Claude Simon (13/09/2008)

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« … (et les femmes en fichu noir, et les filles en robe de soie trop voyantes), bien avant l’ouverture, devant les portes géantes en plexiglass des Galeries Modernes, les vitrines aux mannequins hermaphrodites proposant leur camelote en matière plastique, les soieries en matière plastique, la porcelaine en matière plastique, l’argenterie en matière plastique, avec leur indéfectible sourire lui aussi en matière plastique de même que leurs cheveux, leur charme et leur sex-appeal à l’usage il faut croire de cœur, de sexes et de cerveaux en matière plastique comme sans doute ceux de l’espèce nouvelle qui installe, fabrique et vend vitrines, mannequins et camelote : sorte de ver blanc et mou de fabrication récente, issu – ventre, appétits, cupidité, insolence et paresse – non de l’Histoire, du Temps, de la chair fécondée, mais selon toute apparence du coït entre l’automobile et le radiateur de chauffage central, totalement inapte à se mouvoir autrement qu’à l’aide d’un moteur, à se distraire qu’en technicolor et à se concevoir qu’en monnaie-papier. »

(CLAUDE SIMON - « Le Vent » (pp.79/80), 1957 – Bibliothèque de la Pléiade)

 

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