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23/11/2020

Bernard Vargaftig par Gérard Titus-Carmel

BERNARD VARGAFTIG

par Gérard Titus-Carmel

[extrait]

 

bernard-vargaftig.jpg

[1934-2012]

 

 

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  Extrait

 

[Gérard Titus-Carmel,

« Dans la nudité d’être », Ecrits de chambre et d’écho

L’Atelier Contemporain, 2019.]

 

« […] Tout poète a un lexique, qu’il conserve et alimente jalousement, et par quoi il se nomme au monde – grâce auquel, aussi, il se livre à nous. Si les mots appartiennent à tous, certains sont oblitérés d’une présence particulière, sinon spécifique, qui les rend différents ou, mieux, reconnaissables, comme appartenant de fait à une langue propre et que leur seule qualité d’esseulement distingue. Dans la forte brassée de mots que manœuvre et maçonne Bernard Vargaftig, je retiens ceux-ci, parmi beaucoup d’autres, qui sont matière vivante, comme en suspension dans l’air, mais qui sont indubitablement siens – qu’il a fait siens : stupeur et éblouissement, silence et aveu, nudité et oubli, immensité et acquiessement, soudaineté et vitesse, désert et aveuglement, distance et effroi, feuillage et oiseau. Ils reviennent régulièrement, avec la seule force de l’entêtement qui les a souhaités et immobilisés dans ses rets et qui, partant, les somme chaque fois de paraître. Bernard Vargaftig les appelle à lui, il les appelle au-devant de lui, puisque tout est centre et mouvement depuis la blessure d’enfance qui sans cesse remonte comme salpêtre, comme mauvaise enfance qui étrangle, quoi qu’on en dise, et à quoi il faut donner du langage à moudre pour pouvoir encore survivre ou, pour dire les choses plus simplement – plus implacablement, aussi – pour vivre, enfin, dans la ressemblance. […] » (pp.185-186)

*

« […] “Je n’écris pas, je marmonne”, dit-il encore. Marmonner, ressasser, travailler les mots avec la bouche, les mesurer et les tordre dans l’antre de la gorge, depuis le cœur de la voix, une voix sourde, presque fêlée, pantelante. Avoir le texte au souffle, comme on dit à l’usure et, par le souffle, le soumettre. Puis solidifier tout cela, malaxer, ségréger les phrases dans le dit de la voix, avant que de les transcrire. Et se voir ainsi écrire ce qu’on en voulait, ou ne pouvait, pas dire : le trouble du nom propre mais sans son ombre portée, la séparation sinon consentie, du moins avouée, mais du bout des lèvres : “Je faisais tourner les mots en essayant d’ailleurs de ne pas remuer les lèvres”, confesse-t-il dans un entretien.

 

Car parfois les lèvres se refusent au texte, le brident, ou, plus encore, l’interdisent. Libre alors aux mots de forcer la barrière des lèvres, de s’oublier, ou de se perdre à leur entour. Ce qui, autrement, s’appelle composer avec la langue, jusqu’au revers de la langue – dans son inentamable rétivité. […] » (pp.187-188)

 

© L’Atelier Contemporain 

[CLIQUER ICI]

 

 

 

 

28/01/2012

Bernard Vargaftig

Hommage à Bernard Vargaftig

(1934-2012)

 

 

 

 BERNARD VARGAFTIG PAR PIERRE EMMANUEL WECK.jpg

© Photo : Pierre-Emmanuel Weck

© http://www.weck.info/2010/09/19/bernard-vargaftig/

 

 

 

 

[…]

 

 

C’étaient les bruits ceux qu’on déchire les

Clés d’horloge les miroirs ceux qui tiennent

Dans leur ovale les maisons pliées

En quatre le temps à peine et les rênes

Qu’on laisse aller autour des morts autour

De l’eau avec chèvres et peupliers

Et carriole sur le vide la même

Route que nous courons comme reviennent

Rêves et paroles grand escalier

Rapace de chaque côté du jour

 

 

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Saute sur les bêtes sur le breuil la

Mort ailleurs ce qui s’oublie les voitures

Mal englouties remplies de temps d’éclats

Eparpillés copeaux de mots sur

D’autres mots comme on croit fuir ô fracas

Château d’aiguilles déchiquetées sciure

Sur le sang au bas des marches un rat

Tel un récit et toutes ses chaussures

D’air jusqu’à se taire serrer les murs

L’eau les portes les fentes contre soi

 

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J’entends la guerre

                  Les guêpes

Muettes

Sur le charnier

                            et les bombes silencieuses

Chicots d’instant

 

                                     

                                      me suis-je tu

                                                                  le soleil

                                                                  l’ourlet qui file

 

  

 

Et l’un l’autre Bruna Zanchi

Editions Belfond, 1981

 

 

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Les bruits sont lents ils font un paysage

D’oubli et d’eau de pentes qu’on remonte

Petites peurs frottées les unes aux autres

C’était rêver le ciel dans les bassines

Entre les noix et le bois sec le chanvre

Quelles durées fuient toujours dans la mienne

Semblants de mots d’habitudes qui cèdent

Quand on dirait qu’une à une les choses

S’étendent et se recouvrent indifférentes

Ombre enlisée enfance complaisante

Et que déjà l’herbe pousse à travers

 

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Je m’étendais contre ma mort j’avais

Ses ongles et ses trous je la comblais

De mots de peurs abstraites sans issue

Rail et silence où s’effondrent les villes

Marque pliure usures dérisoires

Tout un savoir sans signification

Les noms se changent en pierre en coin en verre

Brisée platras de fuites qui s’effritent

Bouchent les murs contiennent les fontaines

Bruits de chevaux et d’anneaux sous les voûtes

Pas d’autrefois quand nous nous embrassions

 

 

Description d’une élégie

Editions Seghers Poésie 75, 1975

 

 

 

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C'est quand ainsi tu me saisis

Mouvement auquel rien ne se confond

La trace du ciel

Avant qu'il n'y aura eu le ciel

 

Un effacement chaque roche

Soulèvement sans aucun savoir

A nouveau plus loin en moi que ne sont

Où que j'aille la  clarté la grève

 

Vite avec puisque même éparse

La déflagration ne se tait pas

Entre aube toujours inclinée et mouettes

Dans un fragment d'appartenance

 

Les amandiers j'entends comme ils tremblent

Qui font espérer

Pour avoir été ce déchirement

Dont le souffle garde l'abîme

 

 

Ce n'est que l'enfance (p.53)

Editions Arfuyen, 2008

 

 

11/04/2008

Ce n'est que l'enfance

C'est quand ainsi tu me saisis

2145869338.jpgMouvement auquel rien ne se confond

La trace du ciel

Avant qu'il n'y aura eu le ciel

 

Un effacement chaque roche

Soulèvement sans aucun savoir

A nouveau plus loin en moi que ne sont

Où que j'aille la  clarté la grève

 

Vite avec puisque même éparse

La déflagration ne se tait pas

Entre aube toujours inclinée et mouettes

Dans un fragment d'appartenance

 

Les amandiers j'entends comme ils tremblent

Qui font espérer

Pour avoir été ce déchirement

Dont le souffle garde l'abîme

Bernard Vargaftig, "Ce n'est que l'enfance", p.53 - Editions Arfuyen, 2008

(Prix de Littérature Nathan Katz 2008)

"Depuis 1975, Bernard Vargaftig a publié un grand nombre de livres de poèmes, auxquels s'ajoutent des livres réalisés avec des peintres. Il est l'auteur de deux anthologies : "La Poésie des romantiques" (Librio) et "Poésie de Résistance" (J'ai lu).

Bernard Vargaftig est membre des comités de revues "Europe" et "Action poétique". Il a reçu en 1991, à l'occasion de la publication de "Ou vitesse", le prix de l'Académie Mallarmé".

(p.73 in Note biographique)

site internet

www.arfuyen.fr

09/03/2008

Ecrire pour vivre

1335573772.jpg

 Ce n'est que l'enfance
de Bernard Vargaftig
Arfuyen (éditeur)

Lire l'article de Florence Trocmé (Poezibao)

http://poezibao.typepad.com/poezibao/2008/03/ce-nest-que-len.html

Textes du même auteur 

Le Monde le monde
de
Bernard Vargaftig
André Dimanche
 Extrait

L'aveu consiste à dire "je suis là". C'est pourquoi toute poésie est une résistance. L'aveu, prendre conscience qu'il y a à être, que l'on est, c'est la bête noire des institutions, des pouvoirs qui, eux, au contraire, aplanissent, cherchent à faire du neutre là où être c'est se dresser dans l'impulsion.

Article paru dans le N° 010
décembre 94-janvier 95

par Emmanuel Laugier

http://www.lmda.net/din/tit_lmda.php?Id=3536

07/03/2008

Plus près de nous

705840074.jpgLA POÉSIE DANS LES SOULÈVEMENTS
Avec Bernard Vargaftig
Serge Martin

Quatrième de couverture (Editions l'Harmattan, 2001)
La poétique sombre souvent dans une rhétorique ou une stylistique qui se redistribuent généralité ou originalité selon des pouvoirs régionaux quand il faudrait au contraire montrer le continu éthique et politique des poèmes au langage, et des œuvres à la vie. Mais aussi montrer la force du langage dans les poèmes. Il s'agit ici précisément d'accompagner cette force. Le cas : l'œuvre de Bernard Vargaftig. La méthode une relation critique pour la poétique, relation tenant ensemble l'empirisme d'une écoute et l'utopie d'une théorie. Le pari : que l'œuvre de Vargaftig soulève la poésie.

Lire gratuitement quelques pages de cet ouvrage

 

 

Consulter les articles suivants

 

 Bernard Vargaftig "textes", Semen, 11, vers une sémiotique différentielle, 1999

http://semen.revues.org/document2851.html

 

 

Marianne Ortega/Emilie Cauvin

Bernard Vargaftig : Quel(s) sens pour le vertige ?

"Nous deviendrons spirale..."

http://revel.unice.fr/loxias/document.html?id=83

 

Bernart Vargaftig - Dix ans, disant...

http://revel.unice.fr/loxias/document.html?id=57

 

Valérie Personnaz

"Nudité et présence : dévoilement d'une mise en scène"

http://revel.unice.fr/loxias/document.html?id=75