusion, je citerai une parole de Philippe Jaccottet :

« Fragile est le trésor des oiseaux. Toutefois, puisse t-il scintiller toujours dans la lumière ! ».

(L’Ignorant, 1957)

 

(1) Emily Dickinson est née le 10 décembre 1830 à Amherst, petite ville de l’Etat du Massachussets.

 

 

©ΝąʈƕąƖıɛ ŖıɛŖą – Tous droits réservés

 

 

 

23/09/2008

Jean Tortel

"Et la phrase s'enchevêtrera pour être homologue à un désir interrogeant l'enchevêtrement (non pas licou mais chevelure) qui figurera dans le soleil et le vent emmêlés, la tissure en désordre des images affluantes : elles ont quelque rapport métaphorique avec les herbes, qu'on appelle mauvaises par une sorte d'abus de langage".

Le discours des yeux, 1984

22/09/2008

James Noël

 Fruits qui démangent


-
Poésie-

 

photo d'Antoine Tempé (James Noel).jpg

             pour Élodie

 

 

tous les fruits qui démangent  

sont à prendre

à sauter nus sous les dents

 

tous les fruits qui démangent

sont à croquer

dans l'immédiat

du rythme cardiaque

le sang qui tourne

à la recherche des roses rouges

de la terre arable des paradis perdus

 

avoir l'âge

c'est agir

compter les feuilles au pied de l'arbre

et découvrir l'ombre verte de soi-même

enracinée dans le temps sec

 

 

Mot d’ordre

 

 

envoyé spécial des mots

je fais arrêt

sur les pulsions

au cœur du monde

et je crache du sang

un dru sang noir sur les feux rouges

 

conscient de l’indigence

de l’évangile qui se meurt dans l’ivraie

je prône une poétique

à la témoin de Jéhovah

 

j’invite les poètes de demain

à faire du porte à porte

aller sceller des baisers sur des poitrines

pour déverrouiller les coeurs

et marteler des kilos de chaises

sur la tête des assis

 

James Noël, poète-écrivain, est considéré aujourd’hui comme une voix majeure de la littérature haïtienne. Il est l’auteur des Poèmes à double tranchant  / Seul le baiser pour muselière et Le sang visible du vitrier, Ed. CIDIHCA. Ses poèmes sont publiés dans plusieurs anthologies dont Prosopopées urbaines, éd. Desnel, et L’année poétique 2008, éd. Seghers.

Il a collaboré à des revues comme Point Barre, Imp’Act, Exit, etc...

Entre un hymne engagé à l'amour et une colère orageuse, se dégage de sa poésie, comme il se plait à l'appeler, "la métaphore assassine".

Il écrit en créole et en français.

 

COEURITOIRE

Arpenteur des lieux

&

Autres poèmes sur le site de Christophe Condello

Nico Gomez

Nico Gomez

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Photographe urbaniste

Présentation

Un instant, un seul. Quelques fractions de seconde à jamais figées.

L'oeil derrière le viseur, ce pouvoir exceptionnel de fixer le temps sur une pellicule, de le capturer dans un boîtier, de lui arracher d'un simple clic un de ces fragments de vie si éphémères.

Un visage, une expression, un regard, une lumière particulière, une scène improbable...tout ce qui s'offre à nos yeux et ne se représentera plus, tout ce qui a pu éveiller notre sensibilité.

Subtiliser un de ces moments uniques et le rendre intemporel, le faire revivre ou le revivre à son goût, le partager ou bien même le garder pour soi, peu importe, il est désormais et à jamais sous nos yeux pour notre plus grand plaisir.

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Libertés temporaires

 

Biographie

Photographe autodidacte et auteur indépendant, c'est avec un Canon AE1, cadeau de mon père, un boîtier qu'il trimballait dans son sac de voyage il y a 25 ans, entre la Jordanie, la Syrie et l'Irak, que j'ai commencé tout jeune à prendre quelques photos et à écrire quelques lignes timides pour les accompagner... Avec le temps, la vision s'affûte, se personnalise et se professionnalise, les clichés gagnent en qualité et en maturité et les mots en force et en clarté.

Ainsi, on prend rapidement goût à cette liberté de s’introduire dans l’intimité du quotidien afin d’accentuer son côté artistique et remarquable. A ce pouvoir exceptionnel de fixer le temps sur une pellicule, de le capturer dans un boîtier, de lui arracher d'un simple clic tous ces fragments de vie si éphémères.

 

Le virus ne m'a pour dire jamais quitté et s'est même considérablement propagé. Alors au fil des kilomètres parcourus, des villes égrenées, des reportages accomplis, des rencontres inattendues et des pays traversés l'œil derrière le viseur de l'appareil, un univers se construit. Le voici à travers cette passion qui depuis est devenue mon art de vivre.

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 Dérives

 

nico gomez book

 

 06 12 28 18 86

 

 

Mail

21/09/2008

Wifredo Lam

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Sans titre, 1974

17/09/2008

Extrait

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OUEST

Loïc Herry

Editions Ecrits des Forges, 2003

Pays d'ouest. Cap cambré sous les grains.

 

L'aubépine et le grès poussent leur sursaut fixe

 

Dans la gueule de la mer. Une île dans la pluie.

 

Royaume des ombres.

 

 

 

 

 

Mémoire des varechs.

 

Mousse des bois perdus, ô visages !

 

La vague a ployé les hommes.

 

 

 

 

 

Ces pays qu'on lit pierre à pierre

 

 

lampe du naufrageur

 

 

 

 

 

ciel déchiré de mouettes

 

 

 

*****

 

 

Souffle vert souffle gris

 

Chargé de pluie le grain

 

Plie la pierre sous lui

 

 

 

Viens trop vive mémoire

 

Des naufrages brûlant

 

Désir des gouffres vergues

 

 

 

Brisées dans les heures sèches

 

 

 

La conscience fouettée

 

D'embruns embarque dans

 

 

 

Les creux du néant se

 

Consume dans l'ivresse

 

 

 

Spumescente

 

 

 

Jusqu'au-delà des îles Bienheureuses

 

 

 

                       *****

 

 

Mercure plat. Jusqu'à toucher l'horizon.

 

Ciel gris limpide. Pas une mouche

 

Sur le fil.

 

 

 

Partir. Au bout. Là-bas, où il n'y a rien.

 

Cornouaille. Cork. L'Amérique.

 

 

 

Tout à coup – profondeur vert bouteille.

 

Mangée de bave. Soulèvements sans fin.

 

Rage thoracique, dégurgitation grondante.

 

 

 

Blanche frangée de moutons,

 

Eventails sur les digues,

 

Passes ouvertes et menaçantes.

 

 

 

Un caboteur y va, là-bas.

 

Où il n'y a rien, qu'un espoir de nom

 

Fiché au fond. Cornouaille. Cork. Et

 

L'Amérique.

 

 

 

                       ***

   

                                                                      qui te retient ?

 

 

 

                                   qui t'appelle ?

 

 

 

 

 

 

 

           jappement des hyènes joyeuses

 

                                   sur le roc festonné d'intangible

 

 

 

douce danse du ressac

 

 

 

                                               drosse un vaisseau sur le récif

 

 

 

 

 

 

 

                       couronné d'odeurs brutales et belles

 

 

 

 

 

 

 

                                               va !

Night & Day - Loïc Herry

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wigwametcompagnie.net

 

Loïc Herry est né en 1958 et décédé en 1995. Il n’a publié qu’un seul livre de son vivant : Eclats (éd. Motus). A propos de cet ensemble  resté inédit, voici ce qu’écrit  Jean-Pascal Dubost dans sa postface :

 

« Des poèmes écrits sur l’à vif, effilés, longilignes, tel qu’il pouvait apparaître physiquement, étonnante coïncidence. La fermeté de l’acier et la douceur de la plume dessinent une dualité au cœur de sa poésie, tout comme les graphismes dont il est l’auteur ; poésie tiraillée entre l’insurrection et l’apaisement ; et celle d’un amoureux désespérément fougueux. C’est ainsi qu’il aimait mêler le tintamarre de la modernité et les choses qui l’attendrissaient, à l’exemple de Night and Day »

 

Un verre d’ambre dix masques blancs des ombres

Cognent contre le comptoir des canots où des corps

Rament à quatre cordages rouges hautes étraves fusées

ici on écope les heures.

 

 

Editions WIGWAM

14 boulevard Oscar Leroux

35200 Rennes

 

Site à consulter

Loïc Herry : l'écriture des extrêmes

14/09/2008

Comment lire un livre ? - Virginia Woolf

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Pour Woolf, la lecture peut prendre « beaucoup de valeur à une époque où la critique ne peut plus s’exercer normalement, où les livres sont passés en revue comme un cortège d’animaux dans un stand de tir, où le critique n’a qu’une seconde pour charger son arme, viser et tirer. »

 

 

Après Le Commun des lecteurs, L’Arche-éditeur publie un second essai Comment lire un livre?

Collection Tête-à-tête

Traduit de l’anglais par Céline Candiard, 2008, 256 p.

ISBN 978-2-85181-674-0 

 

13/09/2008

Silent footage of Jack Kerouac&Allen Ginsberg&Lucien Carr...

& autres amis, à New-York durant l’été 1959

Claude Simon

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« … (et les femmes en fichu noir, et les filles en robe de soie trop voyantes), bien avant l’ouverture, devant les portes géantes en plexiglass des Galeries Modernes, les vitrines aux mannequins hermaphrodites proposant leur camelote en matière plastique, les soieries en matière plastique, la porcelaine en matière plastique, l’argenterie en matière plastique, avec leur indéfectible sourire lui aussi en matière plastique de même que leurs cheveux, leur charme et leur sex-appeal à l’usage il faut croire de cœur, de sexes et de cerveaux en matière plastique comme sans doute ceux de l’espèce nouvelle qui installe, fabrique et vend vitrines, mannequins et camelote : sorte de ver blanc et mou de fabrication récente, issu – ventre, appétits, cupidité, insolence et paresse – non de l’Histoire, du Temps, de la chair fécondée, mais selon toute apparence du coït entre l’automobile et le radiateur de chauffage central, totalement inapte à se mouvoir autrement qu’à l’aide d’un moteur, à se distraire qu’en technicolor et à se concevoir qu’en monnaie-papier. »

(CLAUDE SIMON - « Le Vent » (pp.79/80), 1957 – Bibliothèque de la Pléiade)

 

10/09/2008

A Paraître

Gilbert Bourson

« Congrès »

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Gilbert Bourson : le lierre, la foudre…

 

par Pascal Boulanger

 

En postface

 

Où sommes-nous, sur quelle scène, dans quelle reprise et dans quelle outrance ? Quel univers de profusion se déploie sous nos yeux, quel Congrès, autrement dit, quelle union / désunion de la langue amoureuse, quelle rencontre possible / impossible avec le monde se lancent sur la page ?

 

L’écrivain comme l’amoureux, impatiente ses doigts sur l’agrafe d’une description : celle de son désir écrit Gilbert Bourson. Et en effet, à condition de surmonter le nihil du nihilisme, tout fait monde.

 

D’ailleurs, les vieilles coulisses du théâtre du monde peuvent bien rester les mêmes, il suffit alors de se réveiller de la comédie humaine et de son mortel ennui pour que l’existence, penchée sur le signe, ne soit plus saturée et close. Il suffit de s’arracher au destin tel qu’il s’impose et cette sortie s’inaugure à partir de l’autre – le visage de l’autre – visible et invisible sous son voile ou son masque.

 

L’écriture baroque de Gilbert Bourson résonne dans les profondeurs musicales des choses vues, dans leurs incessantes métamorphoses et ce qui se donne à entendre, à travers élégies et lieds, ce sont d’abord de grandes singularités qui, dans l’actualité présente, font toujours corps : Homère, Properce, Catulle, Hölderlin, Rimbaud, Mallarmé… une foule de poètes pour qui le texte, tendu et intemporel, fait bruire le lierre et la foudre.

 

La poésie de Bourson passe aussi par l’expérience – la suspend et l’éclaire – surtout quand elle refuse, comme ici, toute concession au langage de la tribu. Elle est la combinaison d’une forme et tout autant l’invention d’un sujet lié au monde, lié à l’assaut continuel des couleurs et des sonorités du monde. Il faut – horrible travailleur – montrer ce quelque chose qui fond sur le cœur, le comble, se retire, en passer par la main et par l’oreille pour former une cène, concrète et solennelle, où l’on se perçoit autre, comme sollicité et pensé par les événements mêmes et par le surgissement épiphanique du temps.

        

Le signe – Gilbert Bourson a été responsable, avec Francine Bourson, de la Compagnie théâtrale Le groupe Signes, adaptant et traduisant pour la scène de nombreux textes, ceux notamment de Sénèque, Dante, Jarry, Lautréamont, Flaubert – le signe donc s’ordonne en syntaxe, se déplie en musique, en sonnets et en sonates. Il est un antidote à l’éclipse de la pensée et de la beauté dont les volutes chatoyantes, qui sont de l’esprit et du sang, habitent la page.

 

Ces pages, hors-jeu et dans le secret du jeu, cet écrivain insaisissable et inapaisable, les conçoit et les travaille depuis des années. Elles excèdent les conventions poétiques et romanesques dans l’outrance du désir et la violence d’une écriture qui ne peut se satisfaire du réalisme et de ses variantes. Souveraines, elles plongent dans un ciel étoilé et on mesure enfin aujourd’hui l’éclat d’une posture rare qui, en marge du pacte social, médite le jaillissement du poème et le passage d’un monde muet et idolâtre à un monde qui parle quand le sensible prend l’oreille ou le regard (Merleau-Ponty). 

 Pascal Boulanger

Extraits

 

Dans les éboulements fleurissent les brèches

Et c'est sous la langue, arquée par dessous,

La ligne d'eau noire tire sur le fond

En humant son crochet qui s'agrège aux masses

Brèves et velues; caresses d'estuaires

Avec des nudités d'agrafe et leur escorte

D'odeurs furetées, de plans enchevêtrés

Aux semis des compas, (ceux des écartements

Font éclore cette ovation de vert tancé

D'un à-pic mortel) et le champ qui s'épand

Force au plus près de l'agraphie ce qui s'efforce

A dire le sans-toi du lieu, l'encoche nue

Avec ce parfum d'ongle qui plane; les mots

Qui arrivent à se manquer: La chair d'un nom.

 

                                                           (rêve d'un nom) 15/04/04

 

 

Cet écart rayonnant qui survient, ce coup

De scalpel du ciel: Et la tortue du bleu

Nous montre son faciès- (ou est-ce l'escarpin

Furtif d'une occasion qui pointe sous le plaid

Du jour ? ) – A la terrasse, la dégustation

D'un alcool fort de jambes, l'interview de rien

Qui s'étire en fumée, les journaux parcourus

Pour juste un aperçu du monde entre les coudes

Et le Schopenhauer d'un café fort qu'on boit

Sans y goûter vraiment, ce visage qui passe

Et qui n'est pas le tien, mais de ton cher fantôme

Hachurant l'éclaircie. En face le Pierrot

Du mur hypertrophique nous mime à regret

La verticalité tangente d'une idylle.

 

                                                            (à la terrasse d'un café)

 

 

Le barman triste songe:" Si j'étais, disons

Une partie du ciel, comme la galaxie

Au lieu de vous servir des verres, je ferais

Descendre sur les prés, les champs, une lumière

Sur les villes aussi, sur les bars aussi bien

Et même les bordels, une sacrée lumière

Qui ressemble à la neige gelée ou au sucre

En poudre que l'on met sur les gaufres qui fait

Eternuer au manège les chevaux de bois:

(C’est depuis ce temps là toujours que l'on entend

Cette- "Tranquille et triste musique des hommes")

Hé hé, voyez les gars, c'est parce que je vois

En pensée Son regard que j'ai cette idée là

D'en répandre partout… La tournée est pour moi".

 

                                                           (La tournée du barman)

 

 

Imp Act
d'ici & ailleurs
ISBN 978-2-918088-00-4    

(12€)
54, rue de Ronquerolles
95620 Parmain
01 34 73 29 75
impact.dicietailleurs@tele2.fr

 

 

04/09/2008

No-Made 2008

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Les peintres du corps

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Hans Silvester a ramené de son dernier voyage en Ethiopie des photos des habitants de la vallée de l'Omo.
Superbe expo jusqu'au 7 septembre à l'Hôtel des Arts, à Toulon.
Source photo-reportage de l'expo : Nathalie Riera
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