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24/04/2008

Béatrice Machet

à la manière des « porteurs de feu »*

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Photo : Michel Deville
 
 

 

Tu te retires                        

                         en un lieu élémentaire                        

                         pèlerinage dans l’acuité                        

                         où l’ivresse se trouve conduite                        

                         jusqu’à son geste de métamorphose            

                         juste avant l’aveuglement : l’éblouissement                        

                         mirage ou résurgence : la flamme est ce que tu vois                                                           

                                                                           juste avant la cascade

 

                                                                           (…)

 

Tu te retires                                                                liquide                        

                       et l’intervalle oscille                        

                       bat la mesure polaire                        

                      demi-lumière ou demi-nuit                        

                      franges et spectres                        

                      végétaux comme minéraux                        

                      sont tentés par un vide bleuté                        

                      qui enseigne la sérénité :                                                           

                                                                                     la plénitude dans l’aridité

 

(Extraits du recueil de Béatrice Machet Tu te retires)

 

Qui ne connaît pas ce désir d’une amplitude, d’un saisissement du haut ?

Se retirer. Le saisissant départ pour mieux s’inclure ailleurs, à cet autre endroit qui nous serait précisément un vrai « lieu d’accueil ». Mais très vite, ne pas se laisser abuser, rester bien enraciné. De notre enracinement seulement, l’essor est possible.

 

Si les poètes de notre temps ont pour unique évasion la matière et non l’imaginaire, poètes du réel aux écritures désemplies d’affabulations, ne doivent-ils pas alors se risquer à nous être des « porteurs de feu ».

 

Défi de ces poètes que de trouver l’élan au creux même des ombres immobiles, ou tel que l’on chercherait un brin de silence dans la stridence.

 

« Porteurs de feu » à la manière de ces poètes décidés à toutes les plus grandes et les plus loyales ruptures. Faire se déchoir les barrières, pénétrer les enceintes inconnues de soi-même. Défi que de se retirer et s’avancer. Ainsi Béatrice Machet nous convie t-elle à cet

 

aller-retour alchimique

 

de la matière à l’essence

 

« la plénitude dans l’aridité » est une invite à ne pas se laisser flouer par la dualité, accepter que l’homme soit un lieu d’équivoques et d’oppositions. Mais néanmoins un lieu d’aucun ressentiment. Peut-on ainsi penser que tout monologue intérieur ait lieu dans le débat le plus mouvementé, que la solitude n’y soit pas infertile, la controverse se proposant alors comme la plus prometteuse en alliance ou en fraternisation.

 

En poète du concret et de l’insaisissable, Béatrice Machet nous propose la poésie comme respiration mystique de la vie…

 

caresse d’eau sans éroder … tu visites le relief

 

            tu en ressens l’éclosion : un œil immense

 

                                               qui s’ouvrirait sur les vastitudes intérieures

 

Entendre par respiration mystique :

 

… la poésie comme ensoleillement dans nos récifs intérieurs, comme espace pour le corps et demeure pour l’esprit.

 

Lorsqu’on lit Béatrice Machet, il y a comme une accessibilité immédiate, mais la lisibilité est-elle seulement liée au temps de la lecture, sorte de nitescence émise le temps de lire, le temps de nous ouvrir à des champs de sensations qui dénouent ce que nous pensons être l’indénouable, tout éclair de lucidité ne réduisant en rien l’inintelligible. Toujours se nourrissent les ombres de nos faims, des ombres que la lumière ne cherche ni à vaincre ni à détruire.

 

A l’intention de Béatrice Machet, et plus précisément de sa croyance en ce qu’elle écrit, et qui fait qu’elle écrit, et qui fait que nous croyons au texte que nous lisons (mais croyance au sens de croissance), je citerai Edmond Jabès : «  Tu perçois ce qui, avec toi, s’efface. Tu ne peux saisir ce qui dure plus que toi ». **

 

Si la croyance est croissance, et si nous ressemblons à ce que nous lisons, du moins est-ce parce le poète n’a pas oublié qu’il est lui aussi un lieu de toutes les métamorphoses, de toutes les régressions et les révolutions, de toutes les exaltations et les soulèvements, mais également un être en ressemblance avec l’autre.

 

Et s’il ne s’agit pas d’avoir des yeux pour voir, il ne s’agit non plus de croire pour être croyant.

 

Et n’est-ce pas la quête de tout lecteur que d’exercer sa vue et sa croyance autrement et à distance de l’infernale intoxication qui nous sépare tant les uns des autres.

 

La sérénité dans un courant d’air.

 

* Allusion à l’essai de Salah Stétié, « Les porteurs de feu » publié en 1972.

** Edmond Jabès, L’ineffaçable L’inaperçu Le Livre des Ressemblances, III – L’imaginaire Gallimard.

 

©Nathalie Riera – Tous droits réservés

17 avril 2008

Pour de plus amples infos sur l'auteur

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"Une étape dans la clairière"

 (du 22 AVRIL 2008, NUMÉRO 4)

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sites à visiter

L

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Editions de l’Amourier

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Revue des littératures amérindiennes contemporaines

http://surledosdelatortue.free.fr/

 

Scriptorium

http://poesiesud.free.fr/scriptorium/index.html

 

Courriel de l’auteur

machet.b@wanadoo.fr

 

Bio

Béatrice Machet, Vit dans le Var, depuis vingt cinq ans.

Sa passion de l'écriture lui vient de la danse. Au sortir de l'adolescence, tout en écrivant, elle rencontre Daniel Larrieu, Maguy Marin, Michel Kelemenis, Angelin Preljocaj, Régine Chopinot, Odile Duboc… ; c’est pourtant d’abord dans l’univers de la S.F. qu’elle prend contact avec les milieux littéraires. Imprégnée des cultures Indiennes d’Amérique du nord, elle est également la traductrice d’une douzaine de poètes Indiens vivant sur le sol des U.S.A. Aime à collaborer avec les plasticiens (H.Baviera, C.Garcia, G. Serée, violette Adjiman, Youl, Odine Guinand, Corine Leridon), les compositeurs (J. Dudon sur le festival des MANCA et aux NOCES HARMONIQUES, Eric Barthes ou autres pour des improvisations), ainsi qu‘avec des danseurs (Jasone Munoz, Yan Giraldou).

Jean Hugues MALINEAU (poète et responsable chez Gallimard de la section Folio Gallimard), le premier, saura lui donner confiance pour "oser" proposer ses textes à la publication.

 

D’où parutions de textes pour Encres Vives, Jalons, Sapriphage, Interventions à Hautes voix, le Matin Déboulonné, Parterre Verbal, Les dossiers d’Aquitaine, Quimper est poésie, Place au Sens, Lieux Dits, Autre Sud, Saraswati, Lieux d’être, Lou Andrea … Comme en poésie, Verso, Tremalo, A l’Index, Liqueur 44 , Axolotl, Commentaires ... etc, etc.

 

Depuis longtemps plongée dans l’univers des Indiens d’Amérique du nord, elle entre en relation avec des auteurs Indiens contemporains dont Carter Revard, Joseph Bruchac, John D Berry, Mike Austin, Simon Ortiz, Diane Glancy, Maurice Kenny, Hershman John, Deborah Miranda, Mark Turcotte … Anime sur le site la toile de l’un une rubrique de poésie contemporaine des Indiens d’Amérique du nord.

 

Nombreuses lectures publiques et performances ( Lyon, Vaucluse, Alpes-Maritmes, Var, Marseille, etc.), participation au printemps des poètes, à la manifestation 30 poètes dans 30 collèges du Var, La poésie a un visage comme La poésie des deux rives (Alpes Maritimes). Donne des conférences à propos de la poésie Indienne nord Américaine d’aujourd’hui. Anime des ateliers d'écriture en milieu scolaire et associatif.

 

* Traduite en Albanais, présente dans l’anthologie de la poésie féminine contemporaine Française parue en 1999 en Albanie.

 

          Traduite en Anglo-Américain. Présente dans des numéros anthologiques ou à thèmes, en Ecosse, grâce à l'éditeur G.J. Reilly.

 

          Traduite en Espagnol, présence régulière dans la revue Galicienne l’Amastra-n-Gallar d’Emilio Arauxo

 

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