06/09/2009
Claude Minière... et le monde dans son ordre par la justesse d'un trait
NOTE DE LECTURE
Par Nathalie Riera
15 avril – Écrites à Paris, à Londres ou à Oziers, ces pages du Journal accompagnent Hymne. À travers elles, je me fais le compagnon de mon poème, de son achèvement. De son départ et de son achèvement.
Claude Minière, Pall Mall, journal 2000-2003 – (p.77)
Pall Mall
Journal 2000 - 2003
Claude Minière
Editions Comp’Act, 2005
Le journal ne se veut pas lieu de confessions, et le poème ne cherche pas à rendre plus compréhensible le réel. Journal et Poème esquissent un vaste projet : demeurer lié au monde afin que le monde ne vous hait pas.
L’interrogation ne cherche pas de réponse, elle est action de remonter, de soulever, elle n’est qu’exigence de penser, à l’opposé des manières du monde et de ses vanités à ne vanter que le faux et son escorte de vulgarités.
Se défaire de l’ornement, taire le discours. Ne pas s’attarder, mais devancer. Toujours, devant, la voix menue du cœur qui aime à donner étreinte, qui aime à toujours aimer, ne pas rester dans le malheur, comme l’écrivait Hölderlin, mais chanter.
Ma poésie au fond répond à ce désir – « l’enfance retrouvée à volonté » - sans pathos, de corps immédiats, de traits et retraits, de bord de l’eau, de gestes sans jugement au rythme des feuillages. Exulter au cœur du monde.
Naître de l’esprit est nourricière du chant. La poésie de Claude Minière est certes vouée aux éléments familiers du quotidien, mais aussi et surtout à la liberté des espaces, aux paysages présents et dérobés, à ce qui fait rêve sans futiles rêveries.
Le journal est moyen de faire partir le poème, de passer par le poème, de passer par ce que l’on connaît et qui nous est nouveau. Et le poème est moyen de se tenir dans l’instant, toujours rester en la vérité, poursuivre l’enquête.
5 avril – Anna Dina Nurabelle. Plus fluides, les pensées doivent se faire plus fluides pour la sécheresse de l’arc-en-ciel, et comme « atomiques », pollens de lumière flottante.
Sécheresse d’une époque à laquelle quelques contemporains nous rappellent (à la manière d’Hölderlin) que peu de savoir nous est donné, mais de joie beaucoup.
Entre autre joie, celle du regard qui s’attache encore au sol, dans le vert profond d’une herbe, où les écrits ne flétrissent pas.
A la 112ème page de Pall Mall, le 16 novembre 2003 : Comment peut-on avoir encore envie, aujourd’hui, de publier ? Tout tombe dans la quantité à plat. Quant aux « critiques », il semble que Hymne les ait littéralement laissés sans voix. Aucun de mes livres n’a recueilli aussi peu de commentaires. Je pourrai dire que c’est bien ainsi : comment taire, comme enterre. Mais ce silence « gêné » rend d’autant plus précieux et vifs les rares gestes : celui de Marcelin Pleynet (et son invitation dans l’émission radiophonique « Surpris par la poésie », sur les ondes de France-Culture) ; celui de Pascal Boulanger (et l’article qu’il a écrit, qui paraîtra dans art press).
© Nathalie Riera, septembre 2009
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