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16/09/2012

Eugenio Montale & Annalisa Cima (traduits par Raymond Farina)

 

HOMMAGE  A  EUGENIO  MONTALE

 

                                         ET ANNALISA  CIMA

 

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© traduits par Raymond Farina

 

 

montale&cima par Carmelo Bene.jpg

Annalisa Cima & Eugenio Montale

[par Carmelo Bene]

 

 

 

EUGENIO MONTALE

Sans coup de théâtre/Senza colpi di scena

 

 

Les saisons

ont presque disparu.

Tout cela n’était qu’un jeu trompeur des Esprits

de l’Ether.

 

Il ne nous est pas possible de vivre

par instants, par à-coups, par échappées

et en escapades longues et brèves.

 

Qu’on soit vivants ou morts, la balançoire

ne pouvait durer plus que l’éternel

le si fugace âge de notre enfance.

 

Voici que commence le cycle de la stagnation.

Les saisons ont fait leurs adieux

sans salamalecs ni cérémonies, lasses

de leur roulement. Nous ne serons plus

tristes ou heureux, oiseaux de l’aube ou de la nuit.

Nous ne saurons même plus

ce qu’est savoir et non savoir, vivre

presque ou pas du tout. C’est vite dit,

pour le reste nous nous en tiendrons au fait.

 

 

Le stagioni

sono quasi scomparse.

Era tutto un inganno degli Spiriti

Dell’Etere.

 

Non si può essere vivi

a momenti, a sussulti,a scappa e fuggi

lunghi o brevi.

 

O si è vivi o si è morti, l’altalena

non poteva durare oltre l’eterna

fugacissima età della puerizia.

 

Ora comincia il ciclo della stagnazione.

Le stagioni si sono accomiatate

senza salamelecchi o cerimonie, stanche

dei loro turni. Non saremo più

tristi o felici, ucelli d’alba o notturni.

Non sapremo nemmeno

che sia sapere e non sapere, vivere

o quasi o nulla affatto. È presto detto,

il resto lo vedremo a cose fatte.

 

 

Poème extrait de “Diario del 71 e del 72”

(Mondadori, Milan, 1973)

 

 

 

annalisa2.jpg

 

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ANALISA CIMA

Le tout et le rien/Il tutto e il nulla

 

 

Il ricane le temps rapace qui sait

combien il est pour nous inutile de croire

en notre étoile, inutile de passer

notre vie à jouir, car s'approche déjà

le jour de la douleur ainsi que de l'absence.

Démence des dieux cruels

qui nous laissèrent sous la coupe

d'un destin si obtus.

Devant la mort de nos amis

devant l'injure et le délire

de celui qui tourmente hommes et malheureux

toutes nos fibres se brisent dans la douleur.

C'est pour cela que j'accuse la vie injuste

qui fait souffrir tout un chacun.

J'accuse celui qui amasse de l'argent

parce que la vie est brève et qu'elle n'est vraie

que si on la vit comme un don.

Je voudrais me confier dans une fraternelle

accolade aux gens, qui comprennent

la signification de la connaissance.

Ainsi, poète et femme je pleure deux fois :

la naissance, la mort avec notre destin

dans les oscillations d'un chant modulé

aux notes qu'on siffle en sourdine.

Oui, les promesses d'un Eden bienheureux

n'étaient pas qu'ignobles mensonges.

Montrez-moi comètes le lieu

où je retrouverai mon oncle bien-aimé,

Colombine et Tita, ainsi que Montale

et Palazzeschi, Marianne et Amanda,

et je mettrai pour les rejoindre des ailes.

 

Où je retrouverai l'amour qui de tout temps

refleurit avec l'oléandre,

le lentisque qui brûle

et embaume, le myrte

qui calme la douleur: oh l'odeur

de la mort qui entoure le monde

et qui tourmente les vivants,

en narguant la naissance, en narguant le destin.

Avec le temps l'amour aussi part en fumée

s'envole comme s'envolent les heures;

ainsi notre cœur vieillit

et avec lui nos sentiments et notre audace.

Condottiera de batailles perdues,

grande idéologue de philosophies

jamais exposées; le monde comprendra-t-il

que n'existe aucune

possibilité de salut ?

La terre finira dévorée par

des vents pestilentiels, les hommes

périront peut-être avec eux, mais leur trace

restera dans ces pierres.

Ici devant les nuraghes,

parfaites constructions mégalithiques,

je revis aujourd'hui une culture antique              

histoires de vie et de mort comme toujours.

M'est donné le pouvoir de retenir ou de

lâcher des œuvres qui pourraient s'éparpiller

mais signifient maintenant vie et amour.

Nous avons supporté hérétiques et saints,

penseurs, transgresseurs et héros,

et l'éternelle créature continue à engendrer

d'autres êtres et joue indifférente avec

les neurones et le destin : l'inconscient.

 

 

Des voiles qui s'ouvrent, des mers qui se ferment.

Le temps dévore tout, mais

restera le souvenir même en un seul

être vivant : que ce soit un homme ou un ver.

Oh mer couleur de l'émeraude

où l'on se regarde avec Thétis et Neptune,

personne n'oubliera tes eaux heureuses,

ni les poissons ni nous qui nous laissions lécher.

Tu es l'ensemble de toutes ces particules

qui vivent dans une éternité bienheureuse,

nous sommes des petits pions de ce jeu,

mais nous deviendrons un jour nous aussi

une partie de ces eaux et de ce tout.

Comme les vers, l'ammoniac, l'énergie,

nous survivrons de trois façons différentes.

Nous pourrons, libérés des offenses du mal,

engendrer des vers indéfiniment,

nourrir les plantes et les semences

et persister comme l'énergie solaire.

Il tourne en rond l'arc du désir.

Et le vent tourbillonne à l'entour

pour nous rappeler le son des violons

et des contrebasses qui accompagnera

notre ultime voyage vers

le rien éternel, qui n'est pas le néant,

parce que le vent lui aussi a un son,

et la mer un son différent,

parce que la solitude est pour l'homme

la plus grande des punitions.

Nous vivrons oui dans le rien, mais unis

dans des enchaînements d'atomes lumineux

dans ce tout et rien qu'est la vie

en contraste avec une vie

qui n'est qu'attente de la mort.

 

 

Ride il tempo predatore che sa

quanto per noi sia inutile sperare

nel buon fato, inutile gioire

nel vivere, perché già s’avvicina

il giorno del dolore e dell’assenza.

Demenza degli dèi crudeli

che ci lasciano in balia

di un destino ottuso.

Per la morte dei nostri amici

per l’ingiustizia e il delirio

di chi perseguita uomini e infelici

si spezza nel dolore ogni fibra.

Perciò accuso il vivere ingiusto

che fa soffrire questi e quelli.

Accuso chi accumula denaro,

Perché la vita è breve ed è vera

solo s’è vissuta come dono.

Vorrei espandermi in un fraterno

abbraccio alla gente, che capisce

il significato della conoscenza.

Così, poeta e donna piango due volte :

nascita, morte e la nostra sorte,

in un alterno canto modulato

di sibilanti e note sommesse.

Sì, le promesse d’un Eden felice

non erano che laide bugie.

Dove ritroverò il nonno amato,

Colombina e Titta, dove Montale

e Palazzeschi, Marianne e Armanda,

indicatelo voi comete il luogo

e metterò l’ali per raggiungerli.

 

 

Dove ritroverò l’amore che da sempre

rifiorisce insieme all’oleandro,

dove il lentischio che brucia

e profuma, dove il mirto

che lenisce il dolore. Oh odore

irridente nascita, irridente destino.

Anche l’amore sfuma con il tempo

Svanisce come svaniscono le ore ;

così il cuore invecchia

e con lui sentimenti e ardire.

Condottiera di battaglie perdute,

grande ideologa di filosofie

mai espresse ; capirà il mondo

che non esiste possibilità

alcuna d’essere salvato ?

Finirà la terra divorata da

maleodoranti venti, gli uomini

forse periranno con lei, ma rimarrà

traccia di loro in queste pietre.

Qui di fronte ai nuraghi,

perfette costruzioni megalitiche,

oggi rivivo una cultura antica

storie di vita e morte come sempre.

A me è dato il poter ricordare

o lasciar scritti che forse spariranno,

ma che ora significano vivere ed amare.

Hanno sofferto eretici e santi,

pensatori, trasgressori ed eroi,

e l’eterno creato continua a generare

altri esseri e gioca indifferente

con neuroni e destini: l’incosciente.

 

 

Veli che s’aprono, mari che si chiudono.

Il tempo divora ogni cosa, ma

rimarrà il ricordo anche in un solo

essere vivente : uomo o verme che sia.

Oh mare dal colore di smeraldo

dove specchiarsi  con Teti e Nettuno,

nessuno dimenticherà le tue acque felici,

né i pesci, né noi che ci lasciamo lambire.

Tu sei l’insieme di tante particelle

viventi in un’eternità felice,

noi siamo piccole pedine del gioco,

ma diverremo un giorno anche noi

parte di queste acque e di questo tutto.

Come vermi, ammoniache, energia,

Sopravviveremo in tre modi diversi.

Potremo liberi dagli insulti del male

generare vermi all’infinito,

alimentare piante e semi

e perdurare come l’energia solare.

Gira in tondo l’arco del desiderio.

E il vento, turbine intorno

per ricordarci il suono dei violini

e contrabbassi che accompagnerà

il nostro ultimo viaggio verso

il nulla eterno, che non è il niente,

perché anche il vento ha un suono,

e il mare un altro suono,

perché la solitudine per l’uomo

è la più grande punizione.

Vivremo sì nel nulla, ma uniti

in catene di atomi lucenti

in quel tutto e nulla che è vita

da contrapporre al vivere

ch’è solo attesa della morte.

 

 

 

Poème extrait de « Il tempo predatore »

in « Di canto in canto »

(Longo Editore, Ravenne, 2007)

 

 

ANNALISA CIMA

Née en 1941 à Milan.

En 1965 elle expose ses œuvres à Venise puis au Brésil, aux USA, en Suisse et au Japon où elle fait la connaissance de Akiro Kurosawa. Puis, à la fin des années 60, elle fait celle de M. Marini,  Max Ernst,  Pablo Picasso,  Jorge Guillen, A. Palazzeschi, Giuseppe Ungaretti, Ezra Pound.

Elle rencontre, en 1968, Eugenio Montale à l’œuvre duquel elle consacrera plus tard de nombreux essais (Eugenio Montale, via Bigli, Milano, Milan, Scheiwiller, 1968 ;  Incontro Montale, Milan, Scheiwiller, 1973; Le reazioni di Montale ,in Profilo di un autore : Eugenio Montale, Milan, Rizzoli, 1977). Elle est actuellement présidente de la Fondation Schlesinger de Lugano.

Parmi ses nombreuses recueils figurent notamment Terzo Modo ( Milan, Scheiwiller, 1969 ), La genesi e altre poesie (Milan, Scheiwiller,1971), Immobilita (Milan, Scheiwiller,1974), Sesamon (Milan, Guanda,1977), Ipotesi d’amore (Milan,  Garzanti,1984), Aegri somnia somnia (Stamperia Valdonega, Vérone, 1989), Eros e il tempo ( Stamperia Valdonega,Vérone 1993 ), Quattro Canti (Stamperia Valdonega, Vérone, 1993), Il tempo predatore, avec des dessins inédits d‘Eugenio Montale ( Milan, Scheiwiller, 1997 ), Manifesto dell’oblio (Pulcino-Elefante, 2001),Rivive (Pulcinoelefante, 2004), Un canto per Cordelia (Josef Weiss Editore, 2007), Di canto in canto (Longo Editore, 2007).

Auteure d’essais sur Marianne Moore, Ungaretti, Palazzeschi, Guillén et Pound, elle a aussi traduit des poèmes de Paul Celan et Emily Dickinson.

Ses oeuvres ont été traduites en chinois, en français, en anglais, en portugais, en espagnol, en japonais, en allemand.

 

 

■ SITE www.annalisacima.com

ANNALISA CIMA

Le muse convergenti

 

 

 

Dossier publié avec l’aimable permission d’Annalisa Cima, Présidente de la Fondation Schlesinger.