L'époque sévère (21/12/2008)

Ce bois mauve bordé de clairières où l’éclair a démis le chêne

Michel Deguy

 

 

L’EPOQUE SEVERE

Nathalie Riera

 

Cette « arche d’alliance » nous dit Seamus Heaney, entre le langage et la sensation. Ou encore John Keats, qui demandait : Ô qu’on me donne une vie de sensation plutôt qu’une vie de pensée !

 

 

Le réalisme que nous vivons. Notre si faible exaltation « à la note positive ». Nos quotidiens avec ces manières d’excavations.

 

 

Un réel à vif, qui n’est jamais lointain, loin du chant.

 

Vivifier ce qui diminue, se décourage, malmène.

 

Au bord de jouir qui jamais n’use le cœur des mots.

 

Par quel art ou quelle arme être, et rien de plus.

 

 

Prendre l’essor contre ce qui m’assassine.

Cette vague et large alliance entre les voiliers et les vents.

 

 

Dans sa Troisième Elégie, Anna Akhmatova écrit :

 

 

L’époque sévère

m’a détournée comme un fleuve vers

un autre lit. On m’a changé de vie.

 

« Les élégies du Nord », Leningrad, 1944.

 

 

Battements et fulgurances les sens. Me réjouissent de leurs intrigues et leurs rythmiques. Faudrait alors que soient plus fluides, empoignées, embourdonnées, nos clairières. Plus vives encore dans les dissonances et les distances.

 

Nous prend et nous rend, rien de plus.

(C’est ce que je sais de l’amour)

 

De jouir parce que vivre, ne pas avoir oublié, comme ces joies qui ont laissé leurs empreintes en dépit des vents.

 

 

& vers ce vert d’un autre vert :

vivre qui n’est pas verbiage.

 

Intensément.

 

Nathalie Riera

L’époque sévère (extrait)

19 décembre 2008

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The Cotton Pickers

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 Ramassage du coton

Cajazeiras, région Paraiba, Brésil, 1980

 

S. Salgado

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