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26/01/2023

Christian Dotremont

Christian DOTREMONT

Abrupte fable

[extrait]

christian dotremont.jpg 

Christian Dotremont

 

 

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  Extraits 

Éditions L’Atelier Contemporain, 2022.

 

« Sans vous, la poésie n’aurait pas de racines.

Certains d’entre vous, je sais bien, mènent la grande vie. Mais qu’importe ? Votre poésie est […] vouée à la pureté, à l’amour de l’amour, elle est vouée au secret. Elle est toujours résistance, résistance aux “grands barbares”, résistance à toutes les familles, résistance aux “autres”, à ceux dont le cœur n’est qu’une boule de sang.

[…]

La poésie est votre forêt, votre chaumière, votre capitale […] ».

 

pp.18-19

 

christian dotremont2.jpg

© Éditions L’Atelier Contemporain

CLIQUER ICI

 

 

08/08/2014

Eugène Savitzkaya, BUFO BUFO BUFO

 

 

Du côté de chez…

 

Eugène Savitzkaya

 

Eugène Savitzkaya

© Photographie de Mélanie Gribinski

http://www.melaniegribinski.com/index.php?/poetes/

 

 

Bufo bufo bufo

Les éditions de Minuit,  1986

 

Les Carnets d’Eucharis | © http://lescarnetsdeucharis.hautetfort.com/

 

 

 

 

   

Ogre parmi les floraisons, dauphin, je la mouillerai

vivante, ourse à la toison, au cœur, à la bouche

bordée de pétales, cousue et décousue, peinte et

blanche, dauphin, épouvantée, dévorant les fleurs,

jetée sur les prés, sur les eaux, à la machine,

à la boue nouvelle, au cœur immobile, pesant

moulin, moteur, mère, fleur sur l’étang ou tache

sur la neige, ourse que je pénétrerai troué, au cou,

la chaîne fine qui me décapitera avant le jour, à la

machine, éphèbe, jeune homme Sali, coloré, pourri,

Angèlique petite fille, Dominique mordue, coloriste qui

crache sur la neige, qui bave dans le lait,

perturbant les moussons, trouant d’un doigt

le paysage et l’œil d’un garçon de boucherie.

 

........................... (pp.25)

 

 

  

 

Vidé de mon cœur je me reluis, disait le pêcheur

guettant l’ombre, son foie dans le liquide de

la rivière, doucement rouge et transparent,

de salive je suis rempli, elle déborde et coule

peu à peu, écume sur le liquide de la rivière,

la mangent les poissons montant en flèche,

l’étendard violet dressé, ondulant, ils

dévorent les fleurs que j’ai jetées dans le

soleil et perdues, il roucoulait, sa langue

enroulée, son vélocipède couché sur les roseaux,

je les mangerai cette nuit, leurs entrailles

sur l’assiette jaune de porcelaine et de limon,

avec du jasmin et la couleur bleue du pinceau,

les os sur le bord dentelé, puis je laverai

la faïence dans le pur liquide, troublant la

rivière, verre tremblant, glacé d’œufs, de

feuilles minuscules et rondes, avec le gravier

du fond et le sable de la berge, mais son

bras gela, parlant il s’endormit, de crachat

rempli, de sang parfumé, sa canne noire

au-dessus du monde, son reflet dans l’eau.

 

........................... (p.61)

 

 

 

 

Au couteau je fus découpé et mes morceaux

posés sur les planches, j’étais le bœuf qui

traîne les charrettes, l’âne, l’orang-outan,

découpé je fus par l’épée qui traversait les

ténèbres, par la main qui fouillait la nuit, par

les vilains doigts sans ongles, écourté je fus,

en mon encore sur les plantes à lait, saumon,

puissant, bœuf musclé, scié par la scie qui

passe entre les planches, qui fouille le

fumier et l’étable, et mis sous terre avec mes os.

 

 

........................... (p.63)

 

Ed. de Minuit, 1986 | © CLIQUER ICI

 

 

Fou civil

Ed. Argol, 2014 | © CLIQUER ICI