Roland Dauxois - poèsie & peinture (05/02/2009)
Roland Dauxois, né à Lyon en 1957, travaille dans l’industrie des arts graphiques jusqu’en 1992, rencontre et se lie d’amitié avec le peintre et écrivain belge jean Raine à Rochetaillée-sur-Saône. Expose dans de nombreux salons lyonnais, membre du jury du salon Regain 1980-1984. Membre de la cave littéraire à Villefontaine. Participe à des lectures dans différents lieux publics. Fonde avec des amis écrivains les Editions du Vampire Actif en 2008. Publie régulièrement dans la revue de poésie lyonnaise Verso animée par alain Wexler.
« Peinture et écriture deux formes d’expression qui m’ont toujours habité. Je les situe toutes deux dans cette préoccupation : tendre à une certaine universalité. Ces deux formes de créativité bien différentes dans leur vécu me permettent non de me soustraire au monde mais d’expérimenter des tentatives de traduction de ce monde, de redécouvrir une forme de spiritualité non soumise à des dogmes. »

Hors de - 2003
La Ruche du monde
Hors la ruche du monde
 nous habitons les ossuaires du verbe,
 notre métier : tisser en haute lumière
 la lice où nos paroles s'affrontent.
 
 Hors la ruche du monde
 nos fronts sont brûlants de fièvre.
 Nous avons soif d'oracles et de signes,
 soif d' ombres mêlées de terres et de vents,
 soif de marches sur les sommets du monde,
 soif de réponses,
 de visions magiques,
 mais les  cercles anciens
 traversés d'ondes et de câbles
 ne transmettent plus aujourd'hui
 que des peurs nouvelles.
  
 Hors la première ruche du monde
 nous avons perdu le goût du miel.
Hors du chant
 Hors ce côté solide du verbe,
 hors ce côté du squelette de la parole,
 hors cette naissance,
 hors du sommet et de la plaine,
 hors de l'ivresse,
 hors du tourment absolu,
 du manque d'eau,
 hors de ces interminables couloirs
 qui conduisent aux chambres,
 hors les rivières,
 hors les lits fangeux du fleuve,
 hors la bouche bavarde,
 hors cette parole
 hors ces paradis d'argile
 et ces grottes très sombres,
 hors la première version du texte,
 hors du premier versant,
 hors de ce peu de bravoure
 qui nous fait tenir
 côte contre côte,
 chair contre chair,
 hors ce premier brouillard
 qui nous immerge,
 hors ce  mur,
 cet arbre,
 cette table,
 où nous voulons en finir
avec toutes nos faims et nos soifs,
 hors ce tronc
 dans lequel se creuse la pirogue,
 hors ces yeux
 qui font mentir la bouche,
 hors ces armes qui parlent
 le langage du feu,
 hors ce feu qui forge l'arme,
 hors ces coups qui pleuvent sur nos têtes,
 hors ces mauvais esprits
 qui brandissent leurs colères
 comme des torches,
 hors ces pays traversés
 par les vents, les guerres, les famines,
 hors l'innocence
 et son existence toujours coupable,
 hors cette pierre,
 hors ce couteau planté dans la chair,
 hors cette ouverture dans le ciel,
 incompréhensible
 et belle à la fois,
 hors les réseaux
 et leurs bruissements de ferraille,
 hors les machines
 et leurs sirènes dictatures,
 hors tous les murs
 et leurs cris tagués,
 hors ces fuites incessantes,
 hors ces champs ravagés
 sous des herses semeuses d'effrois,
 hors ces silences
 plantés comme des lances
 dans la terre des ancêtres,
 hors ces chemins
 qui ne connaissent pas encore les routes,
 ni le sens giratoire,
 ni le sens interdit,
 ni le sens unique,
 ni le double sens,
 ni l'obligation de céder le passage,
 ni la route absolument prioritaire
 sur toutes les autres,
 ni le passage protégé,
 ni les feux comme des drapeaux
 voleurs d'aubes et d'aurores,
 ni tout sens imposé par les dictionnaires,
 hors la grande circulation du sang dans vos veines,
 hors le niveau des mers qui monte,
 hors la véhémence du ciel d'avant l'orage,
 hors les grandes migrations,
 hors l'exil
 et ses pensées exténuées,
hors ces chants impénétrables,
 hors ces sphères brûlantes qui s'ouvrent,
 hors ce travail,
 hors ce jeu dans l'espace préservé du sommeil,
 hors cette langue
 éraflure faite au soleil,
 blessure au flanc d'une colline,
 jouissance dans l'arène de sable,
 hors cet art de marcher
 sans heurter la pierre,
 sans jamais toucher le sol.
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Commentaires
Merci d'avoir mis en ligne ces très beaux textes de Roland. Voici une écriture poétique qui mérite vraiment qu'on s'intéresse à elle... Bien à vous,
Karine
Écrit par : Karine | 05/02/2009
De bons souvenirs cette photo...
Écrit par : adupuy | 02/03/2009