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16/04/2014

Thierry Metz

 

 

DIERESE N°56

revue poétique et littéraire

 

Thierry Metz © Françoise Metz

 

Thierry Metz

Poète

(1956-1997)

 

 

 

 

 

Lecture Nathalie Riera 

Thierry Metz

 

« quelques morceaux de lumière »

____________________________________________________________________________

 

« Né en 1956, Thierry Metz a choisi de disparaître le 16 avril 1997 », lit-on dans la nouvelle édition revue et augmentée de « L’homme qui penche » (Pleine Page, 2008). Puis, dans la préface de l’éditeur Didier Periz : « A l’époque, chaque matin, avant de me rendre au travail, je lisais de la poésie. C’était le meilleur moyen que j’avais trouvé d’affronter la journée. Je regagnais un peu de mon intérieur, quelques morceaux de lumière en guise de gilet pare-balles contre les agressions multiples de la vie sociale ». Dans son souvenir de Thierry Metz : « Je me souviens d’une crise d’éthylisme, un soir, entre le Cours Victor Hugo et la rue Sauvageau. Je me souviens qu’il nous a raconté la scène de l’accident de son fils sur la nationale 113 et qu’on a pleuré ». [1] Deux séjours au centre hospitalier de Cadillac, en Gironde, le 31 janvier 1997 Thierry Metz achève son journal « L’homme qui penche » (I et II):

  

   Je ne sortirai pas d’ici, sans ce livre, sans ses perspectives. En plâtre. En papier. En chiffon.       Les matériaux de ce qu’on peut être ici, matériaux psychiatriques, matériaux d’atelier, qu’on                travaille et retravaille puis qu’on abandonne au premier venu.

   Ce que nous sommes.

   [fragment 60][2]

 

Ecrire pour reconstruire ? Comment y répondre ?

On ne peut pas lire Thierry Metz sans lui reconnaitre ce que bien des poètes critiques entendent du rôle de la poésie en ces temps dévastateurs. Vivre au plus près du quotidien et de l’ordinaire, se tenir à la source des êtres et des choses, se laisser saisir au cœur de la pleine réalité qui se veut le grand chemin d’apprentissage du poème. Le réel n’est pas une légende et n’a rien d’irrationnel. Et le tragique de toute vie, dans son ciel noir, est aussi un espace à l’empathie, une place à la profondeur. Que faire dans le réel ? « sinon restituer au chemin/son aujourd’hui ».

On gagne de relire Thierry Metz en ces temps de surenchère et d’arrogance verbale (« Soleil et coq sont les deux extrêmes/de ta parole »[3] ). Dans « Dolmen » (Prix Froissart, 1989), place non pas à l’empesé mais à l’élémentaire, car tout au long de son vivant, Thierry Metz n’aura pas réduit la poésie à un simple exercice de style. Aucune place à la sublimation pour le poète « échappé des fables ». Thierry Metz reste dans l’expérience de ce qui se vit et de ce qui est, et ce qu’il en recueille, dans l’espace de l’écriture se transmue en bribes lumineuses de ce peu de chose : « l’infime est plus sûr que le reste ».

Aucune nuit n’est exclue dans l’écriture du poème, et le monde jamais dessaisi de son énigme et de sa transparence.

 

   […] Pas un traité ni une parabole, je ne sais pas faire ça, je laisse ce travail aux abstinents ou    à la raison pure. J’essaye, à ma manière et plus simplement, de faire entrer l’homme que je          suis devenu dans la maison de la rencontre et de la réparation. Si ce n’est lui tout entier, au          moins ses mains et son visage. Tout n’entrera pas.

   [fragment 6]

 

Dans la maison de la rencontre et de la réparation :

 

   Que seulement passent les heures.

   Pour les empiler.

   Pour conserver l’interrogation.

   La délivrer des réponses.

   [fragment 9]

 

  

 

   Il n’y a ici qu’un va-et-vient de petites choses. Tout est toujours à convoquer. On atteint                quelque chose non pour le dépasser mais pour l’atteindre encore.

   [fragment 16]

 

  

 

   […] Le vrai travail est d’être aussi vide que ce temple.

   [fragment 65]

 

 

Le projet d’écrire n’est pas un projet de guérison. La nuit est tombée sur Thierry Metz, et il a dédié cette nuit à tout cela qui lui fut donné, à tout cela qu’il a aimé.

 

 

 

 

Janvier 2012 © Nathalie Riera (pour la revue Diérèse N°56 – Printemps 2012)

 

 

 

 

 

■ LIEN : http://diereseetlesdeuxsiciles.com/57374.html

 

 

La revue Diérèse, créée il y a quatorze ans par Daniel Martinez, s'attache à publier des textes inédits d'auteurs du monde entier. Elle propose aussi des textes de réflexion autour de livres et de films. Chaque numéro comporte environ 270 pages. Elle a notamment publié des textes de Jean-Claude Pirotte, Michel Butor, Pierre Dhainaut, Isabelle Lévesque, Henri Meschonnic (+), Max Alhau, Bernard Noël, Lionel Ray, Richard Rognet, Jean Rousselot (+), Chantal Dupuy-Dunier, Jacques Ancet, Ariane Dreyfus, Françoise Hàn, Yves Charnet, Joël Vernet...Le numéro 52/53, déjà entièrement consacré à Thierry Metz, est toujours disponible.

Diérèse n°56 (mai 2012) est consacré à Thierry Metz : Poèmes inédits, lettres, dédicaces, photographies... Dossier dirigé par Daniel Martinez et Isabelle Lévesque. Avec des textes de : Sophie Avon, Gérard Bocholier, Lionel Bourg, Gérard Bourgadier, Eric Dazzan, Pierre Dhainaut, Bernadette Engel-Roux, Gilles Lades, Paul Leuquet, Isabelle Lévesque, Daniel Martinez, Jean-Michel Maulpoix, Hervé Planquois, Nathalie Riera, Joël Vernet, Muriel Verstichel, Christian Viguié... Illustrations de Denis Castaing et de Michel Bourçon.


 

Diérèse

 

 

 

 



[1] Revue Diérèse, N° 52/53, Printemps 2011 – Didier Periz : « Je me souviens de Thierry Metz », p. 15

[2]Thierry Metz, L’homme qui penche, Pleine Page éditeur, 2008

[3] Thierry Metz, Dolmen, éd. Jacques Brémond, 2001, p. 13

20/08/2008

Thierry Metz

Une petite voix que nous connaissons bien
nous rend visite le soir. Une voix d'enfant qui
nous raconte ce qui se passe là-bas, comment
sont les gens, ce qu'on y trouve. Lentement il
nous berce, nous accompagne jusqu'au sommeil, nous ferme les yeux...
Non.
Rien de cela.
Qu'une inépuisable, inexorable absence.
Rien qu'une mort.


Et un nom : VINCENT.

(Lettres à la bien-aimée - L'arpenteur © Gallimard)

 

Né à Paris en 1956, Thierry Metz vivait près d'Agen où il exerçait le métier de maçon. Il s'est suicidé en avril 1997.

 

Je n'arrive pas à leur parler. Pas
entièrement comme je voudrais. Je
laisse des mots derrière les mots -
arrivés mais cachés, en retrait de
l'enterrement.
J'effleure ce que j'écris comme après
une longue journée de travail.
Chaque mot m'essouffle.

(Extrait de L'homme qui penche)

LHommeQuiPenche.jpg

 

à lire

sur le site Esprits Nomades 

http://www.espritsnomades.com/sitelitterature/metz/metzthierry.html

 

 

sur le site des Editions Pleine Page

http://pleinepage.ath.cx/PleinePage/editeur/auteur.php?id_auteur=9

 

 

un dossier sur Remue.net

http://remue.net/cont/metz01.html

 

 

Ouvrages publiés :

Sur la table inventée (Jacques Brémond, prix Voronca 1988)

Dolmen, La demeure phréatique (Cahiers Froissard, prix Froissard 1989)

Le Journal d'un manœuvre (Gallimard, l'Arpenteur, 1990)

Entre l'eau et la feuille (Arfuyen, 1991)

Lettres à la Bien Aimée (Gallimard, l'Arpenteur, 1995)

Dans les branches (Opales, 1995)

Le drap déplié (L'Arrière Pays, 1995)

De l'un à l'autre (Jacques Brémond, 1996)

L'homme qui penche (Opales, 1997)