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25/04/2013

Jean-Christophe Bailly - le parti pris des animaux - Christian Bourgois Editeur, 2013

 

 

 

 

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Illustration de couverture :

Gilles Aillaud, Mangouste

Planche extraite du tome I de l’Encyclopédie de tous les animaux,

y compris les minéraux

Franck Bordas Editeur

 

 

Jean-Christophe Bailly

Ecrivain, Poète, Philosophe

(Né à Paris en 1949)

 

 

 

 

■ LIEN :http://www.christianbourgois-editeur.com/fiche-livre.php?Id=1387

 

 

 

[…]

 

            Vivre en effet, c’est pour chaque animal traverser le visible en s’y cachant : des animaux, la plupart du temps, on ne voit qu’un sillage et l’espace de nos rencontres avec eux, lorsqu’ils sont sauvages, est toujours celui de la surprise et de la déception. Ils surgissent, ils sont dans l’ordre du surgi, mais rarement pour qu’à partir de là un déploiement soit rendu possible et s’enclenche. L’affect de la rencontre avec eux reste lié aux régimes de l’irruption, du suspens bref et de la fuite. Au caché, d’où ils viennent, ils retournent, et souvent le plus vite possible, avec une incroyable et élégante dextérité. Avant même que la chasse ne s’informe des modes infiniment variés et des vitesses de cette dissimulation, il semble que la véridicité du monde animal ait eu à s’établir, pour elle-même, sur ce fond glissant de fuites et de refuges : les territoires, qu’on peut définir comme des surfaces arpentées et, donc, comme des surfaces où chaque animal s’expose, peuvent en même temps être considérés comme des réseaux de cachettes et comme l’espace même de la dissimulation. Un territoire, c’est une aire où se poser, où chasser, où errer, où guetter – mais c’est aussi et peut-être premièrement une aire où l’on sait où et comment se cacher. C’est ce qui est si intensément et si scrupuleusement décrit dans Le terrier de Kafka.

Ne plus avoir la possibilité de se cacher, être soumis sans rémission à un régime de visibilité intégrale, c’est à cela que le zoo condamne les animaux qui y sont enfermés. La cage est le contraire absolu du territoire non seulement parce qu’elle ne comporte aucune possibilité de fuite et d’évasion, mais d’abord parce qu’elle interdit le libre passage de la visibilité à l’invisibilité, qui est comme la respiration même du vivant.

           

 

-------------------------    (p.26/27)

 

[…]

 

            Etre bœuf ? Etre loup, thon, hanneton, buse, raton-laveur, chauve-souris… Mais comment faire ? Et par quels chemins passer, et pourquoi ? Et pourquoi non ? Essayer d’être (de suivre) chaque animal, d’aller se lover dans l’ailleurs d’où leur forme nous parvient, c’est-à-dire par exemple être très lourd, ou très léger, voler peut-être, dans la surprise de l’immensité de l’espace, dans l’éphémère : on ne le pourra pas. C’est une pensée, juste une pensée, une évasion hors de l’étroitesse spirituelle. Mais par contre ce qu’elle implique, et qui est que toute existence, toute provenance, toute formation soit maintenue dans son accès à l’ouvert et donc préservée, cela, nous pouvons peut-être le tenir autrement qu’en passant.

 

-------------------------    (p.52)

 

 

le parti pris des animaux

Jean-Christophe BAILLY

Christian Bourgois Editeur, 2013

http://www.christianbourgois-editeur.com

 

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Jean-Christophe Bailly dirige la collection « Détroits ». Ecrivain, poète, philosophe, Jean-Christophe Bailly est également proche de la peinture et du théâtre. En lui passant commande d'un texte pour la scène, en 1981, le metteur en scène Georges Lavaudant l'a entraîné dans une aventure qui depuis s'est transformée en collaboration : les Céphéides, 1983, le Régent, 1986, Pandora, 1992, El Pelele 2003. Depuis quelques années, Jean-Christophe Bailly enseigne à l'Ecole Nationale Supérieure de la Nature et du Paysage à Blois.

 

lhttp://www.christianbourgois-editeur.com/fiche-auteur.php?Id=3

 

24/10/2011

Jean-Christophe Bailly, La véridiction...

Jean-Christophe Bailly La véridiction - sur Philippe Lacoue-Labarthe

Éditions Christian Bourgois, coll. "Détroits", 2011

 

 

Extrait :

S’il y a une joie, et une joie de l’œuvre, c’est-à-dire une réponse de l’œuvre à la fidélité  (à la vie, à la possibilité d’existence), elle est du côté de la musique. Il me semble que pour Lacoue, et on peut justement le penser à partir de l’excès de réalité qui tombe sur Lenz, la musique est seule à pouvoir donner, non la diction (même dans le pur chant, elle n’est pas proprement diction) mais la dictée elle-même : sous la forme d’un ruissellement se donnant dans l’évidence d’une forme qui sans fin se défait, la musique, alors même qu’elle est beaucoup plus technique encore que le langage, donne à qui l’écoute l’impression de s’être débarrassée de ce bagage et c’est comme si, et non pas brusquement, mais selon cette progressivité qui appartient en propre au nouement temporel du musical, un accès à l’immédiateté (cet accès même que Hölderlin jugeait impossible) était ménagé. A l’immédiateté, c’est-à-dire au temps, à l’expérience dénouée du temps, au pur passage. Ce qui veut dire que la musique accorderait (rarement peut-être, rarement sans doute, mais peu importe) ce qui normalement n’est pas accordé à l’homme, c’est-à-dire, selon une expression que Lacoue affectionnait, qu’elle passerait l’homme, et qu’elle le ferait et ne pourrait le faire, étant aussi strictement humaine, qu’en passant par lui.

 

(p. 47/48)

 

 

Collection « Détroits » fondée par Jean-Christophe Bailly, Michel Deutsch et Philippe Lacoue-Labarthe

Illustration de couverture : Tournage de Andenken, Bordeaux, la Garonne, 2000 (détail)

 

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www.christianbourgois-editeur.com