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28/01/2012

Bernard Vargaftig

Hommage à Bernard Vargaftig

(1934-2012)

 

 

 

 BERNARD VARGAFTIG PAR PIERRE EMMANUEL WECK.jpg

© Photo : Pierre-Emmanuel Weck

© http://www.weck.info/2010/09/19/bernard-vargaftig/

 

 

 

 

[…]

 

 

C’étaient les bruits ceux qu’on déchire les

Clés d’horloge les miroirs ceux qui tiennent

Dans leur ovale les maisons pliées

En quatre le temps à peine et les rênes

Qu’on laisse aller autour des morts autour

De l’eau avec chèvres et peupliers

Et carriole sur le vide la même

Route que nous courons comme reviennent

Rêves et paroles grand escalier

Rapace de chaque côté du jour

 

 

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Saute sur les bêtes sur le breuil la

Mort ailleurs ce qui s’oublie les voitures

Mal englouties remplies de temps d’éclats

Eparpillés copeaux de mots sur

D’autres mots comme on croit fuir ô fracas

Château d’aiguilles déchiquetées sciure

Sur le sang au bas des marches un rat

Tel un récit et toutes ses chaussures

D’air jusqu’à se taire serrer les murs

L’eau les portes les fentes contre soi

 

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J’entends la guerre

                  Les guêpes

Muettes

Sur le charnier

                            et les bombes silencieuses

Chicots d’instant

 

                                     

                                      me suis-je tu

                                                                  le soleil

                                                                  l’ourlet qui file

 

  

 

Et l’un l’autre Bruna Zanchi

Editions Belfond, 1981

 

 

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Les bruits sont lents ils font un paysage

D’oubli et d’eau de pentes qu’on remonte

Petites peurs frottées les unes aux autres

C’était rêver le ciel dans les bassines

Entre les noix et le bois sec le chanvre

Quelles durées fuient toujours dans la mienne

Semblants de mots d’habitudes qui cèdent

Quand on dirait qu’une à une les choses

S’étendent et se recouvrent indifférentes

Ombre enlisée enfance complaisante

Et que déjà l’herbe pousse à travers

 

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Je m’étendais contre ma mort j’avais

Ses ongles et ses trous je la comblais

De mots de peurs abstraites sans issue

Rail et silence où s’effondrent les villes

Marque pliure usures dérisoires

Tout un savoir sans signification

Les noms se changent en pierre en coin en verre

Brisée platras de fuites qui s’effritent

Bouchent les murs contiennent les fontaines

Bruits de chevaux et d’anneaux sous les voûtes

Pas d’autrefois quand nous nous embrassions

 

 

Description d’une élégie

Editions Seghers Poésie 75, 1975

 

 

 

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C'est quand ainsi tu me saisis

Mouvement auquel rien ne se confond

La trace du ciel

Avant qu'il n'y aura eu le ciel

 

Un effacement chaque roche

Soulèvement sans aucun savoir

A nouveau plus loin en moi que ne sont

Où que j'aille la  clarté la grève

 

Vite avec puisque même éparse

La déflagration ne se tait pas

Entre aube toujours inclinée et mouettes

Dans un fragment d'appartenance

 

Les amandiers j'entends comme ils tremblent

Qui font espérer

Pour avoir été ce déchirement

Dont le souffle garde l'abîme

 

 

Ce n'est que l'enfance (p.53)

Editions Arfuyen, 2008

 

 

Guillaume Allardi - Je marche

 

Guillaume Allardi est accompagné par Florent Manneveau (saxophone) et Karim Kasmi (percussion)

 

Terres de femmes n°86 – janvier 2012

Terres de femmes n°86 - Janvier 2012.jpg

Responsable de la rédaction : Angèle Paoli

Coordination éditoriale et mise en pages : Yves Thomas
Direction artistique et mise en images : Guidu Antonietti di Cinarca [G. AdC]

 

TERRES DE FEMMES

 

 

27/01/2012

Walter Benjamin, "Ecrits autobiographiques"

Lecture Nathalie Riera

 

Walter Benjamin

Ecrits autobiographiques

 

Traduit de l'allemand par Christophe Jouanlanne et Jean-François Poirier

Editions Christian Bourgois, 2011/ http://www.christianbourgois-editeur.com/

 

 Walter Benjamin_écrits autobiographiques.jpg

 

 

Walter Benjamin, « … »

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Le but de tout commentaire artistique devrait être désormais de rendre l’œuvre d’art – et, par analogie, notre propre expérience – plus réelle à nos yeux et non pas de la déréaliser. Montrer comment l’objet est ce qu’il est ou même simplement qu’il est ce qu’il est, bien plutôt que de faire apparaître ce qu’il peut signifier, voilà le véritable rôle de la critique.

 

Susan Sontag, « Contre l’interprétation », 1964

 

 

Détacher la métaphore des choses, c’est découvrir leur noyau anthropologique, ce qui revient au même que représenter leur signification politique. (…) la métaphore devient finalement, à y regarder de près, la seule forme de manifestation possible de la chose.  Le chemin qui permet de pénétrer jusqu’à elle : le jeu passionné avec les choses. C’est par ce même chemin que les enfants pénètrent jusqu’au cœur.

 

Walter Benjamin, « Notes éparses de juin à octobre 1928 »

 

 

Philosophe du langage, historien de l’art, critique, essayiste, traducteur, sensible au dadaïsme et au surréalisme, rattaché à l’Ecole de Francfort, engagé dans le mouvement des « étudiants libres », Walter Benjamin est longtemps resté inaccessible en France, jusqu’aux travaux de recherches et de traductions de Maurice de Gandillac, Philippe Jaccottet, Marc B. de Launay, Jean Lacoste, Guy Petitdemange, Michel de Valois.[1] Sa philosophie considérée à « dimension messianique » (Michael Löwy), Benjamin consacre dans ses travaux réflexions et questionnements, entre autres sur la « situation moderne » et la perte de la dimension religieuse. Sur ce propos, Eva Geulen écrit : « (…) il n’existe sans doute aucun penseur dont le dédain (…) pour tout ce qui n’est pas « spirituel » (…) soit aussi profondément ancré que chez Benjamin ».

  Né à Berlin (1892-1940), victime du nazisme, Benjamin parcourt l’Europe en long et en large (Italie, France, Espagne), et voyage dans les pays scandinaves, et en Russie. Les villes nourrissent sa poétique de la description. Entre 1928 et 1931, Berlin et Marseille seront des lieux d’expériences sur les effets produits par le haschisch sur son imagination : « avec le haschisch, nous sommes des êtres de prose de la plus grande puissance ».

  Proche de Theodor W. Adorno, Bertold Brecht, (« le véritable interlocuteur des écrits des années 30 » - La Quinzaine littéraire), Hugo Von Hofmannsthal (qui tenait en haute estime ses travaux), Ernst Bloch, Hannah Arendt, Karl Kraus, Gisèle Freund, Gershom Scholem, et son ami de jeunesse, le poète Fritz Heinle (qui mit fin à ses jours en 1914). Et parmi les personnalités littéraires qui auront influé sur la pensée du philosophe, « les trois grands métaphysiciens »[2] de la littérature que sont Kafka, Joyce et Proust.

 

 

 Les « curriculum vitae »

 

  Ecrits successivement pour différentes occasions : postuler au titre de docteur, obtenir une bourse de l’Université de Jérusalem, ou dans le cadre d’une demande de naturalisation (qui n’aboutira jamais), ces 6 curriculum… ouvrent le recueil des « Ecrits autobiographiques », et nous plongent dans le parcours estudiantin de Benjamin. « Je suis de confession mosaïque », précise t-il, « principalement intéressé à la philosophie, à l’histoire de la littérature allemande, ainsi qu’à l’histoire de l’art »[3]. Ses intérêts pour la théorie du langage le conduisent à un essai de traduction de Baudelaire, ainsi qu’à des lectures « sans cesse répétées de l’œuvre de Platon et de Kant »[4]. De son goût vif pour la littérature française et de son intérêt pour « la teneur philosophique, morale et théologique » de l’écriture littéraire et des formes d’art comme l’allégorie, Benjamin s’adonne à des traductions de « la grande œuvre romanesque » de Marcel Proust et des « Tableaux parisiens » de Baudelaire. Son intérêt pour l’œuvre du poète répond à la nécessité « de faire de la poésie du XIXème siècle le médium d’une connaissance critique de ce siècle » (Curriculum VI, p.45). Les traductions seront aussi l’occasion de longs séjours en France, notamment à Paris, en 1913, 1923, puis de 1927 à 1933.

  En situation économique précaire, dans une Allemagne marquée par des bouleversements politiques, Benjamin exerce une activité annexe de chroniqueur littéraire (Curriculum IV).

 

  Dans « Curriculum III » : « (…) tous mes efforts ont tendu jusqu’à maintenant à frayer un chemin vers l’œuvre d’art en ruinant la doctrine de l’art comme domaine spécifique ». Pour Benjamin, il est en effet question de reconnaître en l’œuvre d’art « une expression complète des tendances religieuses, métaphysiques, politiques et économiques d’une époque et qui ne se laisse sous aucun de ses aspects réduire à la notion de domaine (…) une telle réflexion me semble la condition de toute appréhension proprement physionomique des œuvres d’art en ceci qu’elles y apparaissent incomparables et uniques »[5].

 

 

 Walter Benjamin c.jpg

 

 

  

« (…) je considère comme une matière particulièrement importante et féconde pour des séminaires et le cas échéant aussi pour des cours magistraux l’histoire des écrits anonymes, ce qui me permettrait de recourir à l’histoire des encyclopédies et des dictionnaires, des calendriers et des anthologies, des périodiques, des tracts et de la littérature de colportage, pour caractériser différentes époques de l’histoire littéraire »

 (« Curriculum II », p.29)

 

 

 

  « Journal de Wengen »

 

  Chez Benjamin, voyager est l’occasion de sortir de son espace privé, et pour cela il importe d’endosser le meilleur costume. La leçon proustienne : « Je compose ce journal avec des évocations rétrospectives, en partie parce que je sais par expérience que je ne trouve pas le temps chaque jour d’écrire, en partie parce que l’évocation rétrospective éclaire bien des choses »[6]. Benjamin est un globe-trotter de la mémoire et de l’instant présent, ce sont ses déplacements en montagne qui lui procurent ce sentiment ; les montagnes « semblent d’éternels excursionnistes sillonnant le monde, qui avancent à pas lents et quand on est en excursion avec elles, on croit venir soi-même des lointains ».

 

  « Pour la suite de ce pseudo-journal commencé à Wengen le 25, j’éprouve de graves doutes. Seules doivent être retenus les états d’âme, inspirés par la nature de haute montagne, qui varient constamment dans le détail mais sont au fond très semblables ; si de plus on écarte dans toute la mesure du possible les circonstances accessoires pragmatiques et insignifiantes. Et retenir les causes très subtiles des diverses impressions produites par la nature est difficile et parfois pour nombre d’entre elles impossible. Et peut-être est-ce alors, encore une fois, dans des épisodes isolés de l’expérience vécue, pragmatique, ordinaire qui nous escorte, que se trouvent la seule clé et la seule expression ».

 (« Journal de Wengen », p.68/69)

 

  Fulgurance du philosophe dans sa manière de saisir les paysages et d’en jouir pleinement. Nécessité souveraine d’imprimer sur la toile de la mémoire tout ce que ses propres yeux sont à même de voir : « … comme nous nous approchons de Genève, je suis seul devant et veux graver en moi tout le tableau, et surtout les montagnes que je vois à présent pour la dernière fois avant longtemps, les montagnes, qui ne sont pas d’une majesté tellement impérieuse, mais sont d’une couleur unie, s’élèvent à une distance rassurante, non déchiquetées – plutôt comme un mur paisible »[7].

  Chaque voyage entrepris s’accompagne de lectures, d’études et d’écriture, de visites de monuments religieux, de musées et de théâtres. Ce seront les cartes postales et les livres d’aventures de l’enfance qui auront aussi exercé leur influence sur son goût des voyages.

 

  « Voyager, n’est-ce pas triompher, se débarrasser des passions enracinées qui sont attachées à notre environnement habituel et avoir ainsi une chance d’en cultiver de nouvelles, ce qui est tout de même bien une espèce de métamorphose ».

 (« Espagne 1932 », p.235)

 

 

  « Mon voyage en Italie, Pentecôte 1912 »

 

   L’environnement urbain a autant d’intérêt pour lui que le « grandiose presque architectural » de la nature. Le charme de tout voyage, passé sous le signe d’un « acte culturel international », n’est-il pas aussi de vivre quelques révélations ? comme à l’occasion de la visite du Campo Santo à Naples : « L’endroit n’est absolument pas placé sous le signe du recueillement »[8] et du cimetière milanais : « pas un cimetière à proprement parler, mais un champ de marbre, éblouissant et irritant »[9], ou encore la visite du toit du Dôme, du Brera « où abonde l’art italien de toutes les époques », jusqu’à la rencontre avec la Cène de Léonard de Vinci : « Je ne peux plus éprouver que l’espace et la conscience de voir, en face de moi si grande et si pâle, l’œuvre que j’ai si souvent admirée en reproduction»[10].

 

  L’observation relève d’une manière de vivre l’espace et de ressentir l’espace, son harmonie, son ordonnance, son contenu ou ce qui le compose, et où « le sublime ne peut manquer d’apparaître à la fois dans la monstruosité et la clarté ». Chez Benjamin, la description des rues implique autant un travail d’écriture dans les détails qu’une description minutieuse d’ouvrages architecturaux ou qu’un examen soutenu d’une œuvre d’art. Voir, c’est alors posséder une longue-vue.

 

 

  « Mai-Juin 1931 »

 

   Dans les notes qui recouvrent cette période de l’année 1931, Benjamin fait cas de sa fatigue du combat pour avoir de l’argent, en même temps qu’un dégoût face à la situation politique et intellectuelle de l’Allemagne. Les notes de ce journal abordent pêle-mêle l’architecture moderne et la littérature, des discussions avec Brecht dont il consacre, par ailleurs, beaucoup de notes. Ces échanges passionnés portent autant sur l’art, sur Kafka, sur le théâtre épique (Calderon, Shakespeare), sur la situation de l’intelligentsia durant la révolution, que sur les modes d’habitation et la « relation de l’habitant avec le monde des choses ».

 

  « Sanary, le 13 mai 1931 : Le plaisir donné par le monde des images ne se nourrit-il pas d’un obscur défi lancé au savoir ?  Je vois le paysage au-dehors ; la mer repose dans le golfe lisse comme un miroir ; la masse immobile et muette des forêts monte vers le sommet des montagnes ; en haut, les murs en ruine d’un château, tels qu’ils étaient déjà il y a des siècles ; le ciel resplendit sans un nuage, dans un « azur éternel », comme on dit. Voici ce que veut le rêveur abîmé dans le paysage : la mer fait gonfler et retomber à chaque instant des milliards et des milliards de vagues, les forêts frémissent de nouveau à chaque instant des racines jusqu’à la plus haute feuille, en un mouvement ininterrompu les pierres du château s’effritent et tombent, dans le ciel les gaz, avant de se condenser en nuages, bouillonnent en une lutte confuse, la science poursuit ces mouvements au plus profond de la matière et la façon dont elle le fait ; elle ne veut voir dans les atomes que des tempêtes d’électrons, tout cela il lui faut l’oublier, il veut le nier : pour s’abandonner aux images auprès desquelles (il) veut trouver la paix, l’éternité, le calme, la durée. Un moustique qui bourdonne à ses oreilles, un coup de vent qui le fait frissonner, toute proximité qui l’atteint le convainc de mensonge mais tout lointain reconstruit son rêve, il se redresse à la vue d’une crête de montagne qui s’estompe, il s’embrase de nouveau à la vue d’une fenêtre illuminée. Et il semble parfois connaître l’accomplissement quand il parvient à désamorcer le mouvement même, à métamorphoser le tremblement des feuilles au-dessus de lui en cime, le passage rapide des oiseaux autour de sa tête en migration. Circonscrire ainsi la nature au nom d’images pâlies – c’est la magie noire de la sentimentalité. Mais la faire cristalliser par une nouvelle invocation, c’est le don du poète ».

 (« Mai-Juin 1931 », p.189/190)

 

 

  « Chronique berlinoise »

 

  « Lorsqu’un jour en effet on me proposa de donner à une revue, sous une forme libre, subjective, une série de billets sur tout ce qui me paraissait au jour le jour digne d’intérêt à Berlin – et lorsque j’acceptai -, il apparut tout à coup que ce sujet, qui avait été habitué à rester des années durant à l’arrière-plan, ne se laissait pas si facilement convier près de la rampe ».

 (« Chronique berlinoise », p.267)

 

  Dans la postface de la première édition, Berliner Chronik, publiée en 1970 par Gershom Scholem : « Benjamin écrivit ces notes par morceaux et bien souvent d’une écriture extraordinairement rapide et difficile à lire (…) – Malgré leur caractère fragmentaire, ces notes sont précieuses non seulement pour une compréhension de la personnalité et de la biographie de Benjamin mais aussi pour une appréciation de la complexité de sa production littéraire, de sorte que leur publication devrait enrichir très sensiblement nos connaissances »[11]. Dans Chronique berlinoise, il est question de souvenirs d’enfance, mais sans ce recours à la vérité factuelle ou sans cet accent trop individuel ou familial : « Si j’écris un meilleur allemand que la plupart des écrivains de ma génération, je le dois en grande partie à une seule petite règle que j’observe depuis vingt ans. C’est la suivante : ne jamais utiliser le mot « je », sauf dans les lettres »[12]. Le souvenir d’enfance chez Benjamin se construit en référence à un lieu, il s’agit ici de Berlin et de son rapport avec cette ville. Une très juste analyse de Marie-Claude Gourde : « Cette sensibilité aux lieux qui construisent la mémoire installe un espace de figuration qui coupe le lien direct de l’écriture à l’histoire de sa personnalité et qui en fait donc un simple intermédiaire. C’est justement dans cet espace de figuration que s’installe le vrai discours réflexif de Benjamin (…) Certes, Benjamin utilise le « je » pour faire état de ses souvenirs d’enfance, mais le tout ne constitue pas en soi le récit complet de la vie de cet homme, il n’est question de sa personnalité que par l’entremise de ces lieux qui l’ont, d’une manière ou d’une autre, influencé ». Il ne s’agit non plus d’une « reconstruction synthétique de son enfance mais plutôt l’analyse du détail du souvenir, la traque de l’infime et du minuscule »[13].Les souvenirs, aussi étoffés soient-ils, nous dit Benjamin, ne constituent pas pour autant une autobiographie, car « l’autobiographie a trait au temps, au déroulement et à ce qui fait le continuel écoulement de la vie. Or il est question ici d’espace, de moments, de discontinuité »[14]. « (…) l’œuvre mystérieuse du souvenir – qui est en effet la faculté d’intercaler à l’infini dans ce qui a été – (…) »[15].

  Quand bien même le caractère autobiographique ne peut être occulté, il s’ensuit que Benjamin a recours à des souvenirs d’images et d’évènements, comme il peut également arriver que « faute de souvenirs ou de notes précis, quelques inexactitudes chronologiques se glisseront peut-être dans mes notes »[16].

 

  Exilé depuis 1933, et alors qu’il tente de regagner l’Espagne, il est arrêté à Port-Bou le 25 septembre 1940. Dans la crainte que les autorités espagnoles le livrent à la Gestapo, dans la nuit du 26 septembre 1940, Walter Benjamin se suicide en absorbant une dose mortelle de morphine.

  Il faut préciser que les écrits de benjamin n’ont jamais été publiés de son vivant. Il laisse derrière lui une œuvre assez considérable. L’édition allemande de l’ensemble de ses écrits ne verra le jour que dans les années 70.

  Toujours aux éditions Christian Bourgois viennent de paraître, dans la collection « Titres » : Images de pensée, 3 pièces radiophoniques, Sur le haschisch, et Lumières pour enfants.

  Le Musée d’Art et d’Histoire du Judaïsme lui consacre une exposition depuis le 12 octobre 2011 jusqu’au 5 février 2012. (Voir les différents liens ci-dessous) Nathalie Riera, janvier 2012

 

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 Lecture Nathalie Riera_Walter Benjamin_Ecrits autobiographiques.pdf

 

  

 

Pour + d’infos

WALTER BENJAMIN ARCHIVES

Repères chronologiques http://walterbenjaminarchives.mahj.org/reperes-chronologiques.php

Le parcours de l’exposition http://walterbenjaminarchives.mahj.org/visite.php

Galerie photos http://walterbenjaminarchives.mahj.org/visite-galerie.php

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D’autres sites à consulter

GALERIE ALAIN PAIRE

Franz Hessel / Walter Benjamin : Camp des Milles, Marseille et Sanary, derniers jours en France

http://www.galerie-alain-paire.com/index.php?option=com_content&view=article&id=124:franz-hessel-walter-benjamin-camp-des-milles-marseille-sanary-derniers-jours-en-france&catid=7:choses-lues-choses-vues&Itemid=6

LA QUINZAINE LITTERAIRE

http://laquinzaine.wordpress.com/2011/10/28/walter-benjamin-au-complet/

 

 



[1] Ecrits autobiographiques, Christian Bourgois, 2011 [p.8]

[2] Ibid., [p.33]

[3] Ibid., [p.25]

[4] Ibid., [p.28]

[5] Ibid., [p.31/32]

[6] Ibid., « Journal de Wengen », [p.61]

[7] Ibid., « Sur le voyage de l’été 1911 », [p.85]

[8] Ibid., « Mon voyage en Italie Pentecôte 1912 », [p.113]

[9] Ibid., « Mon voyage en Italie Pentecôte 1912 », [p.114]

[10] Ibid., « Mon voyage en Italie Pentecôte 1912 », [p.122]

[11] Ibid., « Notes Docteur Rolf Tiedemann », [p.403]

[12] Ibid., « Chronique berlinoise », [p.267]

[14] Ibid., « Chronique berlinoise », [p.287]

[15] Ibid., « Chronique berlinoise », [p.267]

[16] Ibid., « Mon voyage en Italie Pentecôte 1912 », [p.144]

Andrew Wyeth

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Andrew Wyeth, Nogeeshik, 1972, détrempe à l’œuf sur panneau. Collection privée

 

À Paris, la multiplicité et la simultanéité de grandes expositions prestigieuses font parfois oublier ou négliger fâcheusement certaines autres plus petites, moins convenues et plus intéressantes. Tel est le cas aujourd’hui de l’exposition The Wyeth. Trois générations d’artistes américains. Collection Bank of America Merrill Lynch ouverte jusqu’au 12 février prochain au Mona Bismarck – American Center for Art Culture, à quelques pas du musée d’Art moderne de la Ville de Paris (il suffit de descendre la rue de la Manutention jusqu’au quai et de tourner à droite). Dans trois salles, l’exposition présente successivement des œuvres de Newell Convers Wyeth (1882-1945), de son fils Andrew (1917-2009) et du fils de celui-ci, Jamie (né en 1946). S’il ne s’agissait que de montrer que, de ces trois peintres, le plus remarquable est Andrew, et qu’il est à juste titre le plus célèbre, l’exposition resterait d’un intérêt limité. Mais elle devient passionnante en révélant chez eux, selon des modalités différentes, une volonté plus ou moins assumée de raconter qui fait réfléchir à la relation qu’entretient la « grande peinture » telle qu’on l’entend en Occident depuis Cézanne – celle qui ne raconte presque plus rien, qui montre, forme et déforme, fait signe – avec celle qui veut dire quelque chose, suggère un récit, une histoire, et qui, figurative par nature, est aussi narrative, comme la plupart des œuvres des maîtres anciens. LIRE LA SUITE

 

Galerie ALAIN PAIRE

http://www.galerie-alain-paire.com/

 

18/01/2012

Revue Europe, Georges Perec (Georges Perec, un regard en biais - par Nathalie Riera

Lecture Nathalie Riera

 

Georges Perec

Revue Europe, janvier&février 2012 – N° 993-994

 

Site Revue Europe/ http://www.europe-revue.net/

 

 

 

 

georges-perec-couv.jpg

 

 

Georges Perec, « un regard en biais »

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Trente ans après la disparition de l’écrivain oulipien « à 97 % », quelles sont la place et l’importance de son œuvre aujourd’hui, dans le paysage littéraire ? Claude Burgelin, qui répond aux questions de Jean-Pierre Martin, se réjouit « de voir qu’il continue à incarner une image amicale, démocratique (je veux dire : non élitiste) de l’écrivain, celui qui ouvre large les portes de son atelier et laisse entendre que le langage est à tous, que regarder de tous ses yeux est à la portée de chacun, qu’une simple énumération peut mener à l’intelligence de la littérature et du monde ».[1]

   Perec s’implique dans la masse du quotidien. Avec son premier livre « Les Choses » (1965), « chronique des années 60 » selon Gianni Celati, ce n’est pas l’intériorité de l’homme ou la psychologie du personnage qui charrie l’écriture, mais plutôt l’ouverture vers l’extériorité. Sur ce sujet, Celati précise : « Cette ouverture de champ est la question centrale de Perec. Il s’agit d’aller vers les choses et de les interroger, d’accumuler des descriptions de leurs caractéristiques. Dans ses textes tout devient important : les meubles, les ustensiles,  les espaces, les catalogues de vente par correspondance, les emprunts faits à d’autres auteurs, une collection de cartes postales, un inventaire des aliments consommés au cours d’une année, ou des notes comme celles qui forment  le cahier des charges de La Vie mode d’emploi et qui peuvent concerner tout ce qui tombe entre les mains, d’un bouquet de tubéreuses à une carte du Massachusetts, pour entrer ensuite mot pour mot dans les scènes du livre. L’idée est celle d’un magasin où même les objets immatériels, les souvenirs, les pensées et les rêves sont traités comme des choses matérielles, dans l’extériorité de tout ».[2] Citant l’écrivain et urbaniste Paul Virilio, c’est aussi « une façon de créer une mémoire du monde ».

   L’extériorité et sa multitude de choses et d’objets, d’éléments sériels, invite à une manœuvre d’écriture dont le souci chez Perec est : non pas analyser, mais décrire, énumérer ce qui habite notre quotidien, ce « night-and-day de la vie de masse », « espace multiforme » qu’on ne se donne jamais vraiment la peine d’observer, la banalité étant toujours considérée comme désuète et sans intérêt. Mais de quelle quotidienneté est-il question ? si ce n’est « la quotidienneté inaperçue » qu’il s’agit de vraiment  apercevoir, découvrir, voire même surprendre. Domique Rabaté rappelle ce que tout projet de livre chez Perec signifie, celui « de rompre un aveuglement », et en mémoire de l’écrivain, ce beau portrait de « l’usager de l’espace » : « un individu parmi d’autres qui changent de lieux, qui rêvent d’une impossible patrie, et voyagent de signes en signes. Lui le fait par l’écriture qui est peut-être la meilleure inscription possible, dans un espace à la fois mental et matériel ».[3]

   Maryline Heck re-convoque l’origine du mot « l’infra-ordinaire » (inventé par Paul Virilio) : « description de ce bruit de fond de nos existences, habituellement passé sous silence » ; l’infra-ordinaire chez Perec : « Interroger l’habituel. Mais justement, nous y sommes habitués. Nous ne l’interrogeons pas, il ne nous interroge pas, il semble ne pas faire problème, nous le vivons sans y penser, comme s’il ne véhiculait ni question ni réponse, comme s’il n’était porteur d’aucune information. Ce n’est même plus du conditionnement, c’est de l’anesthésie. Nous dormons notre vie d’un sommeil sans rêves. Mais où est-elle, notre vie ? Où est notre corps ? Où est notre espace ? ». [4]

   Observateur des « réalités silencieuses », Georges Perec est ce peintre du quotidien, dans son ingéniosité d’inventorier et d’inventer.

 

 

   « Les textes de Perec ouvrent une partie de mon inconscient (c’est pour moi le signe distinctif de la grande littérature),  à l’inverse de la plupart des livres vantés par les médias et qui, eux, le bloquent, ne sachant jouer que sur l’obsession, la peur, la rage et autres rétrécissements internes ». (« La vengeance de Perec », Pierre Furlan, p.158)

 

 

 

(Les carnets d’eucharis, Nathalie Riera, janvier 2012)

 

PRESENTATION

http://www.europe-revue.net/presentation-janvier-fevrier.html

 

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 Nathalie Riera_Georges Perec, _un regard en biais__Les carnets d'eucharis, 2012.pdf

 

 

 

 

 



[1] [p.24]

[2] [p.33/34]

[3] [p.51]

[4] L’infra-ordinaire, Le Seuil, 1989

16/01/2012

Zbigniew Herbert, Corde de lumière (une lecture de Tristan Hordé)

Zbigniew Herbert Corde de lumière

(Œuvres poétiques complètes I)

- traduites du polonais par Brigitte Gautier, édition bilingue -

Editions Le Bruit du Temps, 2011

 

 

LECTURE : Tristan Hordé

 

 

      Les œuvres de Zbigniew Herbert (1924-1998) — une dizaine de livres de poèmes, des essais — restent peu connues en France(1). Le premier volume des œuvres poétiques (qui en comprendra trois) rassemble Corde de lumière (1956), Hermès, le chien et l'étoile (1957) et Étude de l'objet (1961) ; il est précédé d'une "conversation de l'auteur avec lui-même" autour du thème de l'écriture de poèmes. Parallèlement à cet ensemble, paraît un volume d'essais, Le Labyrinthe au bord de la mer (2000 en polonais, donc posthume), consacré aux voyages du poète en Grèce et en Italie et à ses réflexions sur l'Antiquité ; il sera suivi de deux autres.

     On peut commencer l'exploration des poèmes, en vers et en prose, en examinant ce que Zbigniew Herbert rejette. Dans les réponses qu'il propose à ses propres questions, il marque nettement son refus du réalisme socialiste qui ne tient aucun compte de la réalité observable. Il revient sur ce point à plusieurs reprises dans ses poèmes, par prudence sans allusion directe à ce qu'imposait le pouvoir en Pologne mais sans aucune ambiguïté. Un écrivain peut sans doute présenter un monde idéal, décrire les choses quotidiennes en gommant toutes aspérités, et donc ignorer que le réel s'imposera à un moment ou à un autre ; ainsi l'image de la "La chambre meublée" [titre d'un poème] sera, pour ne pas choquer, celle d'un « monde faux » — mais « du papier peint arraché / des meubles non apprivoisés / les taies des glaces sur le mur / voilà l'intérieur réel » (p. 225). De manière analogue, il est inutile de peindre « toute la nuit en rose » les murs gris de la prison : cela n'empêchera pas l'enfermement. Donc, il faut sortir des leçons imposées, quoi qu'il en coûte — et Z. Herbert a payé le pris — et tenter de dire ce qui est en sachant que tous « nous avons des cailloux / noirs à la place des yeux » (p. 75).

     Quoi écrire ? « [...] le domaine des choses, le domaine de la nature me semblait être un point de repère, et également un point de départ, permettant de créer une image du monde en accord avec notre expérience » (p. 17). Donner une "image du monde" en choisissant pour point de départ un tabouret, des chaises ou une table, c'est aller contre toute idéalisation de la réalité et, en même temps, affirmer que « nous sommes réels » (p. 113). Cette attention à ce qui passe inaperçu peut aussi être la base d'une critique d'une certaine poésie ; dans un portrait de la poule (bien différent de celui de Jules Renard dans ses Histoires naturelles), il retient la rupture entre elle et les autres oiseaux, comportement né de la vie avec les hommes, et notamment « cette parodie de chant, ces supplications brisées pour une chose incroyablement ridicule : un œuf souillé, blanc, rond. // La poule rappelle certains poètes. » (p. 343) Décrire ces choses sans relief, qui conduisent à séparer « la chose de l'apparence » (p. 167), ne signifie pas pour Zbigniew Herbert qu'il faudrait seulement s'attacher à un réel "nu" ; bien des poèmes, surtout ceux en prose, débordent ce cadre et construisent un univers de fantaisie, parfois de non-sens : ainsi, le chat « arrache les oiseaux des arbres avant qu'ils soient mûrs » (p. 321), l'ours refuse d'aller à l'école, etc. La poésie est comme le coquillage vide qui « raconte / les mers évaporées dans le sable » (p. 421)

     Pour ce qui est du "domaine de la nature", il apparaît de manière récurrente sous une forme élémentaire : l'eau, la terre, le feu, l'air, puis les fleurs (seule la rose est citée, abondamment), les arbres (« un tronc de bouleau comme une corde de lumière », p. 85), les oiseaux, auxquels le Poète est associé :

     que serait le monde

     s'il n'était plein

     de l'incessant va-et-vient du poète

     parmi les pierres et les oiseaux

     (p. 197)

     Ce monde naturel se caractérise par le fait qu'il donne sans détour ce qu'il est. On pourrait reconnaître une forme de panthéisme dans la poésie de Zbigniew Herbert qui, l'une des rares fois où il s'adresse à un lecteur, écrit : « sans attendre de meilleure récompense / assieds-toi sous l'arbre » (p. 85). Et c'est à partir des éléments naturels que le poète peut décrire le monde des choses : « il me faut regarder les toits comme la pleine mer » (p. 219), écrit-il.

     L'univers de Zbigniew Herbet est plus complexe ; y est intégré une relation active à la tradition, qu'il s'agisse de l'Antiquité — des poèmes ont pour thème Athéna, Marc-Aurèle, Néfertiti, Jonas, etc. — ou plus largement du passé. Les références ne doivent rien à une quelconque nostalgie, l'Antiquité est toujours une source vivante et, à l'occasion, se révèle un instrument critique ; si Arion, ce cheval doué de la parole, chante l'harmonie, le paradis perdu (« tout est aussi bon / qu'au commencement », p. 147), ce n'est cependant qu'un chant..., et il s'éloigne sur la mer, « seul » (p. 149). Et de la statue d'Apollon appréciée dans la jeunesse, « il ne reste qu'un socle vide » (p. 49). Quant au passé, il est doublement important : opposé aux "lendemains qui chantent" du pouvoir, c'est aussi un appui pour comprendre ce qui est vécu aujourd'hui — « la poésie est fille de mémoire / elle veille les corps dans le désert » (p. 273).

     On lira, insistante dès le premier livre, une volonté d'être lisible, d'écrire sans détour — « je donnerai toutes les métaphores / pour une expression / comme une côte écalée de ma poitrine / pour un mot / qui rentre / dans les limites de ma peau » (p. 169). Une poésie donc qui s'en tient à un vocabulaire commun, à une syntaxe sans recherche, qui privilégie l'énumération plutôt que l'image : l'essentiel, toujours, est de parvenir à « décrire la simple émotion » (p. 169), de la susciter chez le lecteur non pour rejeter la réflexion mais pour qu'elle ne soit pas première. Dans un poème de circonstance, "Aux Hongrois", écrit au moment de l'insurrection en 1956 contre le pouvoir communiste, les quatre brefs quatrains ne visent pas à décrire ce qui se passait, plutôt à exprimer « d'une manière aussi pure et transparente que possible » (p. 16) la solidarité avec ceux qui luttaient pour des valeurs. Cela est peu ? C'est que les mots du poète n'ont pas le pouvoir de changer quoi que ce soit, ni d'expliquer le monde. Dans une parabole, le "Poète" relate que « deux ou trois / fois / [il a] été sûr / de toucher au fond des choses / de savoir » (p. 475) ; sa recherche a été interrompue par une intervention extérieure mais, quand il l'a reprise, il a atteint son but et a pu enfin contempler « le cœur des choses // une étoile morte // une goutte noire d'infini » (p. 477).

     Alors ? Il y a sans doute dans l'affirmation de l'absence de pouvoir de la poésie un refus de l'aveuglement de ceux qui écrivaient pour vanter « le royaume de l'avenir », pour faire croire que le « paradis sera prêt / à la fin de la lutte des classes » (p. 277). C'est en même temps dire que les poèmes, comme le reste des créations humaines, disparaîtront dans l'oubli. Dans la série des éléments de la nature, le dernier cité par Zbigniew Herbert est l'herbe : « l'herbe qui survient lorsque l'histoire s'accomplit / et qui est un chapitre du silence » (p. 117). On relèvera ici la rencontre avec un poète fort différent, Jude Stéfan, qui évoque dans les Suites slaves « l'oubli des herbes » (André Dimanche, 1983, p. 81).

(Les carnets d’eucharis, Tristan Hordé, janvier 2012)

Les carnets d'eucharis

 

 

 

 

 

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1  Trois recueils, tous épuisés, ont été traduits : Monsieur Cogito et autres poèmes (Fayard, 1990), Redresse-toi et va (Orphée/La Différence, 1995) et Élégie pour le départ suivi de Rovigo (Le Passeur, 2000). Deux essais sont disponibles, Un barbare dans le jardin (Le Rocher, 2000) et Nature morte avec bride et mors (Calmann-Lévy, 2003).