11/02/2024
Jennifer Grousselas, Il nous fallait un chant
Jennifer GROUSSELAS
IL NOUS FALLAIT UN CHANT
[extraits]
■ Jennifer Grousselas
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Extraits
Le Manteau & la Lyre
Obsidiane, 2024
La main droite du prince
Notre pilote sans jambes commence à galoper
la grande table tandis qu’il psalmodie syncopes
d’un iambe qui sonne un temps chaotique
Bientôt nous reconnaissons la langue inouïe au rythme mi-clos, la langue cheval échappé qui de nous ne fut jamais comprise, la langue étrange bouleversée qui de nous ne fut jamais apprise
La voix lance-pierres entrouverte se ferme à notre intelligence, et la parole imprévisible au sens convulsif aux rênes qui ne se laissent saisir
Toute tonnante toute flamboyante la langue dénouée à elle-même rendue qui digère par hoquets mystiques ses anciens iambes
Me perce quelque part et fait
Mes paupières boiteuses, mon regard tressaillir
[p.33]
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Jouxtant la mer je sais les montagnes qui se joutent s’ébranlent et qui dansent
Sous mes pieds la caresse de la cendre jouxtant les montagnes de sang de la mer à la chevelure hirsute sanglante
Et sur mon cœur mort sur le soir perdu sur ma vie qui s’achève, se met à remuer comme l’oiseau-nuit
La touffeur me griffant par saccades dans ma gorge la lave mugit révolte sur la vie qui m’achève je sens en moi vengeance monter naissante grandir, tourner gutturale râler-rugir
Et la mer sans mesure où je baignerai mon corps nouveau, la mer dans son bain mouvant m’éclaboussant mer d’écume noire au goût de sang, la mer seule m’offre ses signes reculant ses barrières de sel la mer m’appelle
Révolte sans mesure la mer m’approuve m’ouvrant pour
m’appeler vengeance sans mesure
Œuvrer
Par le bec de l’oiseau-nuit ses serres, par élan de tire-d’aile, au nom des frères de sacrifices à venir, au nom de la boue sur les yeux fermés par le jour abattu, pour la fin du nom qui fut d’abord mien
Par seul amour restant de la mort je ferai œuvre
Et dans l’achèvement du temps qui se signe
Nuit de la nuit véritable
après les derniers mots que je saigne les mots
n’auront plus jamais place
Fin de l’enfance mauve
bleus sombres sur mon âme et neuve violence
[pp.45-46]
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■ © Obsidiane
14:51 Publié dans Jennifer Grousselas | Lien permanent | Commentaires (0) | Imprimer | | Facebook