13/08/2011
Henri Cole, Nécessaire et impossible
Henri Cole
Poète américain
(né en 1956)
[…]
I can feel my heart beating inside my heart
[…]
NECESSARY AND IMPOSSIBLE
It is a nation born in the quiet part of the mind,
that has no fantasy of omnipotence,
no God but nature, no net of one vow,
no dark corner of the poor, no fugue-work of hate,
no hierarchies of strength, knowledge or love,
no impure water spasming from rock, no swarm of polluted flies,
no ash-heap of concrete, gypsum and glass,
no false mercy or truths buried in excrement;
and in this nation of men and women,
no face in the mirror reflecting more darkness
that light, more strife than love, no more strife
than in my hands now, as I sit on a rock,
tearing up bread for red and white carp
pushing out of their element into mine.
NECESSAIRE ET IMPOSSIBLE
C’est une nation née dans la partie sereine de l’esprit,
sans fantasme de toute puissance,
sans Dieu sauf la nature, ni piège d’un serment unique,
sans coin obscur de pauvres, ni fugue de haine,
sans hiérarchies de force, de connaissance ou d’amour,
sans eau impure pulsée d’un roc, essaim de mouches polluées,
amas de cendres de béton, gypse et verre,
sans fausse pitié ou vérités enfouies dans des excréments ;
et dans cette nation d’hommes et de femmes,
sans visage dans le miroir reflétant plus de ténèbres
que de lumière, plus de conflit que d’amour, pas plus
que dans mes mains à présent, tandis qu’assis sur un rocher
je déchire du pain pour les carpes rouges et blanches
qui de leur élément s’élancent dans le mien.
Middle earth/Terre médiane Editions le Bruit du temps, 2011Édition bilingue
Traduction de l'anglais (États-Unis) et présenté par Claire Malroux
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26/02/2011
Henri Cole, Terre médiane (à paraître)
Terre médiane
Henri Cole
© Star Black
Occupé à nettoyer les géraniums, je me vois
comme je suis, presque nu dans la chaleur,
essayant de faire vivre un microcosme
de tons roses noircis, fanés par le soleil et la pluie,
qui ploient et frémissent sous mes sécateurs
tandis que je sépare les fleurs pourries des vivantes,
comme un homme seul emplit un vide de paroles,
non pour consoler ou indiquer où est le bien,
mais pour dire quelque chose de vrai qui a du corps,
parce que c’est la preuve qu’il existe.
21:57 Publié dans Henri Cole, Le Bruit du Temps | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer | | Facebook
06/01/2011
Stanislas Brzozowski, HISTOIRE D’UNE INTELLIGENCE...
Une lecture de Nathalie Riera
©
HISTOIRE D’UNE INTELLIGENCE
Journal 1910-1911
Stanislas Brzozowski
(Editions Le Bruit du Temps, 2010)
Rédigé à la fin de sa vie, dans les années 1910-1911, le Journal de S. Brzozowski, Histoire d’une intelligence, ne peut nous laisser indifférent, tant ces 244 pages publiées un siècle plus tard par les Ed. Le Bruit du Temps révèle une pensée à l’œuvre, faite de l’étoffe d’un esprit qui, aux dires de son auteur, « est toujours un banni, un hors la loi » (185). Esprit d’un écrivain non contaminé en ce siècle des « abrutissantes superstitions politiques », des « stérilités sociales », avec ce si peu d’aventuriers de la pensée (parmi eux, philosophes, poètes et autres lettrés), ces «grands seigneurs de la vie » que le XVIIIème siècle a prodigieusement produit. L’exigence de S. Brzozowski étant de ni comprendre ni révérer ce qui ne relève pas du courage intellectuel.
Mais une telle exigence n’attire à sa table que très peu de convives. Dans la vaisselle de la violence politique et de l’impuissance culturelle, tout ce qui tend à mettre en question l’homme, à valoriser la vie de l’humanité, à considérer les sens « comme des catégories de création », et « non pas comme des organes passifs d’information » (143), tout cela devient passible de cette même sanction si typique à ces époques où l’homme est dogmatisé par des « torrents de clichés qu’on ne peut pas endiguer », autant que par ses propres constructions conceptuelles ; incapable de produire à partir de lui-même, et encore moins dans la tâche « de participer toujours davantage au dur travail de l’humanité » (173).
Subtilité et sérénité ne font pas partie du menu ; cela est contraire à « cet ennui officiel qui empoisonne lentement les esprits et les habitue à considérer une activité intellectuelle spontanée comme quelque chose d’anormal, qui n’est même pas exigé » (122). Comment ne pas alors en venir à cette endurance intellectuelle contre tout ce qui peut ainsi s’opposer « à une culture profondément consciente ». Sur ce sujet, S. Brzozowski ne trouve aucunement méritoire « l’œuvre de l’enseignement populaire, laquelle « se résume à une vie intellectuelle à crédit » (168). Son souhait ? « Celui qui écrira l’histoire des mensonges qui corrodaient, rongeaient, empoisonnaient et détruisaient la vie intellectuelle de notre nation, qui ont touché celle-ci jusque dans son cœur, qui mettent en danger notre existence même, ne doit pas oublier l’enseignement populaire » (169).
Journal qui « est à la fois une sorte d’autobiographie et de confession », précise Wojciech Kolecki dans son introduction, bloc-notes de lecture, carnet d’esquisses critiques et philosophiques, journal intime. « Histoire d’une intelligence » peut-il animer l’esprit du lecteur, et sa certitude claire comme le soleil « qu’il faut de la pensée, de la philosophie, de l’enthousiasme et de l’intransigeance intellectuelle » (161), et « creuser toujours plus profondément les fondations, et ériger toujours plus haut remparts, murs, créneaux et tours » (172) contre les insatiables « Thersites » (en référence au personnage de la légende de Troie), qui ne déploient que fausseté, bavardage et injure. « Histoire d’une intelligence » pour qu’à la critique lui soit reconnue sa dimension essentielle, en ce sens que « c’est précisément la critique qui valorise la vie de l’humanité » (151).
© Nathalie Riera, Carnets d’eucharis, janvier 2011
extraits
«Chaque jour se produisent de menus évènements qui confirment jusqu’à l’ennui que l’homme sans habitudes culturelles et sans besoins intellectuels est un être nocif et un ennemi de lui-même. Les salles de lecture et les bibliothèques publiques sont remplies de livres sans style, sans pensée, sans originalité. Plus un ouvrage est important ou profond, moins il y a de chances de le trouver ». (p.27)
« Je sais que j’ai des maîtres et que j’en aurai jusqu’à la fin de ma vie. Ç’aurait été un signe de dérèglement mental, si j’avais cessé de penser avec vénération à Newman, Platon, Kant, Hegel, Berkeley et tant d’autres » (p.191)
Autres articles :
■ Revue de Presse des Editions Le Bruit du Temps :http://www.lebruitdutemps.fr/_livres/Histoire%20dune%20intelligence/revuedepresse.htm
Traduction du polonais, introduction et notes par Wojciech Kolecki
Le Bruit du Temps, 2010
■ Site des Editions Le Bruit du Temps :http://www.lebruitdutemps.fr/_livres/Histoireduneintelligence.htm
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25/02/2009
Les Editions Le Bruit du Temps
Le Bruit du Temps
Antoine Jaccottet quitte Gallimard (où il travaillait depuis 15 ans comme éditeur chez "Quarto") pour fonder ses propres éditions : Le Bruit du temps.
Pour Amaury Nauroy, placer ainsi sa maison sous le signe de Mandelstam, c'est affirmer à quel point nous sommes conscients de la force de la parole poétique mais aussi de son essentielle fragilité, sans cesse menacée par des forces qui cherchent à la réduire au silence.
Le Bruit du temps est une petite structure sur laquelle on devra vraisemblablement compter, rapport à l'exigence de ses choix, et au rythme régulier de ses publications (environ 2-3 par mois) à compter de mars 2009.
Les deux premiers titres seront :
"L'Anneau et le livre" de Robert Browning, ouvrage hors norme, adulé en Angleterre (par Carlyle, James, Borges, Woolf, Eliot...), néanmoins totalement inconnu aux lecteurs francophones (la dernière traduction, vite épuisée, remonte à... 1959 !), et proposé ici pour la première fois dans une édition bilingue, et commentée.
En librairie le 17 mars 2009
"Le Timbre Egyptien", unique oeuvre de fiction d'Ossip Mandelstam proposée dans une étourdissante traduction de Georges Limbour. C'est aussi un rarissime exemple de prose surréaliste russe ; laquelle, cahotique, désarticulée, "ferroviaire" comme l'auteur aime à dire, saisit parfaitement l'atmosphère pleine de menaces qui régnait à Saint-Pétersbourg en 1917.
Le Bruit du temps
62, rue du Cardinal Lemoine
75005 Paris
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