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08/02/2010

Dominique Grandmont (lecture de Brigitte Donat)

 

NOTE DE LECTURE

(Brigitte Donat)

 

Dominique Grandmont

Mots comme la route

 

 

Mots comme la route, dernier recueil poétique de Dominique Grandmont constitue une avancée d’autant plus forte qu’elle s’est formée sur beaucoup de silence.

Composée d’une alternance de bloc-textes et de courts vers syncopés, l’œuvre laisse une parole s’accroître librement jusqu’à brûler l’espace qu’elle franchit.

Ainsi la vitesse que procure l’enchaînement d’axiomes, dans le premier texte, balaient nos points d’ancrage et les mots, lie noire sur papier, forment l’asphalte d’une route lisse que nul horizon ne vient entraver. Un champ d’immanence se déploie et nous rend à notre liberté première. Détachée de toute pesanteur subjective, la langue sait alors prendre son élan, se délier, parler d’elle-même et constituer son propre dépassement.

Ces mots n’appartiennent à personne. Ce sont eux qui ont pris ma place, pour que le rien soit quelque chose.

A l’autonomie de la langue répond une charge de témoin : le poète en retrait capte les confins d’une parole qui se multiplie, ses capacités à faire de la réalité autre chose que ce qu’elle est. Il nous invite à sortir de tous les miroirs afin que l’univers puisse redevenir lui-même, infini. Si les pistes se brouillent, c’est pour mieux affronter la perte. Les mots ne comptent pas, constate Grandmont, j’ai beau écrire, je ne vois pas ce qu’ils voient dans le désert des livres, ni quelle liberté.

Puisque la signification échoue à enclore le monde dans un dire, (ne la contredit-il pas sans cesse, la débordant infiniment ?), l’écriture s’affranchit de son impuissance.

Ce que je lui fais dire n’a pas de sens, mais ce que je lui retire la grandit.

 De cette béance, à notre grand étonnement, surgit la vraie vie.

Elle est cette parole qui n’a pas commencé, cette insensée qui veut tout dire mais qui n’oubliera pas un visage.

 

© Brigitte Donat, février 2010

 

 

Editions Tarabuste, 2009