Rechercher : sur les routes du monde vol III
Nicolas Bouvier, L'usage du monde
Pendant mes années d’études, j’avais honnêtement fait de la « culture » en pot, du jardinage intellectuel, des analyses, des gloses et des boutures ; j’avais décortiqué quelques chefs d’œuvre sans saisir la valeur d’exorcisme de ces modèles, pace que chez nous l’étoffe de la vie est si bien taillée, distribuée, cousue par l’habitude et les institutions que faute d’espace, l’invention s’y confine en des fonctions décoratives et ne songe plus qu’à faire « plaisant », c’est-à-dire : n’importe quoi.
(p.92)
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J’ai trop besoin de cet appoint concret qu’est le déplacement dans l’espace.
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(…) le nomadisme rend sensible aux saisons : on en dépend, on devient la saison même et chaque fois qu’elle tourne, c’est comme s’il fallait s’arracher d’un lieu où l’on a appris à vivre.
(p.146)
23/01/2011 | Lien permanent
PROCHAINE PARUTION, OCTOBRE 2009 : ISTANBUL, VILLE MONDE
Après Alger, Palerme, Athènes, Beyrouth et Tanger, voici, dans la série des “portraits de ville”, le nouveau numéro de la revue consacré à Istanbul.
19/09/2009 | Lien permanent | Commentaires (1)
Les Carnets d'Eucharis 2021 - En livraison dès le 08 novembre 2021
LES CARNETS D’EUCHARIS
(SUR LES ROUTES DU MONDE – VOL. III]
[LIVRAISON LE 08 NOVEMBRE 2021]
avec le soutien de la Fondation Jan Michalski
Jean-Marcel Morlat Zoé Balthus Patrick Boccard Nicolas Boldych Jean-Paul Bota Jean-Paul Lerouge Zagros Mehrkian Estelle Ladoux Nathalie Riera Alain Fabre-Catalan Martine Konorski Claude Darras Marianne Simon-Oikawa Michèle Duclos Camille Loivier Armelle Leclercq Christophe Lamiot Enos Irina Bretenstein Gérard Cartier Geneviève Liautard Jennifer Grousselas Michèle Kupélian Richard Skryzak Dominique Pautre Jean-Paul Thibeau Barbara Bourchenin Jean-Charles Vegliante Patrizia Valduga Naomi Shihab Nye Angèle Paoli
La route d’Anatolie
[Puis la glaise et la boue s’allument de mille feux et le soleil d’automne se lève sur les six horizons qui nous séparent encore de la mer. Tous les chemins autour de la ville sont tapissés de feuilles de saule que les attelages écrasent en silence et qui sentent bon. Ces grandes terres, ces odeurs remuantes, le sentiment d’avoir encore devant soi ses meilleures années multiplient le plaisir de vivre comme le fait l’amour.]
Nicolas Bouvier L’Usage du monde – éditions Quarto Gallimard
Format : 16 cm x 24 cm | 230 pages (dont un Cahier visuel de 8 pages)
| France : 26 € (frais de port compris)
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07/11/2021 | Lien permanent
Claude Minière... et le monde dans son ordre par la justesse d'un trait
NOTE DE LECTURE
Par Nathalie Riera
15 avril – Écrites à Paris, à Londres ou à Oziers, ces pages du Journal accompagnent Hymne. À travers elles, je me fais le compagnon de mon poème, de son achèvement. De son départ et de son achèvement.
Claude Minière, Pall Mall, journal 2000-2003 – (p.77)
Pall Mall
Journal 2000 - 2003
Claude Minière
Editions Comp’Act, 2005
Le journal ne se veut pas lieu de confessions, et le poème ne cherche pas à rendre plus compréhensible le réel. Journal et Poème esquissent un vaste projet : demeurer lié au monde afin que le monde ne vous hait pas.
L’interrogation ne cherche pas de réponse, elle est action de remonter, de soulever, elle n’est qu’exigence de penser, à l’opposé des manières du monde et de ses vanités à ne vanter que le faux et son escorte de vulgarités.
Se défaire de l’ornement, taire le discours. Ne pas s’attarder, mais devancer. Toujours, devant, la voix menue du cœur qui aime à donner étreinte, qui aime à toujours aimer, ne pas rester dans le malheur, comme l’écrivait Hölderlin, mais chanter.
Ma poésie au fond répond à ce désir – « l’enfance retrouvée à volonté » - sans pathos, de corps immédiats, de traits et retraits, de bord de l’eau, de gestes sans jugement au rythme des feuillages. Exulter au cœur du monde.
Naître de l’esprit est nourricière du chant. La poésie de Claude Minière est certes vouée aux éléments familiers du quotidien, mais aussi et surtout à la liberté des espaces, aux paysages présents et dérobés, à ce qui fait rêve sans futiles rêveries.
Le journal est moyen de faire partir le poème, de passer par le poème, de passer par ce que l’on connaît et qui nous est nouveau. Et le poème est moyen de se tenir dans l’instant, toujours rester en la vérité, poursuivre l’enquête.
5 avril – Anna Dina Nurabelle. Plus fluides, les pensées doivent se faire plus fluides pour la sécheresse de l’arc-en-ciel, et comme « atomiques », pollens de lumière flottante.
Sécheresse d’une époque à laquelle quelques contemporains nous rappellent (à la manière d’Hölderlin) que peu de savoir nous est donné, mais de joie beaucoup.
Entre autre joie, celle du regard qui s’attache encore au sol, dans le vert profond d’une herbe, où les écrits ne flétrissent pas.
A la 112ème page de Pall Mall, le 16 novembre 2003 : Comment peut-on avoir encore envie, aujourd’hui, de publier ? Tout tombe dans la quantité à plat. Quant aux « critiques », il semble que Hymne les ait littéralement laissés sans voix. Aucun de mes livres n’a recueilli aussi peu de commentaires. Je pourrai dire que c’est bien ainsi : comment taire, comme enterre. Mais ce silence « gêné » rend d’autant plus précieux et vifs les rares gestes : celui de Marcelin Pleynet (et son invitation dans l’émission radiophonique « Surpris par la poésie », sur les ondes de France-Culture) ; celui de Pascal Boulanger (et l’article qu’il a écrit, qui paraîtra dans art press).
© Nathalie Riera, septembre 2009
06/09/2009 | Lien permanent | Commentaires (1)
Camille de Toledo, L'inquiétude d'être au monde, éd. Verdier (une lecture de Geneviève Liautard)
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UNE LECTURE DE Geneviève Liautard
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L’inquiétude d’être au monde
Camille de Toledo
Editions VERDIER, 2012
Collection Chaoïd
Site officiel | © http://www.editions-verdier.fr/v3/oeuvre-linquietudedetreaumonde.html
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■■■ L’auteur de ce chant met le doigt sur ce point sensible de notre cœur et appuie de toutes ses forces pour briser la concrétion qui en obstrue l’accès.
Quelle force dans ce recueil qui mêle prose et poésie dans une forme très libre dont on pourrait au premier abord se demander si elle est bien utile.
Mais bien sûr qu’ils sont utiles ces vers dont le rythme, la musique, les mots diffractés, réveillent - si besoin était encore après avoir lu : Je pense au père qui attend son enfant, le soir, et prie, en silence. Il ne croit pas en Dieu.
Quelque chose va avoir lieu, va ressurgir, nous le pressentons, quelque chose de terrible que nous avons oublié, que nous avons relégué au plus profond, quelque chose d’essentiel pourtant. Le visage du père… le visage d’Anna… Ettore !... là où il était, il ne reste que l’effroyable vide… voilà ce que Camille de Toledo nomme inquiétude et dès le début de ce livre, nous savons qu’il parle de nous et de ce que nous ressentons tous à des degrés divers dans nos vies, de ce qui empoisonne ce début de siècle. Cet impossible apaisement qui grandit avec l’âge il vient de loin, il suffit de se souvenir…
Du temps où l’homme était encore au centre, la nature maîtrisée, paisible… souvenir, nostalgie ! Que s’est-il passé pour que l’inquiétude se glisse ainsi dans le corps des choses ?
L’inquiétude est le nom
que nous donnons à l’impermanence
Et s’en suit ce que nous pressentions, le triste cortège des horreurs passées et présentes qui ont fait et continuent à faire de ce continent, un continent d’assassins.
Camille de Toledo parle en son nom de l’Europe, de son histoire, de ses langues. Et de ces dernières, il se méfie : langues impériales, coloniales, nationales, où l’on sait plus qu’ailleurs, comment les mots fabriquent des tueurs,
-et voilà qu’il agite devant nos yeux des images que notre société, passé l’effroi de la révélation, s’empresse d’oublier tant nous sommes abreuvés, par l’entremise des écrans, de massacres au quotidien : une île de Norvège, une école aux Etats-Unis ; il remonte l’Histoire, Grande Guerre, Shoa, élargit le spectre aux caprices de la terre…-
Il en parle sans concession,
Car l’Europe persiste,
supérieurement honteuse
de ce qu’elle a pu dire : Nous sommes, nous,
tandis que vous n’êtes pas.
...
...
Vous n’êtes rien, Nègres ou Juifs ou Indiens
vous n’êtes pas digne de brûler
dans le foyer de l’être.
Europe où des bêtes dociles sont abreuvées par les mots nations, identités, assurances, médicaments. Mots de clôtures qui, d’une main, attisent les peurs, et de l’autre, offrent les services de leurs chiens.
Et puis ce leitmotiv,
Comment est-ce arrivé ?
Orgueil, éloignement, indifférence, alors qu’il faudrait re-lier le mot Terre et le mot Homme