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01/06/2013

Nathalie Riera, "Paysages d'été, Ed. Lanskine, 2013 - Une lecture de Richard Skryzak

 

NATHALIE RIERA

Paysages d’été

 (Editions Lanskine, 2013)

 

 

EDITIONS LANSKINE

SITE - http://www.editions-lanskine.fr/

 

 

 JUILLET 2012 012.JPG 

 

© Nathalie Riera – Autoportrait, 2012

 

 

 

 

 

UNE LECTURE DE 

Richard Skryzak

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   Il y a finalement peu de vrais cris dans la littérature contemporaine. Celui que Nathalie Riera fait entendre avec Paysages d’été résonne haut et fort, entre chant d’amour et incantation du désir.

   Ce roman en forme de flux saisit d’emblée le lecteur dans un vertige poétique dont il a peu de chance de sortir indemne. Véritable manifeste de la sensualité, il souligne l’engagement de l’auteur pour une littérature qui de nos jours fait figure de résistance. Pour cela, Nathalie Riera construit un idiolecte, basé sur une écriture fluide, multiple, kaléidoscopique, où s’imbriquent les niveaux de perceptions, de sensations et de narrations ; jaillissement du sens, fêtes des sens,  jouissances. Il ne s’agit plus ici de raconter de façon calme et linéaire, mais de pénétrer par les mots la matière même des êtres. De saisir le tremblement des corps,  l’électricité des affects, le fourmillement énergétique à l’œuvre à la fois dans les émotions et l’acte d’écrire. Quelque chose comme l’insoutenable instabilité des particules. On pense ici  aux qualités de l’image électronique et à l’art vidéographique dont le fondateur Nam June Paik disait : « Nous aimerions avoir trois vies. Une vie pour créer. Une vie  pour vivre et aimer - c’est la même chose. Une vie pour étudier, chercher. Mais nous n’en avons qu’une. Alors nous alternons comme dans un montage vidéo. » Il s’agit ainsi d’apprendre de l’écriture ce qu’est la vie et réciproquement.

    A la musicalité du style, Nathalie Riera ajoute la picturalité. Présente dès le titre Paysages d’été qui évoque Poussin ou Renoir, elle imprègne le texte dans le mélange des chairs, la chatoyance des tissus, tout ce jeu subtil des sentiments et des couleurs, des atmosphères et des intensités qui rappellent tant  le 18ème siècle des Watteau, Boucher ou Fragonard.  Bonnard n’est pas loin. Le déjeuner sur l’herbe de Manet non plus.  Mais c’est dans l’écriture même que la peinture agit. Dans le rendu cubiste de l’emboîtement des corps. Dans le phrasé impressionniste des fragments et des vibrations. Dans l’approche expressionniste des pulsions et des fantasmes. «  Où commence l’écriture ? Où commence la peinture ? » se demande Roland Barthes dans L’empire des signes.  

   L’une des qualités de l’auteur, presque introuvable aujourd’hui, est d’aborder l’érotisme sans jamais être vulgaire, l’autobiographie sans sombrer dans le narcissisme. La richesse de son écriture vient sans aucun doute de là, de cette tension, de ce savant dosage entre la retenue et l’écart, entre la délicatesse et la violence des passions. Le récit n’est plus procédé d’énonciation, mais d’Annonciation : « Je ne suis plus visitée »  dit-elle comme a du dire Marie à l’Ange Gabriel.

   Monet voulait peindre comme l’oiseau chante. Nathalie Riera, elle, écrit comme le cheval galope - métaphore assumée et récurrente - bondissant d’une ligne à l’autre, ne laissant aucune prise aux obstacles ni aux ponctuations. Il y a urgence et elle le sait. Impatiente dans une époque où  barbarie et  bêtise gagnent chaque jour du terrain,  elle sème sur ce qui reste des livres ses odes et ses épiphanies.

   L’écrivain inscrit sa démarche dans une généalogie littéraire et cinématographique (Sarraute, Casares, Resnais) qui n’a que faire des modes et des stratégies esthétiques. Seul importe ce qui pousse à créer. Et rien d’autre. Sinon continuer. Car ce qui se joue ici, c’est l’acte poétique comme geste de survie. Se souvenir de ce qui sera. Quand la promesse des mots se métamorphose en Beauté, que nulle définition ne peut atteindre. Quand le désir d’écriture redevient tout simplement l’écriture du Désir.

 

 

 

Les Carnets d’Eucharis © Richard Skryzak

 

 

                               

 

 

 

 

 

 

 

Extraits de Paysages d’été

 

SITES :

LITTERATURE DE PARTOUT

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TERRES DE FEMMES

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Nathalie Riera vit en Provence. Elle est l'auteur notamment d’un essai sur la contribution positive du théâtre et de la poésie dans l’espace carcéral : La parole derrière les verrous (éditions de l'Amandier, 2007), de livres de poésie : ClairVision (Publie net, 2009), Puisque Beauté il y a (Lanskine, 2010), Feeling is first/Senso é primo (Galerie Le Réalgar, 2011 – Collection "1 et 1" : un artiste et un écrivain – sur les peintures de Marie Hercberg), puis récemment aux éditions du Petit Pois : Variations d'herbes (collection Prime Abord, 2012). Elle dirige par ailleurs la revue numérique Les Carnets d'Eucharis depuis 2008 (37 numéros), et publie régulièrement en revue (Diptyque, The Black Herald…). Vient de paraître aux Editions Lanskine : Paysages d’été (2013). Création et lancement en février 2013 de la revue-papier Les Carnets d’Eucharis, Année 2013 (Hommage à Susan Sontag). (Source : http://lescarnetsdeucharis.hautetfort.com)

 

 

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 http://www.editions-lanskine.fr/livre/paysages-dete

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