Julio Cortazar (22/08/2010)

 

  

Julio Cortázar

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CrÉpuscule d’automne
  
Collection Ibériques, 2010 - Traduit par Silvia Baron Supervielle
 

 EXTRAITS
 
Editions José Corti

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Pour lire de façon interrogative

(p.61)  

 


 

 

 

 

 

Tu as vu 

véritablement tu as vu 

la neige les astres les pas feutrés de la brise 

Tu as touché 

pour de vrai tu as touché 

l’assiette le pain le visage de cette femme que tu aimes tant 

Tu as vécu 

comme un coup sur le front 

l’instant le souffle bref la chute la fuite 

Tu as su 

par chaque pore de la peau su 

que tes yeux, tes mains, ton sexe ton cœur tendre 

il fallait les jeter 

il fallait les pleurer 

il fallait à nouveau les inventer.

 

 

 

 

 

 

 

Air du sud

 

(p.80)

 


 

 

 

(…)

 

 

 

Machine de la pampa, quel engrenage de chardons

contre la peau de la paupière, ô crochets de l’ail ivres, 

de chicorées âpres triturées.

La bande furtive coupe le vent en diagonale 

et le profil du moulin 

ouvre entre deux oublis de l’horizon 

un rire de pendu. Le peuplier gravit 

sa colonne dorée, mais le saule 

connaît mieux le pays, ses cinéraires vertes 

reviennent baiser en silence les bords de l’ombre.

 

 

 

(…)

 

 

 

 

 

 

 

Voyage infini

 

(p.132)

 


 

 

 

(…)

 

 

 

Oui, portulan, l’incendie de l’émeraude,

syrte et fanal d’une entreprise commune

lorsque la bouche navigante embrasse

la mare la plus profonde de ton dos,

 

 

 

suave cannibalisme qui dévore

sa proie en équilibre sur l’abîme, 

ô labyrinthe exact de soi-même 

où la terreur des délices réside,

 

 

 

                        eau pour ton voyageur qui a soif 

                        au bord du lit la lueur veilleuse

                        mène à tes cuisses sa gazelle fluide

                        et enfin la fleur frémit et se déprend.

 

 

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