19/10/2008
Dernière parution
JAMAIS NE DORS
Pascal Boulanger
Editions Le Corridor Bleu
ISBN : 2-978-2-914033-26-8 /96 p.
12 x 18,5 cm. / 13 € / port : 2 €
Règlement à l'ordre du Corridor Bleu
185, rue gaulthier de rumillly 80000 amiens
Note de lecture
Par Nathalie Riera
Dans son dernier livre, Pascal Boulanger nous reçoit et on se laisse recevoir : il n’y a plus de démarcation entre là-bas et ici, hors de soi et en soi. Désormais il y a « éclat et silence de ce qui passe et n’est plus là », en d’autres termes il y a l’amour, qui selon P.B. se définit comme « l’histoire d’une folie, d’un espace ouvert à l’insensé (…) un amour qui se multiplie en ses voyages ».
Avec « Jamais ne dors », nous sommes invités à entrer dans la vérité, à rejoindre comme dans la musicalité d’un songe exil et miracle. Le texte multiplie à sa manière ses propres échappées dans le songe d’un espace-temps sensible, traversé d’aucun ressentiment, espace où se joue l’amour, autant sa grâce que son abîme.
Le déploiement du temps semble n’avoir lieu que dans ce qui s’endort, « en plein dans le sommeil », à cet endroit de l’absence et de l’exil si nécessaires à l’amour de combler l’être malgré le manque. C’est dans la séquence qui suit que se définit au mieux l’amour comme rencontre insufflant au poète de se porter sans crainte et sans faillir vers ce qu’il nomme l’amour absolu :
C’est un amour absolu
S’il s’abaisse, je le vante. S’il se vante, je le vante davantage
Un amour qui n’a pas de lien
Qui se révèle dans la distance
Dans le corps qui est tout entier dans la voix
Un amour qui ne rêve pas de perversion
Qui se situe au-delà de toute interprétation
Qui ne met pas, contre ses yeux, la parole du destructeur.
L’amour absolu ? Avec lui qu’il apprend, avec lui qu’il peut encore s’enrouler « dans la chaleur en dessinant les contours de l’instant », avec lui qu’il est rendu, non pas esclave à l’aimée, mais avec ce qu’il lui reste de plus libre et de plus enjoué, pouvant ainsi accueillir cet absolu et l’abriter dans sa demeure silencieuse. Chez P.B. l’aimée est une évadée, qui seule connaît la sensualité du repos et du sommeil. Mais elle est aussi et surtout « une parole sans reproche qui autorise l’écriture, en souligne la beauté ».
Quand un regard vous reçoit c’est un regard qui vous soutient et vous met en demeure de vous dérober à tout ce qui est haïssable et vous éloigne du « simple fait d’exister ». Avec l’évadée se déroule ce « qui n’est que de passage » comme peuvent l’être « Le songe/L’extase/Et la tendresse ». Et c’est parce qu’il y a exil, séparation, manque et absence que d’aimer de toute éternité n’est ni vain ni insensé. Sous la plume de P.B. l’évadée est la passante, l’étrangère, celle qui ne se tient pas « à l’étroit de l’asthme ! ». Elle est faite de tous les contrastes et de tous ces verbes qui la vantent et font la force d’aimer, et qui n’est rien d’autre que de vivre délié, dénoué, élargi. L’aimée peut fuir à tout moment, c’est dans le sommeil qu’elle disparaît et c’est dans son sommeil à elle que l’aimé peut dormir.
A la question : qui est-elle ? Elle est ce qu’elle-même ne sait pas et ce qu’elle ne veut même pas savoir, répondrait Pascal Boulanger. La vérité et l’amour ne sont pas à savoir. D’ailleurs, comme tous ses livres précédents, nous retrouvons cette même volonté infaillible de ne pas défendre l’amour mais le prôner contre « la parole du marchand ». Et lorsqu’un poète est ainsi visité par la grâce et l’abîme d’aimer et d’être aimé, comment rêve et réalité peuvent-ils se prolonger dans un même espace-temps, et trouver accord contre ce qui en soi ne triomphe plus ? Très vite, nous pouvons retrouver notre position d’esclave ou de naufragé, lorsque des lèvres toutes frémissantes nous les quittons pour retourner « aux bouches tremblées d’épuisement ». Et néanmoins, toute demeure en soi est-elle en péril ou sous la menace de s’effondrer : « Il y a ce retournement inattendu de la malédiction en exultation ».
Pascal Boulanger précise que l’amour est seul au monde. Seul, mais arraché à « l’ordre fou des hommes » aux « passions tristes », à l’aversion, à l’idolâtrie, à la haine de l’amour et au « règne où le divin ressemble à un viol ».
Notre époque est-elle à cette « parole qui n’aime pas », s’il y a bien une vérité à laquelle nous pouvons souscrire : « Lutter contre le mal est lui faire trop d’honneur ». Et parce que l’amour est solitude et retrait, on ne peut ni l’épuiser ni disposer de lui, seulement se laisser envahir par sa bienveillance qui se déverse à brassées dans le sommeil du monde.
Nathalie Riera – Septembre 2008
09:41 Publié dans Pascal Boulanger | Lien permanent | Commentaires (1) | Imprimer | | Facebook
Commentaires
je vais t'appeler Mary ou meunier ; frère Jacques peut être , ,,,,
Écrit par : lam | 24/10/2008
Les commentaires sont fermés.