04/10/2014
Helga M. Novak - Chaque pierre orpheline (Ed. Hochroth, Paris)
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Du côté de chez…
HELGA M. NOVAK
Chaque pierre orpheline
Hochroth, Paris
anthologie bilingue
Traduction de l’allemand par Élisabeth Willenz
avec une illustration par Ladislaja de Layre
HOCHROTH | © http://www.paris.hochroth.eu/fr/3154/chaque-pierre-orpheline/
me dérober voilà tout ce que je veux
me dérober voilà tout ce que je veux
loin de l’armoise et de l’élyme
loin des pierres que jamais
personne ne changera en pain
loin des algues qui ne seront
plus mêlées à la farine du pain
loin des noeuds de marin des filets
me dérober aux mouettes
et à leurs yeux injectés de sang
crier je peux le faire toute seule
et hurler contre l’océan
le miroir de la mer je le recouvrirai
et les miroirs de la maison
ici des frégates tombent du mur
le souffle se glace par 30 degrés
ici les voiles se flétrissent dans les lits
et les coquillages pâlissent dans les chevelures
ici les pendules sonnent mais aucune ne marche
personne n’arrache plus de feuille au calendrier
me dérober voilà ce que je veux
telle une reine incendiaire
loin de son trône enflammé
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tout s’est envolé
espérant te faire plaisir
je t’ai cueilli au bord de la Méditerranée
une fleur de pissenlit
grande comme une méduse
espérant te faire plaisir
je t’ai coupé en Asie
une églantine
rouge comme une langue de dragon
espérant te faire plaisir
je t’ai acheté en Amérique
un cœur-saignant de nylon
plus gracieux qu’un cœur tendre
ah tableaux décrochés métaphores
ce que j’ai à t’offrir
est un fagot de phrases de mots
de terminaisons fléchies et de syllabes
sur d’informes racines sans âge
l’as-tu compris est-ce pour cela
que tu as décampé déguerpi
fleur de pissenlit Méditerranée
Asie églantine mais rouge
le cœur tendre Amérique point là de quoi
rester à m’attendre
je fus par un bouquet de séneçon accueillie
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Note de l’éditeur
Helga M. Novak, poétesse islandaise d’expression allemande, est née en 1935 à Berlin. Enfant abandonnée, adoptée et élevée en R.D.A., elle connaît une vie de ruptures et d’exils (en Islande, en R.F.A.), avant l’isolement dans la forêt de Legbąd, en Pologne, où elle vivait depuis 1987. La dimension politique de ses premiers recueils lui vaut d’être déchue de sa nationalité est-allemande en 1966. Marquée par de multiples traumatismes, sa poésie puise aussi dans le spectacle d’une nature désolée, sombre scène d’une indomptable amertume.
Helga M. Novak nous a quittés le 24 décembre 2013.
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