21/10/2023
Roberto Bolano - Les chiens romantiques
BOLAÑO
LES CHIENS ROMANTIQUES (Poèmes 1980-1998)
[extraits]
■ Roberto Bolaño
(1953-2003)
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Extraits
Traduit de l’espagnol (Chili) par Robert Amutio.
Christian Bourgois Editeur, 2012
Le fantôme d’Edna Lieberman
Toutes tes amours perdues
te rendent visite à l’heure la plus sombre.
Le chemin de terre qui menait à l’asile
se déploie de nouveau comme les yeux
d’Edna Lieberman,
comme seuls ses yeux pouvaient
s’élever par-dessus les villes
et briller.
Et ils brillent de nouveau pour toi
les yeux d’Edna
derrière le cercle de feu
qui auparavant était le chemin de terre,
le sentier que tu as parcouru la nuit
aller et retour
encore et encore,
à sa recherche ou peut-être
à la recherche de ton ombre.
Et tu t’éveilles silencieusement
et les yeux d’Edna
sont là.
Entre la lune et le cercle de feu,
lisant ses poètes mexicains
préférés.
Et Gilberto Owen,
tu l’as lu ?
disent tes lèvres silencieuses,
dis ta respiration
et ton sang qui circule
comme la lumière d’un phare.
Mais ses yeux sont le phare
qui transperce ton silence.
Ses yeux sont comme le livre
de géographie idéal :
les cartes du cauchemar pur.
Et ton sang éclaire
les étagères de livres, les chaises
sous les livres, le sol
couvert de livres empilés.
Mais c’est toi seul que recherchent
les yeux d’Edna.
Ses yeux sont le livre
le plus recherché.
Tu l’as compris
trop tard, mais
qu’importe.
Dans le rêve tu étreins
de nouveau ses mains
et tu ne demandes plus rien.
[Extrait : pp.38-39]
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Les crépuscules de Barcelone
Que dire sur les crépuscules noyés de Barcelone.
Vous rappelez-vous
Le tableau de Rusiñol Erik Satie en el seu estudi ?
C’est ainsi
que sont les crépuscules magnétiques de Barcelone,
comme les yeux et la
Chevelure de Satie, comme les mains de Satie et
comme la sympathie
de Rusiñol. Des crépuscules peuplés de silhouettes
souveraines, magnificence
Du soleil et de la mer sur ces demeures suspendues
ou souterraines
pour l’amour bâties. La ville de Sara Gibert et de
Lola Paniagua,
la ville des sillages et des confidences absolument
gratuits.
La ville des génuflexions et des cordes.
[Extrait : p.54]
■ © Christian Bourgois Éditeur
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26/12/2013
Roberto Bolano, Amuleto
Roberto Bolaño
AMULETO
(Christian Bourgois Editeur, 2013)
Traduit de l’espagnol (Chili) par Emile et Nicole Martel
Roberto Bolaño
© Photo : Jerry Bauer | CLIQUER ICI
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------------------------------------------ QUATRIEME DE COUVERTURE
Mexique, septembre 1968 : la police envahit l'université de Mexico. Afin de leur échapper, Auxilio Lacouture, une Uruguayenne amie des poètes et de la poésie, se réfugie au quatrième étage de la faculté de Lettres et de Philosophie. Elle y demeure cachée pendant treize jours, au cours desquels elle se remémore son histoire. Au fil d'un vaste récit aux accents tantôt mystiques tantôt surréalistes, elle évoque ainsi les jeunes gens qu'elle a connus à l'université et les événements de ces années troubles.
Amuleto est l'un des premiers ouvrages de Roberto Bolaño parus en France. On y retrouve la combinaison d'une atmosphère angoissante et d'une terreur politique bien contemporaine. À cet égard, Amuleto annonce ses œuvres suivantes telles que La Littérature nazie en Amérique, Étoile distante, Nocturne du Chili, où écrivains et poètes jouent souvent un rôle essentiel.
------------------------------------------------------- BIOBIBLIO
Roberto Bolaño est né à Santiago du Chili en 1953. Fondateur, au Mexique, de «l'infraréalisme», groupe littéraire d'avant-garde, héritier de Dada et de la Beat Generation, il a déferlé sur la scène littéraire avec La Littérature nazie en Amérique puis Les Détectives sauvages. Il a reçu, entre autres, le Prix Herralde en 1998 et le prix Romulo Gallegos, le plus prestigieux d'Amérique Latine en 1999. Poète et romancier, héritier de Borges, Cortazar, Schwob, il saisit à bras le corps l'histoire de sa génération et est passé maître du brassage des registres, situations et personnages. Roberto Bolaño est mort en 2003 à Barcelone.
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ET MOI, pauvre de moi, j’ai entendu quelque chose de semblable à la rumeur que produit le vent quand il descend courir entre les fleurs de papier, j’ai entendu une vibration d’air et d’eau, et je me suis levée (silencieusement), les pieds comme une ballerine de Renoir, comme si j’allais accoucher (et d’une certaine manière, en effet, j’allais donner naissance à quelque chose et naître moi-même), le slip tenant en menottes mes chevilles maigres, accroché aux chaussures que j’avais alors, des mocassins jaunes très confortables, et pendant que j’attendais que le soldat inspecte les cabinets l’un après l’autre et que je me préparais moralement et physiquement, si nécessaire, à ne pas ouvrir, à défendre le dernier réduit d’autonomie de l’UNAM[1] , moi, une pauvre poète uruguayenne, mais qui aimais le Mexique comme personne d’autre, tandis que j’attendais, comme je disais, un silence particulier s’est produit, un silence spécial pour lequel ni même les dictionnaires musicaux ni les dictionnaires philosophiques n’ont d’entrée, comme si le temps se fracturait et se mettait à courir dans plusieurs directions à la fois, un temps pur, ni verbal ni fait de gestes ni d’actions, et alors je me suis vue moi-même et j’ai vu le soldat qui se regardait béatement dans le miroir, nos deux personnages scellés dans un noir losange ou submergés dans un lac, et j’ai eu un frisson, parce que j’ai perçu que momentanément les lois de la mathématique et celles, tyranniques, du cosmos, qui s’opposent aux lois de la poésie, me protégeaient et j’ai compris que le soldat se regarderait béatement dans le miroir et que je l’entendrais, ou l’imaginerais, souriante aussi, dans l’abri singulier de mon cabinet, et que ces deux facteurs constituaient à partir de cette seconde-là les revers d’une pièce de monnaie atroce comme la mort.
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SITES À CONSULTER
Editions
AMULETO
Christian Bourgois Editeur
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Articles
Le chant d’Auxilio Lacouture
Sur « Amuleto » de Roberto Bolaño
Antonio Werli
In« Cyclocosmia » (revue d’invention et d’observation)
| © Cliquer ICI
POUR UNE HISTOIRE SECRÈTE DU ROMAN CONTEMPORAIN :
2666 DE ROBERTO BOLAÑO
Sur le site d’Enrique Vila-Matas
Emmanuel BOUJU
In« Cyclocosmia » (revue d’invention et d’observation)
| © Cliquer ICI
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25/12/2013
Remedios Varo
REMEDIOS VARO
PEINTRE SURRéaliste
…
…
[Extrait]
ROBERTO BOLAÑO
AMULETO
(Traduit de l’espagnol – Chili – par Emile et Nicole Martel)
Christian Bourgois Editeur, 2013
[…]
Il y a très peu de gens qui se souviennent de Remedios Varo. Je ne l’ai pas connue. Sincèrement, j’aimerais bien dire que je l’ai connue mais en vérité je ne l’ai pas connue. J’ai connu des femmes merveilleuses, fortes comme des montagnes, ou comme des courants marins, mais je n’ai pas connu Remedios Varo. Non parce que j’aurais eu honte d’aller lui rendre visite chez elle, non parce que je n’appréciais pas son œuvre (que j’admire de tout cœur), mais parce que Remedios Varo est morte en 1963 et moi, en 1963, j’étais toujours dans mon lointain Montevideo chéri.
[…]
Je lui dis à quel point je l’admire, je lui parle des surréalistes français et des surréalistes catalans, de la guerre civile espagnole, je ne lui parle pas de Benjamin Péret parce qu’ils se sont séparés en 1942 et je ne sais quels souvenirs elle garde de lui, mais je lui parle de Paris et de l’exil, de son arrivée à Mexico et de son amitié avec Leonara Carrington, et je me rends compte alors que je suis en train de raconter à Remedios Varo sa propre vie…
ROBERTO BOLAÑO ...............................................
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14:30 Publié dans Christian Bourgois Editeur, Roberto Bolano | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer | | Facebook
02/04/2012
Roberto Bolano
Prochainement
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dans
Les carnets d’eucharis n°33
PRINTEMPS 2012
ROBERTO BOLAñO
Trois
Un petit roman lumpen
Les chiens romantiques
Christian Bourgois Editeur, 2012
Roberto Bolaño lâche ses chiens romantiques
13 mars 2012 | | MEDIAPART
(mise en ligne vers la mi-avril 2012)
13:27 Publié dans Christian Bourgois Editeur, Roberto Bolano | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer | | Facebook