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17/10/2008

Gérard Macé

 

 

Éthiopie, le livre et l'ombrelle

Textes & Photographies. 96 p.

2006. ISBN 2.86853.457.0

 

« La civilisation en Éthiopie, c'est l'invention d'une histoire, des croyances qui se complètent ou se contredisent, des manuscrits qu'on interprète, c'est aussi ce qu'il y a de plus précaire et de plus manifeste : une façon d'être ensemble. (...) C'est la survivance de l'Antiquité dans les gestes et la démarche, alliée si souvent à la peur du lendemain... »

 

 

« L’ombrelle pour tout le monde, mais le bâton réservé aux hommes : ces deux accessoires inégalement répartis, partout présents dans l’Éthiopie chrétienne, semblent régler le mouvement des astres et la marche le long des routes, le gardiennage des troupeaux, la prière et la lecture, peut-être même la naissance des enfants. Sans ombrelle ni bâton les Éthiopiens se retrouvent les bras ballants, et les bras ballants il ne reste plus qu’à attendre la nuit qui tombe, ou la mort qui doit venir. La mort qui fera de nous des êtres parfaits, comme les insectes après leur dernière métamorphose, mais des êtres parfaitement désœuvrés, donc parfaitement inutiles.

Sans supprimer la pesanteur ni les corvées, l’ombrelle et le bâton jouent le même rôle que le balancier pour le funambule, et donnent à chaque silhouette une allure princière, malgré le dénuement et la précarité. L’ombrelle surtout, l’ombrelle qui a besoin du bâton pour arrondir sa corolle, et pour faire la roue comme un paon, semble donner de l’équilibre sur une route mal empierrée, rude chemin de la vie où l’on peut trébucher à chaque pas. Parapluie rincé par deux mois d’averses, qui sert ensuite à se protéger du soleil, c’est une voûte céleste un peu trouée, un dôme et un toit portatifs, dont l’ombre vacille comme celle d’une toupie. »

 

Editions Le Temps qu'il fait

 

 

15/10/2008

Jardins en peinture - Nils Buttner

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Jardins en peinture

 

Nils Büttner

Dorian Astor (Traducteur)

Beau Livre - Relié

Paru le: 03/09/2008

Editeur : Actes Sud ISBN : 978-2-7427-7491-3

238 pages

 Quatrième de couverture

Le jardin, comme le tableau, est par essence composition de formes, de couleurs et de lumières, cadrage d'une nature reconstruite, artifice, trompe-l'œil : " une harmonie parallèle à la nature ", selon la sobre définition de Cézanne que cite l'auteur.

Ainsi le " jardin d'eau " de Monet, à Giverny, transposé dans les Nymphéas de l'Orangerie, acquiert " l'illusion d'un tout sans fin, d'une onde sans horizon et sans rivage ", l'expansion des choses infinies rêvée par Baudelaire. La représentation des jardins en peinture, loin d'être un genre anecdotique et pittoresque, touche au plus profond de la sensibilité humaine, comme le nu, les symboles hédonistes de la mythologie, les vanités, les images de la spiritualité chrétienne, archétypes fondateurs auxquels la peinture de jardins est si souvent associée.

Sur les murs de Pompéi, le jardin figure en trompe-l'œil le " lieu de l'agrément ", locus amoenus, image édénique des champs Elysées où séjournent les Bienheureux, et royaume de Vénus. Au fil du temps, cette vision paradisiaque du " jardin d'amour " connaîtra d'infinies variations, depuis les mosaïques du mausolée de Gallia Placidia à Ravenne, le Roman de la Rose et le Songe de Poliphile, jusqu'à l'Improvisation 27 de Kandinsky ! Le lecteur est invité - s'en plaindra-t-il ? - à toucher l'orgue pour la Vénus de Titien, à épier la Suzanne de Tintoret ; il entre avec Cranach dans la ronde de L'Âge d'or, célèbre la Fête galante de Watteau et les plaisirs de l'escarpolette selon Fragonard.

Mais le jardin revêt aussi un caractère sacré. Sur la carte du monde du cloître d'Ebstorf (ca. 1300), l'Eden est situé au nord de Jérusalem, centre de l'univers, qu'ailleurs il symbolise. Le jardin est le lieu clos, hortus conclusus du Cantique des Cantiques, qui devient métaphore de la virginité mariale, avec les attributs qui l'accompagnent, la rose, le lis de la royale Trinité, la licorne de l'Immaculée Conception (voir la Madonne à la fontaine de Van Eyck, la Vierge au rosier de Lochner, la Chasse mystique de Schongauer).

Il est le cadre du péché originel, le calice de la Passion du Christ (Botticelli), le lieu ultime du Jugement dernier (Fra Angelico). La peinture des jardins, progressivement affranchie des références allégoriques et symboliques - si présentes, toutefois, chez Friedrich et les nazaréens comme chez les préraphaélites - s'attachera au concret de la chose même et à la sensualité de l'impression : Jardins de pommiers du père Courbet, Partie de croquet de Winslow Homer, Chemin de jardin aux poulets de Klimt illustrent la veine naturaliste dont le modeste héros, Candide et Biedermann réunis, est L'Ami des fleurs de Cari Spitzweg.

Puis c'est l'éclatement, l'enivrante profusion des Monet, Renoir, Pissaro, Manet, Bonnard, Matisse, Van Gogh, Gauguin, Kirchner, Paul Klee. Histoire de la représentation picturale vue à travers le prisme du jardin - microcosme et condensé de désirs -, le livre est, selon le vœu de Pétrarque, la plus délicieuse des " promenades parmi les paysages de l'âme ".

 

Biographie de l'auteur

Nils Büttner, professeur d'histoire de l'art à l'université de Dortmund, est spécialiste de la peinture flamande, hollandaise et allemande et de la naissance de l'art moderne au tournant du XXe siècle. Il s'est également intéressé à l'histoire du graphisme et du livre. Il est l'auteur du récent ouvrage, L'Art des paysages (Citadelles, 2007).

 

21/08/2008

Traité du scandale - Claude Minière

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Le Traité du scandale a connu, en 1992, une première édition aux Éditions de la Différence qui s’est rapidement épuisée.

 

Les Editions Rouge Profond en propose aujourd’hui une édition augmentée accompagnant celle de Perfection, les deux livres formant diptyque : tous deux liant leurs voix à l’interrogation du contemporain en art – et, pour ce qui concerne le Traité, en poésie. Tous deux – dans la lucidité même d’une écriture rigoureuse, décapante, se défiant de tout emportement – à l’écoute des ferments vrais de la modernité, de ses chances encore. De sa puissance.

 

http://www.rougeprofond.com/LIVRES/STANZE/index.html

 

 

 Lire dans les "Lectures chroniques" de l'Agence Régionale du Livre - PACA :

 

http://www.livre-paca.org/index.php?pg=dazibao&chronique=19

 

09/08/2008

Emmanuel Fournier - 36 MORCEAUX Transcriptions pour trois instruments

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36 Morceaux présente une série de dessins relevés à la surface de la mer. Trente-six croquis préparatoires, établis sur le motif à Ouessant, y sont transcrits selon trois modalités : la plume, le compas et le crayon, qui figurent autant d’interprétations du tracé initial. Les trois premiers chapitres du livre reproduisent, au format original, douze des transcriptions à la plume, douze des transcriptions au compas et douze des transcriptions au crayon respectivement. Le quatrième chapitre, sur douze pages, reproduit, en réduction, la totalité des trente-six morceaux dans les trois transcriptions, tels qu’ils ont été présentés au public à l’occasion de l’exposition « 36 morceaux de mer (transcriptions pour trois instruments) », à la galerie Pierre Colt à Nice... LIRE LA SUITE SUR LE SITE

http://www.ericpestyediteur.com/emmanuelfournier.htm

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24/07/2008

Le phénomène érotique - Jean-Pierre Marion

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Gustave Courbet

"Les Amants dans la campagne", 1844

Le silence de l’amour

La philosophie ne dit aujourd’hui plus rien de l’amour, ou si peu. Mieux vaut d’ailleurs ce silence, tant, quand elle se risque à en parler, elle le maltraite ou le trahit. On douterait presque que les philosophes l’éprouvent, si l’on ne devinait plutôt qu’ils craignent d’en rien dire. Avec raison, car ils savent, mieux que quiconque, que nous n’avons plus les mots pour le dire, ni les concepts pour le penser, ni les forces pour le célébrer.
Les philosophes l’ont de fait laissé à l’abandon, destitué du concept et finalement rejeté dans ses marges obscures et inquiètes de leur raison suffisante — avec le refoulé, le non‑dit et l’inavouable. Sans doute d’autres discours prétendent relever cette déshérence et, à leur manière, y parviennent parfois. La poésie peut me dire ce que j’expérimente sans savoir l’articuler et me libère ainsi de mon aphasie érotique — elle ne me fera pourtant jamais comprendre l’amour en son concept. Le roman parvient à rompre l’autisme de mes crises amoureuses, parce qu’il les réinscrit dans une narrativité sociable, plurielle, publique — mais il ne m’explique pas ce qui m’arrive, réellement, à moi. La théologie, elle, sait ce dont il s’agit; mais elle le sait trop bien pour toujours éviter de m’imposer une interprétation si directe par la Passion, qu’elle annule mes passions — sans prendre le temps de rendre justice à leur phénoménalité, ni donner un sens à leur immanence. La psychanalyse peut résister à ces hâtes et sait demeurer parmi mes vécus de conscience et surtout d’inconscience — mais précisément pour mieux constater que je souffre d’un défaut des mots pour les dire, voire qu’elle‑même manque des concepts pour les penser. De ces efforts défaits, il résulte que le tout‑venant, autrement dit tous ceux qui aiment sans bien savoir ce que l’amour veut dire, ni ce qu’il leur veut, ni surtout comment lui survivre — vous et moi le premier — se croit condamné aux pires trompe‑la-faim : le sentimentalisme en fait désespéré de la prose populaire, la pornographie frustrée de l’industrie des idoles ou l’idéologie informe de l’épanouissement individuel, cette asphyxie vantarde. Ainsi la philosophie se tait et, dans ce silence, l’amour s’efface.
Une telle désertion de la question de l’amour par le concept devrait scandaliser, d’autant plus que la philosophie tient son origine de l’amour même et de lui seul, «ce grand dieu». Rien que son nom l’atteste — «amour de la sagesse» (ce qui reste une traduction juste de filosofi¢a, mal gré qu’on en ait parfois). Comment doit‑on l’entendre? L’acception la plus reçue — il faut rechercher la sagesse qu’on ne possède pas encore, précisément parce qu’elle échappe — n’aboutit qu’à une banalité, un truisme. Mais elle en masque de fait une autre, plus radicale : la philosophie se définit comme l’«amour de la sagesse», parce qu’elle doit en effet commencer par aimer avant de prétendre savoir. Pour parvenir à comprendre, il faut d’abord le désirer; autrement dit, s’étonner de ne pas comprendre (et cet étonnement aussi offre un commencement à la sagesse); ou encore souffrir de ne pas comprendre, voire craindre de ne pas comprendre (et cette crainte encore ouvre à la sagesse). La philosophie ne comprend qu’à la mesure où elle aime — j’aime comprendre, donc j’aime pour comprendre. Et non pas, comme on préférerait le croire, je finis par comprendre assez pour me dispenser à jamais d’aimer. Il ne va pas du tout de soi, aussi paradoxal que cela nous paraisse aujourd’hui, que la philosophie ait d’abord et surtout affaire avec la science, comme si le projet de savoir s’imposait de lui‑même, sans autre médiation ni présupposé. Il se pourrait, au contraire, que pour atteindre la vérité, il faille, dans tous les cas, d’abord la désirer, donc l’aimer. Et l’expérience contemporaine de l’idéologie, ce savoir qui sacrifie tout au pouvoir, nous a démontré dans les faits que l’homme n’aime pas spontanément la vérité et qu’il la sacrifie souvent au mensonge, pourvu que ce mensonge lui assure la puissance. A mesure que la philosophie cesse de se comprendre d’abord comme un amour et à partir de lui, à mesure qu’elle revendique immédiatement un savoir et qu’elle le thésaurise, non seulement elle contredit sa détermination originelle, mais elle fuit la vérité, qu’elle échange contre la science des objets — ce plat de lentilles. On sait que peu à peu, dans une évolution obstinée, puis accélérée et irrépressible, la philosophie a fini par renoncer à son premier nom, «amour de la sagesse», pour celui de métaphysique, aussi tard venu (au milieu du Moyen Age) que d’emblée problématique (à l’âge classique). Cette mutation radicale a non seulement consacré définitivement le primat de l’étant comme l’objet universel du savoir, donc ouvert la carrière au projet de la science et, indissolublement, à l’emprise de la technique sur le monde, mais elle a surtout censuré l’origine érotique de la «philo-sophie». Il se pourrait ainsi que l’oubli de l’être masque un oubli plus radical et en résulte — l’oubli de l’érotique de la sagesse. A l’achèvement de cette histoire, aujourd’hui donc, après avoir ravalé l’étant au rang sans honneur d’objet et oublié l’être en pleine retraite, la philosophie, désormais presque silencieuse, a même perdu ce à quoi elle a sacrifié l’érotique : son rang de science, éventuellement sa dignité de savoir. Quant à l’amour, dont l’oubli a sans doute tout décidé, elle en a oublié jusqu’au reniement; elle en a perdu même le désir; et — parfois on le croirait presque — elle le hait. La philosophie n’aime pas l’amour, qui lui rappelle son origine et sa dignité, son impuissance et leur divorce. Elle le passe donc sous silence, quand elle ne le hait pas franchement.
Nous poserons une hypothèse : cette haine reste encore une haine amoureuse. Dans ce désastre amoureux de la philosophie, nous voulons croire — et montrer — que l’on peut reconstruire une interrogation sur l’amour. L’histoire du divorce de la philosophie avec l’amour en elle ne mériterait‑elle pas au moins autant d’attention et d’efforts que l’histoire de l’être et de son retrait? Elle reste évidemment presque tout à écrire — ce que nous ne saurions même esquisser ici. Dans l’urgence, on s’en tiendra donc au premier inventaire des lieux : non seulement nous n’avons plus de concept de l’amour, mais nous n’avons même plus de mot pour le dire. «Amour»? Cela sonne comme le mot le plus prostitué — à strictement parler le mot de la prostitution; d’ailleurs, nous en reprenons spontanément le lexique : on le «fait» comme on fait la guerre ou des affaires, et il ne s’agit plus que de déterminer avec quels «partenaires», à quel prix, pour quel profit, à quel rythme et combien de temps on le «fait». Quant à le dire, le penser ou le célébrer — silence dans les rangs. Un silence saturé d’une douleur, qui perce sous le bavardage politique, économique et médical qui l’étouffe en voulant nous rassurer. Dans ce grand cimetière érotique, l’air manque, dont les vibrations laisseraient résonner une seule parole. Déclarer «je t’aime» sonne, dans le meilleur des cas, comme une obscénité ou une dérision, au point que, dans la bonne société, celle des instruits, plus personne n’ose sérieusement proférer un tel non‑sens. Et qu’on n’espère aucun substitut à cette banqueroute, pas le moindre assignat. Ainsi le mot de «charité» lui‑même se retrouve, s’il est possible, encore plus à l’abandon : on «fait» d’ailleurs aussi la charité — ou plutôt, pour lui éviter de faire l’aumône et de se réduire à la mendicité, on lui arrache même son nom magnifique et la recouvre de haillons supposés plus acceptables, «fraternité», «solidarité», «action humanitaire»; à moins qu’on ne s’amuse à la regarder jouer les élans surannés de la «grâce», pour jouir avec nostalgie de l’«âme» qu’on n’a plus. De l’amour (ou de la charité), nous n’avons rien à dire — et nous n’attendrons pas le moindre secours de la philosophie telle qu’elle va.

(…)

Extrait pp. 9-13 (livre de poche)


"Le phénomène érotique" Six méditations - Jean-Luc Marion

2003, Editions Grasset - Collection dirigée par Jean-Paul Enthoven

14/07/2008

Agnès Gueuret

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"Ne me faut-il pas aller jusqu'à comprendre que le seul point de la terre et des cieux où je puisse appréhender le divin est en moi à l'intime, là où justement s'éprouve la durée ? L'impossible connaissance que j'ai de Dieu, que j'ai de moi, se résoudrait alors dans l'acte en lequel je me remets à l'inconnu qui me traverse et se signale en mon désir, telle une force qui me saisit, semblable à celle du bourgeon en train d'éclore et allant me pacifiant lorsque j'y consens".

(p.64)

Agnès Gueuret 

Agnès Gueuret, née en 1936, est diplômée de l'Ecole Pratique des Hautes Etudes. Elle y a mené une étude sémiotique des deux premiers chapitres de Luc, suivie par une thèse sur l'énonciation dans l'Evangile selon Luc. Outre son intérêt permanent pour les textes bibliques, elle continue à mener l'expérience communautaire qu'elle a commencée en 1957.

Sur les sentiers de Qohéleth

Article de Jean Alexandre dans le revue LIBRESENS n°172.

Article d'Huguette Charrier dans la revue trimestrielle PARVIS n° 36 de décembre 2007.

L'émission "Un livre, un lecteur" réalisée par Guylène Dubois sur FREQUENCE PROTESTANTE a reçu Agnès Gueuret, le 22 décembre 2007 à 14h (durée 30 min.).

Article d'Antoine Lion sur le site du couvent Saint-Jacques :

http://www.dominicains.fr/fre/menu/nav_magazine/communaut...

Article de Pascal Boulanger la revue EUROPE de mars 2008.

29/06/2008

Voyageur universel - Jérôme Rothenberg

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Chants maoris ou altaïques, cérémonies indiennes, épopées et louanges d’Afrique, hymnes d’Egypte ou du Pérou, cosmogonies d’Asie centrale, du pays Dogon, d’Australie, légendes d’Irlande et de Chine, inscriptions sumériennes, rites de possession, définitions aztèques, “poèmes en prose” esquimaux...

Les Techniciens du sacré présentent tout d’abord un panorama divers et cohérent, un corpus exemplaire de textes “traditionnels”, de toutes provenances géographiques et temporelles.

Mais loin de s’en tenir à une approche strictement documentaire, Jerome Rothenberg a composé son ouvrage comme une anthologie “active”, inscrite dans le présent, développant au fil de nombreux Commentaires, un singulier parallèle entre ces textes immémoriaux et la poésie du XXe siècle.
Selon lui, les diverses révolutions modernes ont en effet replacé les créateurs (et singulièrement les poètes) dans une posture qui n’est pas sans équivalent - au moins à titre analogique - avec celle des chanteurs, chamans ou devins des sociétés dites “sans écriture”, en leur confiant le soin d’arpenter les domaines que recouvre la part obscure du langage : le rêve, les visions, la parole des morts...

Composé au beau milieu de la grande tornade utopique et rebelle des années 1960, ce livre a eu outre-Atlantique une influence notable sur la poésie de son temps. La version qu’en propose Yves di Manno rouvre aujourd’hui ce débat, dans le contexte français.

Les techniciens du sacré : anthologie
Rothenberg, Jerome
Editions Corti

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Pour moi, le sacré ne relève pas du transcendantal ou du métaphysique… Il s’agit plutôt d’une attitude de questionnement, d’interrogation par rapport à la vie, la vie dans son expression la plus matérielle, concrète. (…) La question centrale, par rapport au sacré, est bien celle du langage et de la réalité : comment le langage représente- t-il la réalité ? Quel rapport entretient-il avec elle ? Il est important de comprendre à quel point le langage faisait partie de la démarche des peuples traditionnels (…)   A lire « Propos recueillis » par Marta Krol pour le magazine LE MATRICULE DES ANGES – N°93 Mai 2008 - (pp.44-45)

18/06/2008

La pénombre de l'or - Jean Mambrino

la pénombre de l'or.jpgLA DEDICACE DE L'AUTEUR : "Seul ce qu'on appelle poésie peut tisser/ le fil qui relie le divers à l'unité". Une fois encore j'ai tenté (dans une forme nouvelle) de relier les mots et les choses, l'homme intérieur et l'homme extérieur, le monde du Multiple et le souffle de l'Un. Avec une sorte de simplicité somptueuse, car "l'offrande ruisselle en dissimulant sa gloire", et l'univers en sa complexité infinie se voile dans son éclat. Le plus profond secret aime à se dire dans le minime ou l'insignifiant, et comme à voix basse, non seulement pour qu'on l'entende mais pour qu'on l'écoute. J'ai usé ici de l'alexandrin sans qu'on puisse le reconnaître, les césures étant partout ; et de même les rimes se dérobent sans cesse, car chaque dernier mot d'un vers ne trouve son écho qu'à l'intérieur d'un autre vers, avant et après lui, parfois fort loin. Le chant ainsi s'entremêle au mouvement du poème, partout et nulle part, comme la musique des sphères qui enveloppe mystérieusement la totalité des choses, les plus humbles créatures comme la grandiose aventure de l'esprit, toutes les réalités, les pires comme les meilleures, la ténèbre et la lumière se tenant embrassées. "Il faut abriter chaque mot dans le poème,/ le rossignol, le muid, l'amarante, l'aurore,/ et encore le sang, la sanie, le blasphème". Tout est signe. Tout doit devenir parole, puisque la peine est l'ombre de l'or, selon la polysémie des mots du poème, conduisant le poète, comme son lecteur, vers la paix nombre de l'or, dont le chiffre réconcilie toutes les contradictions. (Jean Mambrino)

Editions Arfuyen, septembre 2002.